Par un arrêt rendu le 11 décembre 2014, la Cour de justice de l’Union européenne précise les garanties entourant l’éloignement des étrangers. Un ressortissant de nationalité algérienne a séjourné régulièrement sur le territoire national avant l’expiration de son titre de séjour étudiant. Interpellé lors de démarches administratives, l’intéressé a fait l’objet d’une audition par les services de police durant une trentaine de minutes. L’autorité préfectorale a pris une décision de retour assortie d’un délai de départ volontaire de trente jours vers le pays d’origine. Le tribunal administratif de Pau a sursis à statuer pour interroger la juridiction européenne sur l’étendue du droit à être entendu. La Cour devait déterminer si ce droit implique une communication préalable du dossier et l’assistance gratuite d’un conseil juridique. Elle juge que l’étranger doit pouvoir présenter ses observations sans pour autant bénéficier d’un formalisme administratif excessif durant cette phase.
I. L’étendue du droit à être entendu dans la procédure de retour
A. Le fondement du droit dans les principes généraux de l’Union
Le respect des droits de la défense constitue un principe fondamental du droit de l’Union dont le droit d’être entendu fait partie. Ce droit garantit à toute personne la possibilité de faire connaître son point de vue avant l’adoption d’une décision individuelle défavorable. La Cour souligne que ce principe s’impose même lorsque la réglementation applicable ne prévoit pas expressément une telle formalité par un texte. Cette protection assure que l’autorité compétente soit « mise à même de tenir utilement compte de l’ensemble des éléments pertinents » du dossier. L’administration doit ainsi examiner avec soin et impartialité les observations soumises par l’intéressé avant de décider de son éventuel éloignement.
B. L’objet des observations portant sur la situation personnelle
L’audition doit permettre à l’intéressé d’exprimer son point de vue sur la légalité de son séjour et les exceptions au retour. L’autorité doit tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, de la vie familiale et de l’état de santé du ressortissant étranger. La Cour affirme que le droit d’être entendu comprend le droit d’exprimer ses observations sur les « modalités de son retour ». L’intéressé doit ainsi pouvoir discuter du délai de départ volontaire ou du caractère contraignant de la mesure d’éloignement envisagée par l’État. Cette exigence impose une coopération active de l’étranger pour fournir les informations nécessaires à l’examen approfondi de sa situation personnelle réelle.
II. Les limites procédurales inhérentes à l’efficacité de l’éloignement
A. L’absence d’obligation de communication préalable du dossier
L’administration n’est pas tenue de prévenir le ressortissant de son intention d’adopter une décision de retour avant l’organisation de son audition. Elle n’a pas non plus l’obligation de lui communiquer les éléments de fait sur lesquels elle entend fonder sa décision finale. La directive relative au retour ne prévoit pas de telles modalités procédurales contradictoires systématiques entre l’administration nationale et l’étranger concerné. L’intéressé ne dispose pas d’un droit automatique à un temps de réflexion suffisant avant de présenter ses observations orales durant son entretien. Ces restrictions répondent à l’objectif d’intérêt général visant le retour efficace des personnes en séjour irrégulier vers leur pays d’origine respectif.
B. Le régime de l’assistance juridique durant la phase administrative
Le ressortissant étranger peut recourir à un conseil juridique lors de son audition, à condition que cela ne retarde pas la procédure. Cependant, l’exercice de ce droit ne doit pas compromettre la mise en œuvre efficace de la politique migratoire commune de l’Union. La Cour précise que les États membres ne sont pas obligés de prendre en charge cette assistance au titre de l’aide juridique. Le droit à une assistance gratuite ne naît qu’après l’adoption de la décision de retour, lors de l’introduction d’un recours juridictionnel. Cette distinction préserve l’équilibre entre la protection des droits individuels et les impératifs de célérité nécessaires à l’action de l’administration.