Cour de justice de l’Union européenne, le 15 juin 2023, n°C-499/21

Par un arrêt du 15 juin 2023, la Cour de justice de l’Union européenne définit les conséquences juridiques du retrait d’un État sur la citoyenneté. Cette affaire concerne la validité d’une décision approuvant la conclusion de l’accord de retrait entre l’Union et un ancien État membre. Plusieurs ressortissants de cet État, résidant sur le territoire de l’Union, contestaient la perte de leur statut de citoyen européen. Le litige débute par un recours en annulation devant le Tribunal de l’Union européenne contre la décision de l’institution du 30 janvier 2020. Par une ordonnance du 8 juin 2021, cette juridiction rejette la demande pour cause d’irrecevabilité faute de qualité pour agir des requérants. Les particuliers soutiennent dans leur pourvoi que la décision litigieuse les atteint individuellement en les privant de droits acquis et permanents. La question posée est de savoir si la perte de citoyenneté découle de l’acte d’approbation de l’accord ou de la décision souveraine de retrait. La Cour juge que la privation des droits résulte exclusivement de la volonté de l’État de quitter l’organisation commune. Cette solution conduit au rejet définitif du pourvoi en raison d’un défaut d’intérêt à agir soulevé d’office par les juges. L’analyse de la source de la perte des droits précède logiquement l’examen des conséquences procédurales sur la recevabilité de l’action.

**I. L’identification de la cause déterminante de la perte de citoyenneté**

**A. L’automaticité inhérente à la mise en œuvre du retrait souverain**

La Cour rappelle que la décision de retrait « relève de la seule volonté de l’État membre concerné » et de son choix souverain. Le Traité sur l’Union européenne dispose que tout État peut décider de se retirer conformément à ses propres règles constitutionnelles nationales. La possession de la nationalité d’un État membre constitue la « condition indispensable » pour conserver le statut de citoyen de l’Union européenne. La rupture du lien de nationalité entraîne donc mécaniquement la disparition des prérogatives attachées à la citoyenneté au sein de l’espace commun. Cette automaticité interdit de considérer la citoyenneté comme un droit acquis susceptible de survivre au retrait effectif de l’État d’origine.

**B. La neutralité juridique de l’acte d’approbation de l’accord**

L’arrêt énonce que la perte des droits « est une conséquence automatique de la seule décision prise souverainement » par l’État s’étant retiré. Ni l’accord de retrait ni l’acte d’approbation ne sauraient être qualifiés de cause génératrice de la situation juridique des requérants. L’institution européenne se borne à entériner les modalités de la séparation sans disposer du pouvoir de maintenir unilatéralement le statut de citoyen. Les arguments relatifs à la nature législative ou réglementaire de la décision litigieuse deviennent inopérants face à l’absence de lien de causalité. Le juge souligne ainsi l’inexistence d’un pouvoir de décision propre de l’Union sur le maintien des droits des anciens ressortissants. La détermination de la cause souveraine de la perte de citoyenneté vide de toute substance l’intérêt porté par les requérants à l’annulation de l’acte.

**II. L’irrecevabilité du recours fondée sur l’absence d’intérêt à agir**

**A. Le défaut d’utilité d’une éventuelle annulation juridictionnelle**

La juridiction souligne que « l’intérêt à agir constitue ainsi la condition essentielle et première de tout recours en justice » pour tout plaideur. Les requérants doivent démontrer qu’une annulation de l’acte attaqué serait susceptible de leur procurer un bénéfice personnel et direct dans l’immédiat. Une éventuelle censure de la décision d’approbation ne saurait « procurer un bénéfice » aux particuliers puisque leur citoyenneté resterait perdue malgré tout. Le défaut d’intérêt à agir fait obstacle à l’examen du fond dès lors que l’issue favorable du recours resterait sans effet concret. L’utilité du contrôle juridictionnel disparaît lorsque la lésion invoquée procède d’un acte souverain étranger à la volonté des institutions européennes.

**B. La rigueur maintenue des conditions de recevabilité des particuliers**

Le pourvoi est rejeté sans que la Cour n’examine l’affectation individuelle ou le caractère réglementaire de l’acte au sens des traités. Les juges estiment qu’une éventuelle erreur de droit du Tribunal resterait « sans incidence pour la solution du litige » et son dispositif. La décision confirme la difficulté pour les particuliers de contester des actes de portée générale liés à la conduite des relations internationales. L’interprétation rigoureuse des conditions de recevabilité protège la stabilité des accords conclus entre l’Union européenne et les États tiers concernés. Cette approche pragmatique limite l’accès au juge de l’Union aux seuls cas où une protection juridictionnelle effective est réellement possible.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture