Cour de justice de l’Union européenne, le 15 septembre 2022, n°C-347/21

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt C-241/21 du 8 décembre 2022, précise l’étendue du droit fondamental à l’assistance judiciaire. Un agent de police faisait l’objet de poursuites devant le tribunal pénal spécialisé de Sofia pour des infractions liées à l’immigration clandestine. Lors de plusieurs audiences, des témoins furent interrogés alors que le prévenu et son avocat étaient absents pour des motifs médicaux impérieux. Le juge national a ordonné une audition supplémentaire afin de permettre à la défense de questionner les témoins à son tour ultérieurement. La juridiction de renvoi demande si le droit de l’Union impose de répéter l’intégralité des questions déjà posées par les autres parties présentes. La Cour répond qu’une audition complémentaire suffit si la défense a reçu préalablement les procès-verbaux des séances tenues en son absence constatée. L’examen de cette décision commande d’analyser la validation de la régularisation procédurale avant d’étudier les conditions d’effectivité des droits de la défense.

I. La validation de la régularisation de la procédure pénale

La Cour admet que la violation initiale du droit d’assister à son procès puisse faire l’objet d’une réparation à un stade ultérieur.

A. La reconnaissance d’une faculté de réparation a posteriori

L’article 8 de la directive 2016/343 consacre le droit fondamental pour tout suspect ou personne poursuivie d’assister personnellement à son procès pénal. La juridiction européenne rappelle toutefois que ce principe n’interdit pas de remédier à une absence involontaire lors d’une phase de collecte d’informations. Le juge de l’Union souligne qu’une personne ayant obtenu la « réitération, en sa présence, des actes accomplis » ne peut être regardée comme absente. Cette solution jurisprudentielle permet de sauvegarder la validité de la procédure sans imposer une annulation automatique des actes accomplis sans la défense. Cette faculté de régularisation conduit à s’interroger sur les modalités concrètes de réitération des actes accomplis en l’absence de la défense.

B. Le rejet de l’exigence d’une réitération intégrale des débats

La Cour précise qu’il n’est pas nécessaire de réitérer l’audition du témoin à charge dans son intégralité pour respecter les droits procéduraux. L’arrêt énonce que « l’invalidation des actes procéduraux effectués lors de cette audition n’apparaît pas nécessaire » pour garantir l’équité du procès. Les magistrats refusent d’imposer aux autres parties présentes de répéter les questions qu’elles ont déjà formulées lors de la première audition. Une telle obligation alourdirait excessivement la marche de l’instance sans apporter de bénéfice réel à la sauvegarde des intérêts du prévenu. La validation de ce mécanisme de correction procédurale reste néanmoins subordonnée au respect de garanties précises assurant une défense concrète et effective.

II. Les conditions d’effectivité de l’exercice des droits de la défense

La validité de l’audition supplémentaire repose sur l’accès préalable à l’information et sur la liberté réelle de contester les témoignages produits.

A. L’exigence de communication préalable des procès-verbaux

L’effectivité de la défense suppose que la personne poursuivie reçoive « une copie du procès-verbal de l’audition du témoin à charge » avant l’audience. Cette transmission doit impérativement intervenir avant la tenue de la session complémentaire afin de permettre une préparation utile de l’interrogatoire de défense. La connaissance du contenu des déclarations antérieures permet au conseil de la défense d’identifier les points de contestation ou les contradictions éventuelles. Le droit d’accès à un avocat perdrait son sens si le professionnel ne pouvait pas appréhender le déroulement des débats s’étant tenus auparavant. Cette obligation de communication constitue le socle indispensable sur lequel s’édifie la possibilité d’un débat contradictoire lors de l’audience de régularisation.

B. La préservation de la substance du droit à un procès équitable

Le juge européen exige que l’intéressé dispose d’une « possibilité adéquate et suffisante de contester les témoignages à charge » devant le tribunal national. L’audition supplémentaire doit offrir au prévenu et à son avocat la liberté totale de poser toute question utile à la manifestation de vérité. La Cour veille à ce que l’interprétation des directives assure un niveau de protection conforme à la Charte des droits fondamentaux de l’Union. Le respect de ces critères permet de concilier les impératifs de bonne administration de la justice avec la protection des libertés individuelles fondamentales. La décision ainsi rendue consacre une approche pragmatique qui privilégie la substance de la défense sur le formalisme rigide de la réitération intégrale.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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