La Cour de justice de l’Union européenne, par une décision du 24 octobre 2024, statue sur la surveillance des établissements de crédit. Une investisseuse contestait des actes plaçant une banque sous administration temporaire afin de remédier à une défaillance de sa gouvernance. L’autorité monétaire avait fondé son intervention sur des dispositions législatives nationales transposant le cadre juridique européen de redressement. Les faits résultent d’une crise financière interne ayant conduit au remplacement des organes de direction par des administrateurs provisoires. La requérante a introduit un recours devant le Tribunal de l’Union européenne pour obtenir l’annulation de ces mesures de surveillance. Par une décision du 12 octobre 2022, la juridiction de première instance avait déclaré l’action irrecevable pour défaut d’intérêt à agir. Un pourvoi a été formé devant la Cour de justice afin de contester cette interprétation restrictive du droit de recours. Le litige porte sur la capacité d’un actionnaire à critiquer une mesure affectant la gestion d’une société commerciale. Les juges doivent également se prononcer sur l’articulation entre les pouvoirs de l’institution et les exigences de la directive sectorielle. La Cour annule la décision initiale en reconnaissant la recevabilité du recours mais rejette le moyen relatif à l’erreur de base juridique. L’étude portera sur la reconnaissance de l’intérêt à agir des associés avant d’analyser la validité de la base légale de l’administration temporaire.
I. La recevabilité du recours en annulation contre les mesures de surveillance
La Cour de justice censure le raisonnement du Tribunal en affirmant que les actionnaires disposent d’un droit effectif à contester les mesures d’intervention.
A. L’existence d’un intérêt à agir pour l’actionnaire de l’établissement
La décision établit que le placement sous administration temporaire affecte la situation juridique des porteurs de parts sociales de manière directe. Cette mesure entraîne la suspension des pouvoirs des organes sociaux, privant ainsi les associés de leur droit de participer à la gestion. La Cour juge que la fin de la mesure au cours de l’instance ne fait pas disparaître l’intérêt à obtenir une annulation. Un tel intérêt demeure pour prévenir le renouvellement d’une illégalité ou pour fonder une action ultérieure en réparation du préjudice.
B. L’annulation du rejet prononcé initialement par le Tribunal
Le Tribunal avait erronément considéré que l’annulation des actes n’apporterait aucun bénéfice concret à la personne physique ayant introduit l’action. La juridiction suprême souligne au contraire que le respect du principe de légalité impose d’ouvrir largement les voies de recours contre les autorités. La protection juridictionnelle des investisseurs constitue un pilier essentiel du cadre unique de surveillance bancaire au sein de l’Union européenne. En conséquence, « le recours introduit par [la requérante] tendant à l’annulation de la décision [de l’institution] plaçant [l’établissement] sous administration temporaire est recevable ». Cette recevabilité permet désormais d’aborder le débat sur la validité intrinsèque de la mesure et de son fondement normatif.
II. L’examen de la légalité du placement sous administration temporaire
La Cour rejette la critique formulée contre la base juridique tout en renvoyant le surplus du litige pour un examen factuel approfondi.
A. La conformité de la base juridique nationale au droit dérivé
La requérante soutenait que l’autorité monétaire ne pouvait pas mobiliser des pouvoirs issus du droit interne non prévus par la directive européenne. Les juges considèrent pourtant que l’institution peut légalement s’appuyer sur des outils de surveillance supplémentaires prévus par la législation de l’État membre. « L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 octobre 2022 est annulé » car il avait éludé cette question de fond. La décision confirme que le droit de l’Union n’interdit pas un renforcement des pouvoirs d’intervention par les législateurs nationaux de transposition.
B. Le maintien de la validité partielle de la mesure d’intervention
Le rejet du quatrième moyen signifie que l’institution n’a pas commis d’erreur de droit en choisissant le fondement de son action. La base juridique retenue pour placer l’entité sous administration temporaire est jugée compatible avec les objectifs de stabilité du système financier. « Le quatrième moyen du recours en première instance, en ce qu’il est tiré d’une erreur de droit dans la détermination de la base juridique, est rejeté ». L’affaire doit toutefois être renvoyée devant le Tribunal afin que soient examinés les autres arguments relatifs aux erreurs manifestes d’appréciation. Cette solution assure un équilibre entre l’efficacité de la supervision bancaire et le contrôle rigoureux de la légalité des actes administratifs.