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Par un arrêt du 11 septembre 2025, la cour d’appel de Versailles statue sur l’orientation d’une saisie immobilière diligentée pour recouvrer des charges de copropriété. Le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre avait, par jugement du 3 avril 2025, ordonné la vente forcée et rejeté diverses contestations. L’appelant sollicitait la nullité du commandement de payer, dénonçait l’absence de qualité à agir du syndic, invoquait un grief tiré du curateur de succession vacante, et prétendait à la nullité d’une déclaration de créance. Il arguait surtout de la prescription de l’exécution d’une ordonnance de référé fondant la créance déclarée par un créancier inscrit. Il demandait subsidiairement des délais ou une vente amiable. L’intimé concluait à la confirmation et à l’allocation de frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La cour précise d’emblée que « il est rappelé qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties, et qu’elle n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ». L’enjeu principal porte sur l’articulation de l’article L.111‑4 du code des procédures civiles d’exécution avec l’article 2234 du code civil, et sur le contrôle de proportionnalité des voies d’exécution. La décision tranche aussi l’ordre des moyens de nullité et l’effet exécutoire immédiat des résolutions d’assemblée générale.
I. Les exigences procédurales et l’habilitation à agir
A. L’exception de nullité et l’ordre des moyens
La cour confirme l’irrecevabilité d’une exception de nullité contre le commandement, faute d’avoir été utilement soulevée in limine litis devant le premier juge. Le reformatage des écritures en appel ne répare pas le retard, l’appelant ayant d’abord développé des défenses au fond et des fins de non‑recevoir. Le rappel est net: « la nullité de l’acte pour vice de forme devant être soulevée in limine litis en application de l’article 74 du code de procédure civile. » La solution s’inscrit dans la logique d’un contentieux d’exécution rapide, où l’ordre des moyens garantit la sécurité et la célérité des poursuites. Elle ferme aussi la voie aux requalifications de pure forme lorsque la défense au fond a déjà été engagée.
B. Habilitation du syndic et succession vacante
S’agissant de la qualité à agir, la cour retient qu’une résolution d’assemblée générale habilitant le syndic à poursuivre en saisie immobilière est exécutoire dès son adoption. Elle juge qu’« il résulte de ce même article 42 de la loi n°65‑557 du 10 juillet 1965 que, sauf dans des cas limitativement énumérés par son alinéa 3, qui ne vise pas la décision d’engager une saisie immobilière, aucun effet suspensif de l’exécution des résolutions de l’assemblée générale n’est attaché au délai de contestation prévu par ce texte : la décision de l’assemblée s’impose à tous, dès qu’elle est votée, sans qu’il y ait lieu d’attendre l’expiration des délais de recours. » L’argument tiré d’une notification imparfaite ou d’un caractère prétendument non définitif échoue donc. Enfin, la mise en cause du curateur cesse d’être nécessaire dès l’acceptation pure et simple de la succession par les héritiers, ce qui rend sans objet l’obligation de viser l’auxiliaire antérieurement désigné.
II. Prescription du titre et contrôle des mesures d’exécution
A. Prescription de l’exécution et distinction des qualités de créancier
Le débat central concerne l’exécution d’une condamnation exécutoire pendant dix ans au sens de l’article L.111‑4 du code des procédures civiles d’exécution. La cour précise la portée de la suspension de l’article 2234 du code civil en énonçant que « la suspension du cours de la prescription en application de ce texte n’est pas automatique, mais n’a lieu que si le créancier est mis concrètement dans l’impossibilité d’agir. » Elle ajoute avec rigueur que « au surplus, la règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est empêché d’agir ne s’applique pas lorsque le titulaire de l’action disposait encore, à la cessation de l’empêchement, du temps nécessaire pour agir avant l’expiration du délai de prescription. » Constatant que le délai résiduel permettait d’exécuter utilement contre le représentant de la succession, la cour retient la prescription de l’exécution du titre. Elle le dit explicitement: « Dit que l’exécution de l’ordonnance de référé rendue le 14 janvier 2013 par le président du tribunal de grande instance de Nanterre est prescrite. » Il en résulte la nullité de la déclaration de créance effectuée par le créancier inscrit sur ce fondement. La cour clarifie parallèlement l’office du texte régissant la vente forcée: « Ce texte, qui interdit qu’une vente forcée puisse être requise par un créancier poursuivant sur la base d’un titre qui n’est pas définitif, ne fait pas obstacle à la déclaration de créance d’un créancier inscrit et sommé de le faire, fût‑ce en vertu d’un titre seulement provisoire. » La distinction entre créancier poursuivant et créancier sommé est ainsi affirmée; la sanction intervient ici non pour défaut de définitivité, mais pour prescription acquise du titre invoqué.
B. Proportionnalité, délais et vente amiable
La cour contrôle ensuite la proportionnalité de la saisie au regard des diligences antérieures et du montant de la dette, en s’appuyant sur l’article L.111‑7 du code des procédures civiles d’exécution. Après avoir relevé des saisies attribution, parfois infructueuses, elle écarte la proposition de se limiter à une saisie des loyers, déjà appréhendés comme fruits du bien saisi. Le constat est net et mesuré: « La mesure de saisie immobilière n’apparaît pas disproportionnée. » Le rejet des délais repose sur l’insuffisance des justificatifs de solvabilité et l’ancienneté de la dette; la cour note notamment que « il ne justifie cependant pas de la perception effective des loyers afférents. » L’équilibre du contrôle se poursuit avec le refus d’une vente amiable faute de démarches sérieuses, l’inaction de l’appelant ne permettant pas de crédibiliser une alternative à l’adjudication. La position préserve la finalité d’apurement rapide des charges, sans imposer l’épuisement préalable de toutes voies d’exécution, et sans dénaturer l’office du juge de l’exécution.
Ainsi structurée, la décision combine une orthodoxie procédurale stricte et une appréciation substantielle exigeante des conditions de l’exécution forcée. Elle confirme l’orientation de la procédure, tout en purgeant la distribution d’une créance déclarée sur un titre prescrit, et en encadrant les demandes dilatoires par un contrôle effectif de proportionnalité.