- Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre) LinkedIn
- Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Facebook
- Cliquez pour partager sur WhatsApp(ouvre dans une nouvelle fenêtre) WhatsApp
- Cliquez pour partager sur Telegram(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Telegram
- Cliquez pour partager sur Threads(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Threads
- Cliquer pour partager sur X(ouvre dans une nouvelle fenêtre) X
- Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Imprimer
Now using node v22.15.1 (npm v10.8.2)
Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2
Codex est déjà installé.
Lancement de Codex…
Par un arrêt du 4 juillet 2025, la Cour d’appel de Toulouse statue sur l’indemnisation complémentaire d’une victime d’un accident du travail après reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par un arrêt du 14 septembre 2023. L’affaire naît d’un accident de tondeuse ayant entraîné l’amputation d’un orteil, la prise en charge au titre des risques professionnels, puis un débat sur la date de consolidation et l’étendue des préjudices indemnisables au-delà du livre IV du code de la sécurité sociale.
Le pôle social du tribunal judiciaire d’Agen avait, par jugement du 27 septembre 2021, écarté la faute inexcusable. La Cour d’appel de Toulouse l’a ultérieurement reconnue, ordonnant une expertise et réservant l’évaluation des préjudices. Saisie après dépôt du rapport, la cour fixe la consolidation à la date arrêtée par l’organisme social en 2015, circonscrit les postes temporaires aux seules périodes antérieures, écarte une demande de remboursement de frais de santé, et retient divers chefs de préjudice permanents, notamment l’agrément, sur pièces. La question posée tient à l’articulation entre le principe d’exclusivité du régime professionnel, l’ouverture d’une indemnisation complémentaire en cas de faute inexcusable, et la portée des décisions techniques relatives à la consolidation.
La cour réaffirme les fondements en rappelant que « la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne peut pas poursuivre, devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale, la réparation de son préjudice selon les règles du droit commun de la responsabilité contractuelle ». Elle rappelle encore que « les dispositions de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel, ne font pas obstacle à ce que, lorsque la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, […] [la victime] puisse demander à l’employeur […] réparation […] de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ». Sur la consolidation, l’arrêt tranche nettement: « la date de consolidation est donc fixée au 21 octobre 2015 » et en déduit que « [i]l s’ensuit qu’aucune indemnisation ne peut intervenir pour les périodes postérieures à la date précitée ». Enfin, la cour précise l’assise de l’obligation de paiement issue de la faute inexcusable en citant que « par application des dispositions de l’article L.452-3-1 du code de la sécurité sociale, quelles que soient les conditions d’information de l’employeur par la caisse […], la reconnaissance de la faute inexcusable […] emporte obligation pour celui-ci de s’acquitter des sommes dont il est redevable ». L’étude du sens, de la valeur et de la portée de cet arrêt s’impose.
I. Le cadre légal de l’indemnisation complémentaire et sa lecture par la cour
A. L’exclusivité du régime professionnel et l’ouverture corrélative en cas de faute inexcusable
La cour s’inscrit dans la ligne classique en rappelant l’écran du livre IV face au droit commun. En cela, elle stabilise le périmètre juridictionnel et le fondement de la réparation. Le rappel selon lequel « la victime d’un accident du travail […] ne peut pas poursuivre […] la réparation […] selon les règles du droit commun » fixe le cadre, tandis que l’arrêt réactive l’exception de faute inexcusable comme vecteur d’indemnisation complémentaire, distincte de la seule majoration de rente.
Cette articulation ressort aussi du visa des textes combinés et de leur interprétation constitutionnelle. La juridiction d’appel mobilise utilement l’article L. 452-1 et les articles L. 452-2 et L. 452-3, puis s’appuie sur la lecture autorisée du contrôle de constitutionnalité. Cette grille de lecture légitime l’extension des chefs indemnisables au-delà de l’énumération stricte, tout en maintenant l’exclusivité quant aux prestations en nature.
B. L’extension aux dommages non couverts et la sécurité normative de l’obligation de payer
La cour cite expressément la formule de principe: « [les] dispositions de l’article L. 452-3 […] ne font pas obstacle » à l’indemnisation de l’« ensemble des dommages non couverts par le livre IV ». Cette reprise textuelle clarifie la portée, en reconnaissant la vocation du contentieux de la faute inexcusable à capter les préjudices extrapatrimoniaux non servis par le régime de base, dont le déficit fonctionnel temporaire, l’agrément et l’esthétique.
L’assise de l’obligation est confortée par l’article L. 452-3-1, cité pour affirmer que, « quelles que soient les conditions d’information […] par la caisse », la décision passée en force oblige l’employeur à s’exécuter. L’arrêt consolide ici la sécurité de paiement, indépendamment des aléas de l’instruction initiale, et trace une ligne de partage claire entre le rôle d’avance de l’organisme social et le recours contre l’employeur tenu.
II. L’application contentieuse: consolidation, postes indemnisables et méthode d’évaluation
A. La détermination de la consolidation et ses effets limitatifs sur les postes temporaires
La cour retient la date fixée en 2015 par la décision technique devenue définitive, après avoir relevé l’incompétence de l’expert pour la modifier et l’absence de contestation dans le délai. Cette solution éclaire la contrainte procédurale pesant sur la date charnière et sécurise la frontière entre dommage temporaire et séquelles.
L’arrêt en tire deux conséquences nettes et citées. D’abord, « la date de consolidation est donc fixée au 21 octobre 2015 ». Ensuite, « [i]l s’ensuit qu’aucune indemnisation ne peut intervenir pour les périodes postérieures à la date précitée ». La cour applique alors la règle de stricte temporalité: le déficit fonctionnel temporaire, l’assistance humaine et l’esthétique temporaire sont cantonnés aux seules périodes antérieures. Cette rigueur méthodologique est cohérente avec la définition rappelée: « [l]’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire inclut […] l’incapacité fonctionnelle […] ainsi que les pertes de qualité de vie […] jusqu’à la date de consolidation ».
B. Les chefs de dommage retenus et écartés: cohérence des principes et pragmatisme probatoire
La juridiction confirme l’impossibilité d’une indemnisation complémentaire des dépenses de santé, déjà prises en charge au titre des prestations en nature. Elle rattache ce refus au principe d’exclusivité du livre IV et au cloisonnement fonctionnel des postes couverts, maintenant ainsi la séparation des canaux indemnitaire et prestataire.
S’agissant du préjudice d’agrément, la cour rappelle la finalité du poste: « [c]e poste de préjudice répare l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique ou de loisirs ». Elle dépasse la réserve de l’expert, en se fondant sur des attestations circonstanciées pour retenir la limitation d’activités sportives régulières et allouer une somme mesurée. La solution valorise la preuve par pièces concordantes et montre que l’absence de pratique associative formalisée ne ferme pas l’accès au poste lorsque la pratique personnelle est établie.
L’arrêt retient aussi un déficit fonctionnel permanent de 6 %, évalué au point barémique pertinent, et fixe les souffrances endurées à un niveau médian au regard de l’atteinte et des soins subis. L’esthétique est ventilée entre temporaire et permanent selon l’intensité observée. Cette calibration respecte les canons indemnitaires, limite les doublons, et s’inscrit dans une économie d’ensemble lisible, où chaque chef répond à sa fonction propre sans empiéter sur les prestations légales.
Au total, l’arrêt articule fermement le principe d’exclusivité et l’ouverture réparatrice de la faute inexcusable, verrouille la consolidation comme pivot temporel, et ordonne une indemnisation complémentaire ciblée. Par la reprise de formules de principe et la discipline des postes, la Cour d’appel de Toulouse propose une grille opérationnelle, aisément transposable, pour mesurer des atteintes fonctionnelles et existentielles non couvertes par le régime de base.