Cour d’appel de Versailles, le 2 septembre 2025, n°25/02579

La cour d’appel de Versailles, chambre sociale 4-5, le 2 septembre 2025, statue sur une requête en rectification d’erreur matérielle. Cette requête vise l’arrêt du 19 juin 2025 rendu dans un litige prud’homal opposant une salariée, un syndicat et un établissement public.

Les requérants ont saisi la cour le 21 juillet 2025, reprochant des erreurs et omissions matérielles affectant le dispositif et l’accessoire des condamnations. L’employeur s’en est rapporté à justice par message du 12 août 2025; les requérants ont confirmé leurs écritures le 25 août 2025. La juridiction a statué sans audience conformément au texte applicable.

La question posée est celle de l’usage de l’article 462 du code de procédure civile pour réparer des erreurs purement matérielles sans toucher au fond. Le texte énonce: « Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées ». Il prévoit aussi: « Toutefois, lorsqu’il est saisi par requête, il statue sans audience, à moins qu’il n’estime nécessaire d’entendre les parties ». Appliquant ces dispositions, la juridiction déclare que « il y a lieu de modifier l’arrêt du 19 juin 2025 comme précisé au dispositif de la présente décision ». Elle ajoute la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile, rectifie un montant de dommages-intérêts, et ordonne les mentions utiles.

I. — Le régime de l’article 462 et la qualification d’erreur matérielle

A. — Conditions et office du juge de la rectification

L’article 462 encadre une faculté de correction limitée aux scories de rédaction, de calcul ou d’omission purement matérielle, sans réouverture du débat. Le juge se trouve saisi par requête et peut statuer hors audience, ce que rappelle le texte: « Le juge est saisi par simple requête de l’une des parties, ou par requête commune; il peut aussi se saisir d’office ». La démarche demeure écrite, brève, et strictement liée à ce que « le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande », critère téléologique central.

La décision rectificative s’inscrit dans la continuité formelle du jugement initial et n’en constitue pas une réformation. Le code précise la traçabilité de la correction: « La décision rectificative est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement ». Cette mention assure la publicité interne de la modification et garantit l’intelligibilité des titres, notamment pour l’exécution forcée et la liquidation des frais.

B. — Limites de la rectification et distinction avec l’omission de statuer

Le pouvoir ainsi défini ne doit jamais altérer les droits substantiels reconnus par la décision, ni substituer un chef de dispositif inédit à une prétention non tranchée. La rectification répare l’expression défaillante d’une solution acquise; elle ne tranche pas à nouveau. La frontière avec l’omission de statuer se conçoit ainsi: l’omission porte sur une prétention demeurée sans réponse, la rectification vise l’erreur de plume, de transcription ou de calcul.

Cette distinction protège l’autorité de la chose jugée et la sécurité du procès. Dès lors, l’ajout ou la correction ne sont admissibles qu’autant qu’ils découlent nécessairement du sens de l’arrêt, de ses motifs décisifs, ou d’une évidence matérielle. Le critère déterminant réside dans l’absence d’appréciation nouvelle, la cour demeurant en stricte fidélité à la volonté juridictionnelle déjà exprimée.

II. — L’application opérée par la cour d’appel de Versailles et sa portée pratique

A. — L’ajout d’une condamnation accessoire et la rectification du quantum

La juridiction rectifie deux éléments accessoires: l’absence de condamnation au titre de l’article 700 en faveur du syndicat, et le montant de dommages-intérêts alloué, porté de 100 à 300 euros. Ces corrections n’emportent pas réexamen du litige, car elles concernent l’accessoire des dépens et un quantum manifestement erroné, révélés par le dossier.

L’articulation retenue confirme le caractère matériel de l’oubli et de l’erreur de chiffre, la première correction concernant un chef accessoire usuel, la seconde relevant d’une discordance numérique. La cour ménage l’équilibre du dispositif initial en n’y ajoutant aucune condamnation principale nouvelle, mais en restituant sa cohérence textuelle et financière.

B. — Traçabilité, exécution et garanties procédurales

La cour ordonne la publicité interne de la correction, conformément au texte: « Dit que mention du présent arrêt sera portée sur la minute de l’arrêt […] et sur les expéditions qui en seront délivrées ». Cette exigence assure la concordance des expéditions et évite les contrariétés d’exécution entre titres divergents. Elle participe d’une sécurité documentaire utile aux parties et aux tiers saisis.

La solution s’achève par un volet financier mesuré, l’instance de rectification n’occasionnant pas de charge nouvelle, hormis l’adjonction accessoire. La formule « Dit que les dépens resteront à la charge du Trésor public » illustre la neutralité budgétaire d’un recours technique voué à maintenir la lisibilité du jugement. L’ensemble confirme une application fidèle de l’article 462, cantonnée à la réparation d’imperfections formelles, sans atteinte au fond.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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