La Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée, le 15 mai 2014, sur les obligations de publicité incombant aux émetteurs de titres. Le tribunal de commerce de Vienne a introduit une demande de décision préjudicielle dans le cadre d’un litige opposant un particulier à un établissement. Ce dernier a souscrit des titres financiers et souhaite désormais renoncer au contrat en invoquant l’irrégularité de la publication du prospectus de base. L’investisseur soutient que des informations capitales comme le code d’identification ou les performances du produit n’ont pas été correctement diffusées au public. La juridiction de renvoi s’interroge sur le moment et le support de publication des données omises lors de l’approbation initiale du document d’offre. Elle questionne également la validité des restrictions d’accès numérique imposées par le gestionnaire du site internet hébergeant les différents documents de ladite offre. La Cour affirme que toute information significative connue avant l’émission doit faire l’objet d’un supplément officiel dûment approuvé par l’autorité compétente. Elle précise enfin que l’accès aux documents doit être gratuit et exempt de barrières techniques pour garantir la protection réelle des épargnants. Cette étude portera sur l’encadrement du contenu informationnel de l’offre avant d’analyser les conditions d’accessibilité effective des documents d’émission au public.
I. L’encadrement du contenu informationnel de l’offre au public
A. Le régime de publicité des informations modificatives et significatives
La Cour précise le sort des informations connues entre l’approbation du prospectus de base et la clôture définitive de l’offre de vente. Selon l’arrêt, les éléments requis doivent figurer dans un supplément s’ils constituent « un fait nouveau significatif » de nature à influencer l’évaluation. Cette obligation de mise à jour garantit que l’investisseur dispose d’une vision fidèle des risques associés aux valeurs mobilières avant son engagement. Le juge européen refuse ainsi que l’émetteur puisse occulter des données déterminantes sous prétexte qu’elles seraient intervenues postérieurement à l’approbation initiale. La juridiction nationale doit apprécier si les omissions constatées étaient susceptibles d’affecter la décision d’un investisseur raisonnable de souscrire aux titres proposés. L’approbation préalable du supplément par les autorités compétentes demeure une condition impérative pour assurer la régularité de la procédure de diffusion d’information.
B. L’interdépendance du prospectus de base et des conditions définitives
Un prospectus de base ne peut être considéré comme régulier s’il omet des éléments essentiels sans publication concomitante des conditions définitives requises. L’émetteur doit veiller à ce que l’ensemble documentaire présente un niveau d’information « équivalent à celui d’un prospectus publié en une seule fois ». La Cour souligne que les informations non connues lors de l’approbation initiale doivent impérativement être communiquées aux investisseurs par un vecteur approprié. Si ces données ne constituent pas un changement significatif, elles trouvent naturellement leur place dans le document relatif aux seules conditions définitives. Le prospectus de base doit néanmoins indiquer clairement quelles catégories d’informations seront précisées ultérieurement afin de ne pas égarer le public. Cette structure modulaire offre une flexibilité technique aux émetteurs tout en maintenant une exigence de complétude indispensable à la sécurité juridique des transactions.
II. L’exigence d’une accessibilité effective des documents d’émission
A. Le rejet des barrières techniques et financières à la consultation numérique
L’exigence d’un prospectus « aisément accessible » sur internet s’oppose à toute procédure d’enregistrement préalable ou de communication obligatoire d’une adresse électronique. De telles conditions techniques limitent indûment l’accès à l’information et contreviennent frontalement à l’objectif de protection efficace des investisseurs au sein de l’Union. La Cour juge que l’acceptation d’une clause exonératoire de responsabilité crée une inégalité injustifiée entre l’établissement financier et l’investisseur potentiel. Le caractère payant de la consultation électronique est également proscrit car le droit européen impose la mise à disposition gratuite des documents d’offre. Limiter la consultation gratuite à un nombre restreint de documents par mois constitue une entrave supplémentaire incompatible avec la transparence des marchés. La dématérialisation doit favoriser la diffusion de l’information sans instaurer de nouveaux obstacles pour les épargnants souhaitant évaluer les risques encourus.
B. L’obligation de mise à disposition physique auprès des différents intervenants
La Cour impose que le prospectus de base soit disponible tant au siège de l’émetteur que dans les bureaux des intermédiaires financiers. Cette interprétation uniforme du droit de l’Union garantit un accès géographique étendu aux documents de l’offre sur l’ensemble du territoire des États. La divergence entre les versions linguistiques du texte est résolue au profit d’une lecture cumulative des obligations de mise à disposition matérielle. Les intermédiaires doivent disposer d’exemplaires physiques pour répondre aux demandes des investisseurs conformément aux exigences de la directive sur le prospectus obligatoire. Cette solution évite que le public soit privé d’information si l’émetteur et l’intermédiaire sont établis dans des États membres différents et éloignés. La protection de l’épargnant commande ainsi une présence physique constante du document d’offre sur tous les points de contact de la distribution.