Cour d’appel de Versailles, le 4 septembre 2025, n°25/02578

Cour d’appel de Versailles, 4 septembre 2025, chambre sociale 4-2. L’arrêt commente une requête en rectification d’erreur matérielle formée contre une ordonnance d’incident du 3 juillet 2025, rendue dans le cadre d’un appel d’une procédure prud’homale. L’origine du litige tient à un licenciement contesté, une décision de référé de première instance défavorable à la salariée, puis un incident d’appel rejetant la caducité. La difficulté provient d’une discordance entre motifs et dispositif quant au montant alloué sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, fixé à 1 000 euros dans les motifs et à 1 500 euros dans le dispositif. La requête sollicitait la rectification en faveur du premier montant, tandis que l’intimée n’a pas fait d’observations. La juridiction rappelle le cadre textuel, citant que: « Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparés par la juridiction qui l’a rendu… » Elle précise encore: « La cour a statué sans audience. » Elle retient enfin qu’ »Il convient de faire droit à la requête et de rectifier les motifs… » et « Dit que la rectification prendra effet à compter du 3 juillet 2025. » La question posée est celle de l’étendue et des modalités de la rectification matérielle de l’article 462, notamment lorsqu’une contradiction oppose motifs et dispositif.

I. La rectification matérielle au sens de l’article 462 du code de procédure civile

A. La qualification de l’erreur et l’objet exact de la correction
La contradiction entre motifs et dispositif sur un quantum alloué au titre de l’article 700 relève d’une erreur purement matérielle, dépourvue d’incidence sur l’appréciation du fond. La décision vise expressément le fondement légal et rappelle que « Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement (…) peuvent toujours être réparés par la juridiction qui l’a rendu ». La rectification ne tend pas à substituer une nouvelle appréciation à la décision, mais à rétablir l’intelligibilité et l’unité de l’arrêt. En ce sens, la juridiction « Ordonne la rectification suivante: », non pour redéfinir les droits substantiels, mais pour éliminer une contradiction rédactionnelle entre deux énonciations de la même condamnation accessoire.

B. Le cadre procédural et les garanties suffisantes de régularité
L’article 462 autorise une saisine par requête et, le cas échéant, une décision sans audience. La cour le relève sobrement: « La cour a statué sans audience. » L’adversaire n’a présenté aucune observation; le greffe avait pourtant sollicité les parties. S’agissant d’une rectification matérielle, cette économie procédurale est conforme au texte, dès lors que les droits de la défense ne sont pas affectés et que l’objet de la rectification demeure strictement technique. L’effet temporel de la correction est précisé: « Dit que la rectification prendra effet à compter du 3 juillet 2025. » Cette rétroactivité s’explique, la rectification étant réputée inhérente à la décision initiale dont elle restaure la cohérence formelle.

II. Le choix d’harmoniser les motifs avec le dispositif et sa portée

A. La prééminence fonctionnelle du dispositif et la cohérence de la solution
La solution retient la primauté opérationnelle du dispositif, auquel s’attache l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire, sur des motifs qui expliquent sans obliger. La cour « rectifie les motifs » pour les aligner sur le dispositif, qui mentionnait 1 500 euros. Ce choix écarte la demande tendant à abaisser le dispositif au quantum mentionné par erreur dans les motifs, ce qui aurait affecté l’office de la rectification. L’approche respecte la logique de l’article 462, en ce qu’elle privilégie l’unification autour de la partie normative de la décision, sans réévaluer le fond ni modifier l’économie du prononcé.

B. Les limites de l’office rectificatif et les conséquences pratiques
La rectification matérielle demeure cantonnée à l’élimination d’une discordance formelle. Elle n’autorise ni reformatage des prétentions, ni révision du fond, ni redistribution des charges au-delà de l’ajustement strictement nécessaire. La mention selon laquelle la décision rectificative est rendue « en dernier ressort » s’inscrit dans le régime de clôture propre à ce type d’incident, sans préjudice du contrôle de cassation, ouvert en cas d’atteinte au périmètre de l’article 462. Les enseignements pratiques sont clairs: l’erreur de plume ou de report entre motifs et dispositif appelle une correction ciblée, hiérarchiquement ordonnée par la fonction du dispositif, en assurant une continuité temporelle affirmée par la formule « Dit que la rectification prendra effet à compter du 3 juillet 2025. »

Ainsi, la décision rappelle utilement la finalité conservatoire de l’article 462. Elle souligne la technique adéquate: harmoniser les motifs sur le dispositif afin de préserver l’autorité et la lisibilité de la décision, dans un cadre procédural allégé mais maîtrisé. Elle fixe enfin un point d’incidence temporelle explicite, garantissant la sécurité juridique de l’exécution et la clarté du titre.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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