Cour de justice de l’Union européenne, le 10 décembre 2020, n°C-735/19

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision le 6 octobre 2025 relative à l’interprétation de la directive 2004/25 sur les offres publiques d’acquisition. Ce litige naît de l’acquisition par un offrant de la quasi-totalité des actions d’une société cible soumise à une obligation de rachat obligatoire. L’autorité de contrôle nationale a rejeté, le 6 octobre 2015, le prix de rachat proposé pour fixer un montant supérieur basé sur les actifs nets consolidés. La Cour administrative régionale a déclaré cette décision illégale le 10 mars 2017 mais a limité la réparation à la moitié du dommage matériel subi. Saisie d’un pourvoi en cassation, la juridiction suprême nationale a sollicité une interprétation préjudicielle concernant la conformité de ces méthodes avec le droit européen. Les interrogations portent sur les critères de fixation du prix équitable, les droits de l’offrant et l’étendue de la responsabilité de l’État membre. La Cour précise les conditions de validité des méthodes nationales et censure finalement toute limitation arbitraire de l’indemnisation due par la puissance publique. La réflexion sur cet arrêt impose d’examiner la validité des méthodes nationales de fixation du prix équitable (I) puis d’étudier le régime de la responsabilité étatique (II).

I. Le cadre de fixation du prix équitable lors des offres publiques d’acquisition

A. La pluralité des méthodes de calcul sous condition de transparence La directive 2004/25 définit le prix équitable comme le montant le plus élevé payé par l’offrant sur une période de six à douze mois. « L’article 5, paragraphe 4, de la directive 2004/25 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui prévoit trois méthodes ». Cette faculté demeure toutefois subordonnée au respect des principes généraux de clarté et de sécurité juridique pour l’ensemble des opérateurs économiques concernés. L’autorité de contrôle doit agir dans un cadre légal précis afin de garantir que les détenteurs de titres soient protégés efficacement contre l’arbitraire. La clarté des méthodes de calcul ne suffit toutefois pas sans une définition précise des actifs composant la valeur réelle de la société cible.

B. La précision nécessaire des critères d’évaluation de la valeur réelle L’inclusion des participations minoritaires des filiales dans les actifs nets de la société cible soulève des interrogations sur la réalité économique du prix. La Cour souligne que la marge d’appréciation des États membres est limitée par la finalité de l’article 5 paragraphe 4 visant le prix équitable. « La valeur de l’action est obtenue en divisant les actifs nets de la société cible, y compris la participation d’un actionnaire minoritaire ». Une telle méthode doit impérativement reposer sur un critère objectif d’évaluation généralement utilisé en analyse financière pour être considérée comme valide. Les juges nationaux doivent donc vérifier si le droit interne permet une interprétation suffisamment prévisible de ces critères financiers complexes. La conformité des méthodes d’évaluation au droit de l’Union conditionne directement la mise en œuvre de la responsabilité de la puissance publique.

II. Le régime de la responsabilité de l’État pour violation caractérisée

A. L’octroi de droits subjectifs au profit de la personne offrant l’achat La responsabilité de l’État pour violation du droit de l’Union suppose que la règle méconnue ait pour objet de conférer des droits aux particuliers. La Cour affirme que la directive « confère, dans le cadre de la procédure d’offre publique d’acquisition, des droits à l’offrant ». Ces droits visent à déterminer le prix maximal que l’acquéreur doit verser pour respecter les exigences de l’offre obligatoire de rachat. L’offrant peut dès lors invoquer ces dispositions pour engager la responsabilité de la puissance publique en cas d’application erronée des méthodes de calcul. La reconnaissance de droits au profit de l’offrant implique nécessairement une réparation intégrale des dommages causés par l’autorité administrative nationale.

B. La condamnation du plafonnement arbitraire de la réparation du dommage Le principe d’effectivité exige que la réparation du préjudice causé par une violation du droit de l’Union soit adéquate à la perte subie. La législation nationale limitant l’indemnisation à 50 % du montant du préjudice matériel pour les sommes importantes contrevient directement à cet impératif européen. « Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que la réparation du préjudice matériel peut être limitée ». Une telle restriction rendrait en pratique excessivement difficile l’obtention d’une protection juridictionnelle effective pour les victimes de décisions administratives illégales. Le juge européen réaffirme ici la primauté du droit à une réparation intégrale sur les dispositions budgétaires restrictives des États membres.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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