La Cour de justice de l’Union européenne a rendu le 3 octobre 2013 une décision précisant les obligations des exploitants du secteur alimentaire lors de la distribution. Cette affaire concerne la présence de salmonelles dans des viandes de volaille fraîches prélevées dans une succursale de vente au détail. Un contrôle microbiologique a révélé une contamination rendant le produit dangereux pour la santé humaine et impropre à la consommation. L’autorité administrative a infligé une amende à la gérante de l’établissement pour violation des normes de sécurité sanitaire applicables. Celle-ci a contesté la sanction devant l’Unabhängiger Verwaltungssenat in Tirol en invoquant son absence d’intervention au stade de la production. La juridiction autrichienne a saisi la Cour de justice pour déterminer si les critères microbiologiques s’appliquent strictement à tous les stades de la distribution. Elle s’interroge également sur la possibilité de sanctionner un distributeur n’exerçant aucune activité de production ou de transformation. La Cour affirme que les denrées doivent respecter les seuils sanitaires jusqu’à la vente finale tout en encadrant le régime des sanctions nationales.
**I. L’application impérative des critères microbiologiques au stade de la distribution**
La Cour de justice examine d’abord si les normes sanitaires s’imposent aux viandes fraîches de volaille pendant toute la phase de commercialisation. Elle se fonde sur une interprétation littérale et téléologique des règlements européens relatifs à l’hygiène des denrées alimentaires.
**A. Une obligation de conformité étendue à la vente au détail**
Les juges soulignent que le critère microbiologique « s’applique aux produits mis sur le marché pendant leur durée de conservation ». Cette notion englobe la détention de denrées en vue de leur vente ou de toute forme de cession gratuite ou onéreuse. La Cour précise que les viandes de volaille doivent remplir les exigences fixées à l’annexe du règlement n o 2073/2005 à tous les stades de la distribution. Cette obligation pèse sur les opérateurs même s’ils interviennent exclusivement au niveau final de la chaîne commerciale. L’absence d’activité productive ne dispense donc pas l’exploitant de veiller au respect des seuils de contamination bactériologique.
**B. La protection de la santé humaine comme finalité du contrôle**
L’interprétation retenue garantit un niveau élevé de protection de la santé conformément aux objectifs fondamentaux de la législation alimentaire européenne. La Cour estime qu’une limitation de ces critères aux seuls producteurs mettrait gravement en péril la sécurité des consommateurs finaux. Elle considère que « des denrées alimentaires contenant des micro-organismes dans des quantités qui présentent un risque inacceptable pour la santé humaine » ne peuvent être commercialisées. Cette exigence de sécurité alimentaire justifie une surveillance rigoureuse des produits jusqu’à leur date limite de consommation. Le respect scrupuleux de ces normes à chaque étape constitue le fondement d’un système de prévention efficace contre les risques zoonotiques.
**II. Le régime de responsabilité des exploitants et le contrôle de proportionnalité**
Après avoir établi l’étendue des obligations sanitaires, la Cour se prononce sur la légalité des sanctions administratives prononcées par les autorités nationales. Elle reconnaît une autonomie aux États membres tout en rappelant les limites inhérentes au droit de l’Union.
**A. La reconnaissance de la responsabilité de l’exploitant distributeur**
L’article 17 du règlement n o 178/2002 impose aux exploitants de veiller au respect des prescriptions de la législation alimentaire dans les entreprises sous leur contrôle. La Cour juge que le droit de l’Union « ne s’oppose pas, en principe, à une réglementation nationale » sanctionnant un simple distributeur. Les États membres conservent la compétence pour fixer les règles relatives aux sanctions applicables en cas de violation des normes de sécurité. Cette responsabilité peut être engagée dès lors que le professionnel met sur le marché un produit non conforme aux critères microbiologiques. La juridiction européenne valide ainsi le principe d’une responsabilité pesant sur l’ensemble des acteurs de la chaîne de distribution alimentaire.
**B. L’exigence de proportionnalité des sanctions administratives**
Toute mesure répressive nationale doit toutefois respecter les conditions d’efficacité et de proportionnalité définies par le droit de l’Union européenne. Les sanctions ne doivent pas excéder « les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimement poursuivis ». La Cour rappelle que le juge national doit apprécier la gravité de l’infraction au regard des modalités de détermination de l’amende. Un système de responsabilité objective peut être admis s’il incite les professionnels à une vigilance accrue pour protéger l’intérêt général. Il appartient finalement aux juridictions internes de vérifier si les inconvénients causés par la sanction ne sont pas démesurés. Ce contrôle garantit un équilibre nécessaire entre l’impératif de santé publique et la liberté d’exercice de l’activité commerciale.