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La Cour d’appel de Versailles, 24 juillet 2025, statue sur une contestation prud’homale consécutive à la fermeture d’un site de production, à la suite d’une réorganisation d’un groupe industriel. Un salarié, engagé depuis 1999 et affecté comme conducteur de ligne, a été licencié pour motif économique, après information sur la fermeture et acceptation d’un congé de reclassement. Devant les juges, il a recherché la responsabilité d’une société sœur au titre du co-emploi, puis a contesté la cause du licenciement, tout en sollicitant des dommages-intérêts liés à l’accord majoritaire relatif aux offres valables d’emploi. En première instance, le co-emploi a été retenu et des condamnations prononcées. En appel, les sociétés ont sollicité l’infirmation, et le salarié la confirmation, voire l’aggravation, de certaines condamnations.
L’arrêt tranche trois questions successives, articulées. La cour écarte d’abord le co-emploi invoqué contre la société sœur, après examen du lien de subordination et de l’immixtion dans la gestion. Elle apprécie ensuite la cause économique du licenciement, en déterminant le secteur pertinent et la charge probatoire pesant sur l’employeur. Elle statue enfin sur l’exécution de l’accord majoritaire, retient l’absence de préjudice démontré, et alloue une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
I. Le co-emploi écarté: critères et application
A. L’absence de lien de subordination caractérisé
La cour rappelle la définition fonctionnelle de la relation de travail et la méthode d’appréciation, centrée sur les conditions effectives d’exercice. Elle cite avec netteté que « le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements ». Le salarié devait établir un faisceau d’indices individuels, révélant ordres, contrôle et sanction émanant de la société sœur, ce qui suppose des éléments précis et concordants.
Or les pièces versées montrent des interventions ponctuelles d’acteurs du groupe, sans démonstration d’un pouvoir disciplinaire exercé sur l’intéressé. La cour souligne que les instructions identifiées visaient principalement des aspects de production, d’organisation logistique ou de coordination, et non l’exercice quotidien d’un pouvoir hiérarchique direct sur le salarié. Dans cette configuration, l’enchaînement des indices ne suffit pas, car ils ne traduisent ni contrôle individuel, ni pouvoir de sanction externalisé.
B. Une immixtion permanente non démontrée
Au-delà de la subordination, la qualification prétorienne du co-emploi requiert une ingérence excédant la coordination normale au sein d’un groupe. L’arrêt énonce avec précision: « Hors l’existence d’un tel lien de subordination, une société ne peut être qualifiée de co-employeur […] qu’il existe […] une immixtion permanente […] conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière. » Le contrôle s’effectue sur la durée, l’intensité des décisions captées et la dépossession des prérogatives essentielles de l’employeur légal.
La cour constate l’absence de communauté de dirigeants ou de sites, l’autonomie opérationnelle conservée par la société employeur, et l’existence de prestations de services internes justifiant certaines interactions support. Elle retient que les décisions majeures en matière sociale et économique n’étaient pas systématiquement dictées hors des organes propres. Elle conclut en des termes clairs: « Il ne résulte donc pas de tout ce qui précède l’existence d’une ingérence continuelle et anormale […] au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques ». Le co-emploi est écarté, et les demandes corrélatives contre la société sœur sont rejetées.
II. Le licenciement économique privé de cause
A. Périmètre pertinent et exigence probatoire
La cour replace l’analyse dans le cadre légal. Elle rappelle que « le secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ». Elle souligne encore deux principes directeurs: « Il incombe à l’employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué » et « Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, le juge doit se placer à la date du licenciement ».
Le périmètre adéquat est apprécié au regard des réorganisations du groupe et de la faible autonomie des segments résiduels. La cour retient un secteur englobant, indifférencié, couvrant boulangerie, viennoiserie, pâtisserie et traiteur, en raison de la centralisation des choix logistiques et commerciaux. Elle précise, en termes généraux et fermes, que « En toute hypothèse […] la cause économique d’un licenciement ne peut s’apprécier à un niveau inférieur à celui de l’entreprise ». Le débat sur un sous-segment pizza ou pâtisserie est donc tranché par une approche globale et cohérente avec les critères textuels.
B. Insuffisance des éléments et conséquences
L’employeur produisait des liasses et constats de performances dégradées. Toutefois, la preuve de difficultés significatives ou d’une menace sérieuse pesant sur la compétitivité du secteur ainsi circonscrit n’est pas suffisamment objectivée. La cour relève l’absence d’indicateurs concordants, durables et fiables, articulant parts de marché, chiffre d’affaires et rentabilité, à l’échelle du périmètre pertinent et sur la période utile. Les pertes propres à une unité ou à un client majeur ne se transposent pas automatiquement au secteur agrégé, faute de démonstration rigoureuse.
Au terme de ce contrôle, la juridiction retient sans détour: « Au vu de ce qui précède, il convient de dire que le licenciement […] est sans cause réelle et sérieuse. » L’indemnité est fixée dans les bornes de l’article L. 1235-3, à hauteur de 18 000 euros, compte tenu de l’ancienneté et des éléments connus. La demande d’indemnité de préavis est écartée, le salarié ayant perçu la rémunération afférente durant le congé de reclassement. S’agissant de l’accord majoritaire, la cour constate le respect du dispositif de reclassement au regard du projet personnel effectivement mené, et souligne que « En toute hypothèse, le salarié ne justifie d’aucun préjudice caractérisé par une perte de chance », ce qui commande l’infirmation de la condamnation prononcée à ce titre.
Ainsi se dessine une grille de lecture stable. Le co-emploi demeure d’interprétation stricte et requiert une dépossession avérée de l’employeur légal. Le licenciement économique appelle une preuve structurée et homogène, dans un périmètre pertinent, établissant l’ampleur, la durée et la portée des difficultés ou de la menace alléguée. Ici, la coordination intragroupe ne bascule pas en immixtion, et la preuve économique ne franchit pas le seuil probatoire exigé, ce qui emporte la censure du motif et l’allocation d’une réparation calibrée.