La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision le 14 mars 2019 relative aux clauses abusives saisie par la juridiction de Budapest. Un consommateur a souscrit un contrat de prêt en devises étrangères incluant des stipulations sur l’écart et le risque de change. Le demandeur a sollicité l’annulation de son engagement devant les juridictions nationales en raison du caractère prétendument abusif de ces clauses. Une législation nationale restreint toutefois le pouvoir du magistrat de prononcer la nullité intégrale de la convention de crédit litigieuse. Le juge national a décidé de suspendre la procédure pour interroger la juridiction européenne sur la validité de ces limitations légales.
La partie requérante soutient que la directive impose l’annulation du prêt dès lors qu’une clause essentielle au contrat est reconnue abusive. La question de droit porte sur la compatibilité des restrictions législatives nationales avec l’exigence d’effectivité de la protection des consommateurs. Ce litige interroge l’autonomie du juge saisi face à une loi nationale entravant le prononcé de la nullité d’un acte contractuel.
La Cour précise que le juge doit pouvoir annuler le contrat si celui-ci ne peut subsister après le retrait de la clause. L’analyse traitera d’abord du sort des clauses de change avant d’étudier l’encadrement des mécanismes d’uniformisation jurisprudentielle par le droit européen.
I. La dualité des conséquences attachées au caractère abusif des clauses de change
A. La validation conditionnelle des limites nationales à l’annulation
Le juge européen examine en premier lieu le régime applicable aux clauses relatives à l’écart de change insérées dans les contrats. La directive « ne s’oppose pas à une législation nationale empêchant le juge saisi de faire droit à une demande tendant à l’annulation d’un contrat ». Cette faculté reste subordonnée à la possibilité pour le magistrat de « rétablir la situation en droit et en fait » du consommateur. L’objectif est de maintenir la convention tout en supprimant l’avantage indu perçu par le professionnel lors des opérations de change. La solution varie cependant de manière significative selon que le litige concerne l’écart de change ou le risque de change.
B. L’annulation impérative face à l’impossibilité de survie du contrat
La Cour de justice adopte une position protectrice lorsque le caractère abusif porte sur la clause relative au risque de change. Elle affirme que le droit européen « s’oppose à une législation nationale empêchant (…) le juge saisi de faire droit à une demande » d’annulation. Cette sanction radicale intervient toutefois dès lors qu’il est constaté que le contrat de prêt « ne peut subsister sans ladite clause ». Le maintien d’un engagement dépourvu de son équilibre essentiel constituerait une entrave inacceptable aux droits garantis par l’Union européenne. L’efficacité de cette protection dépend également de la liberté dont dispose le juge national face aux décisions de sa hiérarchie.
II. L’encadrement des mécanismes nationaux d’uniformisation par l’exigence d’effectivité
A. La licéité subordonnée de l’harmonisation jurisprudentielle interne
La directive lue avec la Charte n’interdit pas l’adoption de décisions contraignantes par une juridiction suprême pour assurer l’unité du droit. Ces mesures ne doivent pas empêcher le juge « d’assurer le plein effet des normes prévues dans ladite directive » au bénéfice du consommateur. L’harmonisation de la jurisprudence nationale demeure légitime tant qu’elle ne restreint pas les voies de recours ouvertes à la partie faible. Chaque magistrat doit conserver son autonomie d’appréciation pour écarter toute règle interne contraire aux objectifs de la protection européenne.
B. La préservation du droit au recours et du dialogue préjudiciel
La protection effective des droits fondamentaux impose que les décisions supérieures ne puissent jamais entraver la saisine de la juridiction européenne. Les modalités nationales ne sauraient empêcher le juge de « saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle à ce titre » en cas de doute. Le magistrat de renvoi doit vérifier si les directives de sa hiérarchie limitent indûment son pouvoir d’assurer l’effectivité du droit. Le dialogue direct entre les juges reste le garant indispensable et précieux d’une application uniforme des normes de l’Union européenne.