Cour de justice de l’Union européenne, le 13 juillet 2023, n°C-757/21

Par un arrêt rendu le 15 juin 2023, la Cour de justice de l’Union européenne tranche un litige relatif aux sanctions en droit de la concurrence. Le dossier concerne une entente secrète mise en œuvre sur le marché mondial des composants électroniques pendant une période s’étendant sur plusieurs décennies. L’institution administrative a sanctionné une entreprise pour sa participation à des réunions collusives visant à coordonner les prix et à échanger des données sensibles. Le Tribunal de l’Union européenne a été saisi d’un recours en annulation par la société contre la décision administrative rendue le 21 mars 2018. Par un arrêt du 29 septembre 2020, les juges de première instance ont rejeté la demande en confirmant l’intégralité de la responsabilité de la requérante. Un pourvoi a été formé devant la Cour de justice afin de contester la validité de cette décision et le mode de calcul des amendes. L’appelante soutient que les magistrats ont commis des erreurs de droit en validant une amende qu’elle estime être manifestement contraire au principe de proportionnalité. La question posée consiste à savoir si la participation intermittente à un réseau complexe permet de retenir la responsabilité totale pour une infraction unique. La Cour rejette le pourvoi et confirme que la sanction financière est justifiée par la gravité des faits et par la durée de l’entente. L’analyse de cette solution suppose d’étudier la validation de la qualification d’infraction unique (I) puis l’examen de la proportionnalité de la sanction financière (II).

I. La validation de la qualification d’infraction unique et continue

A. La reconnaissance d’un plan d’ensemble cohérent

La juridiction confirme que la participation à une série d’actes s’inscrivant dans un plan global caractérise une infraction unique et continue. Cette qualification juridique permet de sanctionner l’ensemble des comportements concertés poursuivant une finalité économique identique malgré la diversité des actions entreprises. La Cour précise que « la circonstance qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente n’est pas pertinente pour établir l’infraction ». L’unité de l’objectif poursuivi par les membres du cartel suffit donc à établir une responsabilité solidaire pour les conséquences de l’accord illicite global.

B. Les limites du contrôle juridictionnel sur les faits

Le juge du pourvoi refuse de procéder à un nouvel examen des constatations factuelles réalisées souverainement par les magistrats de la première instance. Il vérifie exclusivement que les éléments de preuve n’ont pas été dénaturés et que la motivation de la décision attaquée respecte les exigences légales. L’arrêt souligne que « l’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue pas une question de droit soumise au contrôle de la Cour ». Cette restriction procédurale garantit la sécurité juridique en limitant les débats devant la haute juridiction aux seules erreurs d’interprétation des normes de droit.

II. La confirmation de la proportionnalité de la sanction pécuniaire

A. La régularité de la détermination de l’assiette de l’amende

L’appelante contestait l’inclusion de certaines transactions réalisées hors du territoire européen dans l’assiette servant de base à la détermination de la sanction. Les juges valident pourtant la méthode consistant à prendre en compte la valeur totale des ventes des produits faisant l’objet de la concertation prohibée. Ils affirment que « la valeur des ventes constitue un indicateur approprié pour refléter l’importance économique de l’infraction commise par une entreprise donnée ». Cette approche assure que le montant de l’amende demeure en corrélation directe avec le profit potentiel tiré de la pratique anticoncurrentielle sur le marché.

B. La portée dissuasive du pouvoir de sanction administratif

La Cour rejette l’argumentation relative au caractère excessif de la peine au regard de la durée réelle de l’implication de la partie sanctionnée. Le maintien d’une amende élevée répond à un objectif de dissuasion nécessaire pour prévenir la réitération de comportements gravement préjudiciables à l’économie européenne. La décision conclut que « le pourvoi est rejeté » car aucun vice n’a été identifié dans le raisonnement suivi précédemment par les juges du fond. La pérennité de cette solution jurisprudentielle confirme la rigueur du système répressif européen face aux accords occultes nuisibles aux intérêts des consommateurs.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture