Cour d’appel de Versailles, le 11 septembre 2025, n°23/01617

La Cour d’appel de Versailles, 11 septembre 2025, chambre sociale, statue avant dire droit dans un litige de rupture du contrat de travail. La salariée, engagée en 2011 comme assistante de vie à temps partiel, a été licenciée pour faute lourde en octobre 2016. Elle a saisi la juridiction prud’homale pour contester le bien-fondé du licenciement et obtenir diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire.

Après un renvoi de compétence, le conseil de prud’hommes de Saint‑Germain‑en‑Laye a, le 17 mai 2023, dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné les héritiers de l’employeur défunt, chacun pour un tiers, au paiement de plusieurs sommes. Les héritiers appelants sollicitent l’infirmation de ces condamnations. L’intimée demande une confirmation partielle, tout en révisant les montants et en sollicitant, de manière réitérée, la « fixation » de sommes à son profit.

La Cour rappelle que « En application de l’article 4 du code de procédure civile, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. » Elle constate, d’une part, l’ambiguïté attachée à des demandes de fixation plutôt que de condamnation en appel. Elle relève, d’autre part, une incertitude sur la qualité d’héritier d’un défendeur. Au visa des garanties du contradictoire et des pouvoirs de direction des débats, la Cour décide « Vu les articles 16 et 444 du code de procédure civile, » puis « Ordonne la réouverture des débats sans renvoi à la mise en état, » et enfin « Renvoie l’affaire à l’audience de plaidoiries du lundi 13 octobre 2025 à 14 heures en salle 7. » Elle « Réserve les dépens. »

I. L’objet du litige en appel et la portée d’une demande de fixation

A. La délimitation prétorienne par le principe dispositif et l’effet dévolutif
Le rappel du principe dispositif fixe le cadre du contrôle exercé par le juge d’appel. La Cour souligne que « l’objet du litige est déterminé par les prétentions » au sens de l’article 4 du code de procédure civile, ce qui interdit toute décision ultra petita. L’effet dévolutif borne, en outre, l’office de la Cour aux chefs critiqués et aux prétentions effectivement formées en cause d’appel. La précision des chefs et le contenu exact des demandes gouvernent donc l’étendue de la saisine. Une prétention exprimée en termes de fixation, non de condamnation, interroge le régime de l’exécution et la nature de la chose jugée.

Cette articulation conduit la Cour à privilégier un éclaircissement procédural avant de statuer. La réouverture des débats vise à prévenir une décision incomplète ou inadaptée aux limites du dispositif des parties.

B. Les conséquences pratiques d’une demande de fixation en lieu et place d’une condamnation
La demande de fixation pose une difficulté spécifique en contentieux prud’homal. Elle peut signaler une logique de détermination d’une créance sans effet exécutoire direct, alors que la condamnation confère un titre. En appel, où l’intimé peut former des prétentions incidentes, qualifier la demande importe pour circonscrire le pouvoir de statuer. Une fixation seule pourrait ne pas répliquer au dispositif du jugement frappé d’appel, qui énonçait des condamnations pécuniaires fermes.

La Cour se prémunit contre le risque d’une solution impropre à être exécutée, ou d’un dépassement des demandes. L’initiative procédurale, calée sur l’article 444 du code de procédure civile, vise à obtenir des conclusions explicites, afin d’arrêter un dispositif cohérent avec l’office juridictionnel.

II. La qualité d’héritier et la garantie du contradictoire

A. L’exigence de débat loyal sur la capacité d’être partie poursuivie
Le point litigieux relatif à la qualité d’héritier affecte la détermination des défendeurs légitimement attraints. En matière successorale, la preuve de cette qualité conditionne la recevabilité des condamnations personnelles et la répartition des charges du passif successoral. La Cour mobilise les garanties processuelles pour assainir ce point préalable. Elle statue « Vu les articles 16 et 444 du code de procédure civile, » assurant que chaque partie puisse présenter ses observations et pièces pertinentes.

Cette démarche respecte le double impératif d’impartialité structurante et d’efficacité de la future décision au fond. Elle évite des nullités et renforce la résistance du dispositif à une critique d’irrégularité.

B. Les incidences de la qualité successorale sur l’étendue des condamnations
L’identification précise des héritiers portés en la cause gouverne l’étendue d’une éventuelle condamnation. La part dans l’indivision, les modalités d’acceptation de la succession et l’opposabilité des actes successoraux influent sur la dette salariale et sa ventilation. Une confusion sur la qualité d’héritier exposerait la décision à une difficulté d’exécution, voire à une censure pour défaut de base légale.

La Cour reporte donc la solution au fond pour préserver la cohérence du dispositif et la sécurité juridique des parties. Elle prend soin d’ordonner que l’affaire soit reprise à brève échéance, et précise le calendrier des écritures. L’ordonnance « Ordonne la réouverture des débats sans renvoi à la mise en état, » afin de traiter, dans le respect du contradictoire, ces questions déterminantes.

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Hassan KOHEN
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