Cour de justice de l’Union européenne, le 11 décembre 2014, n°C-31/14

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 11 décembre 2014 dans l’affaire C-31/14 P, un arrêt fondamental concernant la protection des marques dans le secteur pharmaceutique. Le litige est né de l’opposition formée par une société titulaire d’une marque antérieure contre l’enregistrement d’un nouveau signe verbal désignant des produits médicaux. L’administration compétente avait initialement rejeté cette opposition, mais sa décision fut annulée par le Tribunal de l’Union européenne le 18 novembre 2013 dans l’affaire T-536/10. Un pourvoi fut alors formé devant la Cour de justice pour contester l’interprétation faite par les premiers juges concernant la similitude des produits. La question posée portait sur l’importance de la destination thérapeutique d’un médicament dans l’examen global du risque de confusion entre deux signes. La Cour a confirmé que cette finalité constitue un critère de comparaison déterminant et a décidé que « le pourvoi est rejeté ». Cette solution conduit à examiner la prééminence de la destination thérapeutique dans l’appréciation de la similitude avant d’aborder la méthodologie d’évaluation globale.

I. La prééminence de la destination thérapeutique dans l’appréciation de la similitude La Cour souligne que la comparaison entre deux produits pharmaceutiques ne peut faire l’économie d’une analyse précise de leur destination thérapeutique respective.

A. La reconnaissance d’un critère de distinction objectif La Cour valide le raisonnement selon lequel deux médicaments ne sont pas nécessairement similaires du seul fait qu’ils appartiennent à la même catégorie générale. Elle affirme explicitement que « la destination thérapeutique d’un produit pharmaceutique est un critère essentiel aux fins de la comparaison des produits » pour le public concerné. Cette exigence de précision oblige l’autorité administrative à examiner si les produits visent à traiter des pathologies identiques ou des symptômes médicaux proches. Les juges privilégient ainsi une analyse concrète des caractéristiques fonctionnelles au détriment d’une vision purement formelle des classifications administratives habituellement utilisées par les déposants.

B. L’impact de la spécialisation médicale sur la perception du consommateur La décision souligne que le consommateur, qu’il soit un professionnel de santé ou un patient, accorde une attention particulière à la fonction d’un remède. Les magistrats estiment que la différence de destination thérapeutique peut suffire à écarter le risque de confusion, même en présence d’une similitude visuelle entre les signes. En l’espèce, la Cour considère que le Tribunal a correctement identifié l’absence de chevauchement entre les indications thérapeutiques des médicaments se trouvant en conflit. Cette approche renforce la sécurité des patients en évitant que des marques ne soient indûment protégées au-delà de leur domaine d’application thérapeutique réellement exploité.

II. La consolidation d’une méthodologie d’analyse globale et rigoureuse Le rejet du pourvoi consacre la validité de l’examen d’ensemble pratiqué par les juges du fond tout en précisant les limites du contrôle exercé en cassation.

A. La validation du contrôle exercé par les juges du fond La juridiction supérieure refuse de remettre en cause l’appréciation factuelle portée par le Tribunal sur la nature des produits et leur usage clinique concret. Elle rappelle que le contrôle en cassation se limite aux questions de droit, ce qui interdit toute réévaluation souveraine des éléments de preuve régulièrement produits. Les juges précisent que l’administration doit motiver ses décisions en tenant compte de tous les facteurs pertinents, y compris ceux relatifs à la destination des marchandises. Cette solution garantit une certaine cohérence jurisprudentielle en imposant une grille d’analyse stable et prévisible pour l’ensemble des acteurs du marché économique européen.

B. La portée de la décision sur le droit des marques pharmaceutiques Cette jurisprudence limite les velléités d’extension excessive de la protection des marques en exigeant une démonstration concrète de la proximité fonctionnelle des produits visés. Elle évite de la sorte une monopolisation injustifiée de termes proches pour des médicaments destinés à des pathologies totalement étrangères les unes aux autres. L’arrêt invite les déposants à une plus grande rigueur dans la rédaction des listes de produits lors des demandes d’enregistrement de leurs signes distinctifs. Enfin, en condamnant l’organisme de régulation aux dépens tandis que l’intervenante supporte ses propres frais, la Cour souligne la nécessité d’un respect des critères établis.

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Hassan KOHEN
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