Cour de justice de l’Union européenne, le 12 septembre 2019, n°C-199/18

Par un arrêt rendu le 22 mai 2019, la Cour de justice de l’Union européenne précise l’étendue des obligations pesant sur les États membres concernant le financement des contrôles sanitaires officiels. Plusieurs entreprises agricoles pratiquant l’élevage, l’abattage et la commercialisation de volailles contestent leur assujettissement aux redevances prévues par la réglementation italienne. Le litige porte sur la validité d’une décision soumettant ces entrepreneurs au paiement des taxes afférentes aux activités d’abattage et de découpe. Saisi d’un recours en réformation contre un jugement du tribunal administratif régional de l’Émilie-Romagne, le Conseil d’État italien interroge la Cour sur l’interprétation du règlement n° 882/2004. La juridiction de renvoi cherche à savoir si l’obligation de perception s’applique aux activités exercées à titre accessoire et si des exemptions sont possibles. La Cour affirme que les États membres doivent imposer ces redevances aux exploitants concernés sans pouvoir déroger discrétionnairement aux taux minimaux fixés. L’analyse de cette décision suppose d’étudier l’assujettissement impératif aux redevances sanitaires avant d’examiner l’encadrement rigoureux de la fixation de leur montant.

I. L’assujettissement impératif aux redevances sanitaires nonobstant le caractère accessoire de l’activité

A. La qualification d’exploitant comme fondement de l’obligation de paiement

La Cour fonde son raisonnement sur la définition de l’exploitant du secteur alimentaire issue de la législation européenne relative à la sécurité des denrées. Il appartient aux juridictions nationales de vérifier si l’entrepreneur est assujetti aux prescriptions législatives afin de déterminer son assujettissement effectif aux contrôles officiels. La jurisprudence souligne que « toute personne physique ou morale qui, dans le cadre de son activité, est astreinte au respect de cette législation alimentaire doit être qualifiée d’exploitant ».

Cette approche fonctionnelle permet d’assurer une application uniforme des règles de financement des contrôles sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne. Le juge communautaire rappelle que les États membres sont tenus de percevoir une redevance pour couvrir les coûts occasionnés par les activités visées aux annexes. La qualité d’exploitant déclenche automatiquement l’obligation financière dès lors que les services vétérinaires interviennent pour vérifier la conformité des processus de production.

B. L’absence d’incidence du caractère accessoire des prestations de transformation

L’argument tiré de la nature secondaire des activités d’abattage par rapport à l’activité principale d’élevage est rejeté par les juges de Luxembourg. La Cour de justice affirme explicitement que « la circonstance que l’activité d’abattage et la découpe de viande est exercée de manière accessoire est une circonstance indifférente ». Le droit de l’Union impose des contrôles à tous les stades de la production afin de garantir un niveau élevé de protection de la santé.

Le financement de ces vérifications ne saurait dépendre de l’organisation interne de l’entreprise ou de la hiérarchie entre ses différentes activités économiques. Les exploitants du secteur de l’alimentation animale doivent supporter les coûts des inspections dès lors qu’ils réalisent des opérations de transformation de produits carnés. L’identification du redevable étant établie par la nature de l’activité exercée, il convient alors de s’intéresser aux limites imposées pour le calcul des sommes dues.

II. L’encadrement rigoureux de la fixation du montant des redevances

A. L’intangibilité des taux minimaux fixés par la réglementation de l’Union

Le règlement n° 882/2004 définit des principes communs pour la fixation du niveau des redevances d’inspection afin d’éviter toute distorsion de concurrence. La Cour précise que « ces taux minimaux constituent des taux plancher auxquels les États membres ne peuvent, en principe, pas déroger ». Cette règle assure que les autorités compétentes disposent de ressources financières adéquates pour accomplir leurs missions de contrôle sanitaire de manière efficace.

La perception de montants inférieurs aux minima prévus par les annexes du règlement pourrait compromettre la qualité des vérifications et la sécurité de la chaîne alimentaire. Les États membres conservent une marge d’appréciation pour fixer des montants supérieurs, mais ils doivent respecter scrupuleusement le seuil minimal imposé par le législateur européen. La protection de la santé humaine justifie cette rigueur tarifaire qui s’impose à toutes les administrations nationales chargées de la sécurité sanitaire.

B. L’exclusion de toute dérogation générale et discrétionnaire par les États

Le juge européen limite strictement les possibilités pour un État d’exclure certaines catégories d’entreprises du paiement des taxes sanitaires prévues par les textes. La décision énonce que le règlement « ne laisse aucune marge d’appréciation aux États membres leur permettant de déroger, de manière générale et discrétionnaire, aux taux minimaux ». Seules des situations particulières et limitativement énumérées pourraient éventuellement justifier une réduction des tarifs sous des conditions procédurales très strictes.

Une réglementation nationale prévoyant une exemption générale pour les entrepreneurs agricoles méconnaîtrait les objectifs de financement des contrôles officiels fixés au niveau communautaire. L’obligation de couverture des coûts supportés par les autorités publiques interdit toute mesure de faveur qui ne reposerait pas sur des critères de risque objectifs. La Cour de justice confirme ainsi la primauté des règles harmonisées sur les choix politiques ou économiques internes des États membres.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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