Cour de justice de l’Union européenne, le 15 novembre 2011, n°C-539/09

Par un arrêt de grande chambre rendu le 15 novembre 2011, la Cour de justice de l’Union européenne définit les pouvoirs d’audit financier.

La Cour des comptes souhaitait vérifier, au sein d’un État membre, le fonctionnement de la coopération administrative relative à la taxe sur la valeur ajoutée. Les autorités nationales s’opposèrent systématiquement à cette mission de contrôle en invoquant l’absence de base juridique valable dans le droit dérivé de l’Union. La Commission européenne introduisit alors un recours en manquement afin de sanctionner cette entrave manifeste aux prérogatives de l’institution de contrôle externe.

Le litige repose sur l’interprétation de l’article 248 du traité instituant la Communauté européenne relatif à l’examen de la régularité des recettes communes. La juridiction luxembourgeoise devait déterminer si le contrôle des structures nationales de coopération administrative relève de la compétence de la Cour des comptes européenne. La Cour décide qu’un État membre manque à ses obligations en s’opposant à un tel audit sur son territoire souverain car celui-ci impacte les ressources.

I. La reconnaissance d’une compétence de contrôle étendue sur les ressources propres

A. L’affirmation d’un lien direct entre perception fiscale et budget communautaire

La Cour souligne qu’un « lien direct existe ainsi entre, d’une part, la perception des recettes de TVA et, d’autre part, la mise à disposition ». Cette constatation permet d’inclure la gestion de cette taxe dans le champ de surveillance de l’institution chargée de vérifier la totalité des recettes. Toute lacune dans la perception nationale se trouve potentiellement à l’origine d’une réduction des montants versés au profit du budget de l’Union.

Les juges rejettent la thèse d’une séparation étanche entre les recettes fiscales nationales et les ressources propres découlant de la taxe sur la valeur ajoutée. L’obligation de mettre à disposition du budget communautaire une part des montants perçus impose le respect rigoureux des règles du droit de l’Union.

B. L’interprétation fonctionnelle des attributions de la Cour des comptes

La mission de l’auditeur externe consiste à vérifier si les opérations financières sont exécutées de manière légale, régulière et selon une « bonne gestion financière ». Les compétences de contrôle doivent être interprétées de manière large afin d’assurer l’effet utile des dispositions conventionnelles relatives à la protection des finances. La Cour des comptes est ainsi fondée à examiner si le système de coopération prévu par le règlement fonctionne correctement et efficacement pour l’Union.

Cette institution agit dans les limites des attributions conférées par le traité pour éclairer l’autorité budgétaire appelée à donner décharge sur les comptes annuels. L’audit litigieux portant sur la coopération administrative avait bien trait aux recettes envisagées sous l’angle de leur légalité et de la gestion afférente.

II. La primauté de la surveillance centralisée pour la protection des intérêts financiers

A. Le rejet de l’exception de subsidiarité face à la dimension transfrontière

La République fédérale invoquait le principe de subsidiarité pour réserver la vérification des opérations de perception de la taxe aux seules instances de contrôle nationales. La Cour écarte ce moyen en mettant en exergue la dimension intrinsèquement transfrontière de la coopération administrative organisée au niveau de l’Union européenne. Un tel contrôle sera « nécessairement mieux réalisé de manière centralisée, au niveau de la Communauté, par la Cour des comptes » en raison de son champ d’action.

Le bon fonctionnement de cette entraide administrative conditionne l’aptitude de chaque administration nationale à lutter efficacement contre la fraude fiscale sur son propre territoire. L’intervention de l’organisme européen garantit une évaluation homogène et globale de l’efficacité des structures mises en place par les différents États membres signataires.

B. La portée de la décision sur l’efficacité de la lutte contre la fraude

L’application effective des règles de coopération est de nature à « contribuer à une réduction des fraudes et à la perception effective des recettes fiscales ». La décision consacre la prédominance des objectifs de sauvegarde des ressources propres sur les résistances administratives liées à l’autonomie institutionnelle des États membres. Les mécanismes de coopération s’imposant en vertu du règlement exercent une influence essentielle sur la mise à disposition du budget communautaire des ressources correspondantes.

La solution assure ainsi la préservation de l’équilibre général du système des ressources propres destiné à couvrir l’intégralité des dépenses de la Communauté. Le refus d’accès aux services nationaux constitue un manquement caractérisé aux obligations de coopération loyale et aux règles spécifiques régissant le contrôle financier.

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Hassan KOHEN
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