La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt du 13 mars 2014, précise l’articulation entre la publicité trompeuse et la publicité comparative. Le litige initial opposait une société à une autorité administrative nationale suite à une sanction pour des messages promotionnels relatifs à un réseau. Le professionnel concerné contestait cette décision devant un tribunal administratif régional qui rejeta sa demande en première instance. Un appel fut ensuite porté devant la juridiction administrative suprême afin de déterminer la portée exacte de l’harmonisation européenne. Le litige se concentre sur l’interprétation de la directive 2006/114/CE concernant le caractère cumulatif ou autonome des faits illicites. La juridiction de renvoi demande si la protection des professionnels impose la présence d’un message à la fois trompeur et comparatif. La Cour juge que ces deux catégories constituent des infractions autonomes ne nécessitant aucune caractérisation simultanée pour être sanctionnées. L’examen de l’autonomie conceptuelle des infractions (I) commande l’étude de la cohérence téléologique de cette solution (II).
I. L’autonomie conceptuelle des notions de publicité trompeuse et comparative
A. La distinction structurelle des définitions légales
La Cour s’appuie sur une analyse littérale et systématique de la directive pour établir une séparation nette entre les notions juridiques. Elle relève que « les notions de ‘publicité trompeuse’ et de ‘publicité comparative’ font l’objet de deux définitions distinctes ». Cette dissociation terminologique implique que chaque catégorie obéit à ses propres critères de caractérisation sans dépendre de l’autre. Le caractère trompeur s’apprécie selon la capacité du message à induire en erreur et à affecter le comportement économique. À l’inverse, le caractère comparatif se définit par l’identification, explicite ou implicite, d’un concurrent ou de biens déterminés. Le juge refuse de fusionner ces deux régimes juridiques distincts en une seule infraction complexe. Cette distinction terminologique se double d’une indépendance procédurale quant aux mesures de sanction applicables par les autorités nationales.
B. La nature alternative des mesures de sanction
Le cadre procédural prévu par le législateur de l’Union confirme l’indépendance des fondements de poursuite ouverts aux autorités nationales. La directive impose aux États membres de garantir l’existence de moyens efficaces pour lutter contre ces pratiques déloyales. La Cour souligne que « l’utilisation […] de la conjonction ‘ou’ […] présuppose ainsi la possibilité d’adopter de telles mesures » contre l’une des publicités. Ce choix linguistique exclut toute exigence d’existence cumulative de ces deux circonstances pour qu’une infraction soit constituée. Les instances administratives ou judiciaires peuvent intervenir dès qu’une seule des deux définitions légales est satisfaite. Cette logique d’efficacité individuelle des normes communautaires assure une protection optimale du marché intérieur. L’indépendance structurelle des notions ainsi dégagée s’accorde avec la rationalité logique ayant présidé à l’adoption des normes européennes.
II. La rationalité logique et historique de l’interprétation prétorienne
A. La poursuite d’objectifs juridiques distincts
L’interprétation de la Cour est soutenue par les structures logiques différentes qui régissent les deux types de publicités réglementées. Le texte vise à protéger les professionnels contre la publicité trompeuse tout en établissant les conditions d’une publicité comparative licite. L’arrêt souligne que « la publicité trompeuse et la publicité comparative illicite constituent chacune une infraction autonome » en raison de leurs logiques propres. La première repose sur des critères objectifs d’erreur, tandis que la seconde énumère des conditions cumulatives de licéité. Une publicité comparative peut être parfaitement transparente mais rester illicite si elle ne respecte pas les exigences techniques comparatives. Cette séparation fonctionnelle permet une application souple et adaptée du droit de l’Union aux diverses situations commerciales. La poursuite de ces objectifs fonctionnels distincts s’inscrit dans une perspective historique visant à maintenir l’efficacité du champ protecteur.
B. La préservation du champ protecteur de la directive
L’analyse historique des textes successifs renforce l’idée d’un ajout progressif de protections sans modification des socles initiaux. La Cour rappelle que la réglementation de la publicité comparative fut introduite ultérieurement dans la directive initiale sur les messages trompeurs. La codification de 2006 n’a pas entendu fusionner ces régimes ni limiter la protection contre les manœuvres de tromperie. Le juge précise que « le législateur de l’Union n’a pas eu l’intention […] de modifier la réglementation relative à la publicité trompeuse ». Exiger un caractère comparatif pour sanctionner un mensonge commercial aurait considérablement réduit le niveau de protection des professionnels. Cette décision préserve l’intégrité des outils juridiques contre la concurrence déloyale au sein de l’espace européen.