La Cour de justice de l’Union européenne, dans sa décision du seize juillet deux mille quinze, précise les obligations relatives au traitement des déchets. À l’origine du litige, des projets de construction ont entraîné l’extraction de terres polluées déposées illégalement sur des terrains d’un État membre. L’institution requérante a engagé une procédure d’infraction après une enquête révélant l’absence de mesures d’assainissement efficaces sur les sites litigieux concernés. L’État membre a contesté la nature des déchets et la qualification de décharge permanente lors des échanges intervenus durant la phase précontentieuse. La question posée porte sur la responsabilité étatique face à la persistance d’une situation de fait nuisant gravement à la santé humaine. La juridiction condamne l’État en soulignant que l’absence d’exécution des décisions de police environnementale caractérise un manquement aux directives de l’Union. L’analyse du manquement lié à la persistance des décharges précédera l’étude de l’encadrement des obligations probatoires et institutionnelles incombant aux autorités nationales.
I. Le manquement lié à la persistance de décharges illégales
A. La requalification du stockage prolongé en décharge permanente
La juridiction souligne que les sites de stockage temporaire dépassant une année doivent être qualifiés de décharges soumises aux réglementations de l’Union européenne. Elle constate que « la situation constatée sur ces sites perdure et a, de fait, acquis un caractère permanent » depuis plusieurs années consécutives. Cette permanence transforme une simple activité de construction en une exploitation illégale de déchets dont la gestion échappe au contrôle des autorités compétentes. Le juge européen rappelle ainsi que le principe de précaution impose une surveillance rigoureuse dès que des substances peuvent nuire durablement à l’environnement.
B. L’inefficacité manifeste des mesures de police environnementale
L’État membre prétend avoir agi par des décisions administratives, mais l’absence d’exécution concrète de ces mesures révèle une défaillance dans ses obligations. Le texte de l’arrêt précise que « les décisions inexécutées prouveraient clairement l’inefficacité des mesures prises et, partant, leur caractère inapproprié » au sens juridique. Le manquement est ainsi consommé car les autorités n’ont pas empêché l’accumulation continue de matériaux dangereux malgré la connaissance du risque sanitaire majeur. Cette carence prolongée entraîne une dégradation significative du milieu naturel, justifiant la condamnation de l’État pour non-respect des objectifs fixés par la directive. L’examen de cette carence matérielle permet d’envisager désormais les règles de preuve et les obligations de coopération qui s’imposent à l’État membre.
II. L’encadrement des obligations probatoires et institutionnelles
A. La répartition de la charge de la preuve en matière d’infraction
Bien que l’institution requérante doive établir l’infraction sans présomption, elle peut s’appuyer sur des documents officiels émanant directement des services de l’État. La décision énonce qu’il « incombe à celui-ci de contester de manière substantielle et détaillée les données ainsi présentées et les conséquences qui en découlent ». Cette exigence de précision oblige les autorités nationales à collaborer activement à la manifestation de la vérité lors des enquêtes menées par l’Union. Le devoir de coopération loyale impose de faciliter la mission de surveillance sans entraver l’accès aux informations techniques nécessaires à l’évaluation du risque.
B. Le rejet des justifications fondées sur les procédures juridictionnelles internes
Les autorités défenderesses invoquent l’existence de recours judiciaires nationaux pour justifier le retard pris dans l’assainissement des sites pollués par les décharges. La Cour rejette fermement cet argument en rappelant qu’« un État membre ne saurait exciper de situations de son ordre interne pour justifier » l’inexécution. L’obligation de résultat prime sur les aléas administratifs ou judiciaires propres au droit national afin de garantir l’effet utile du droit de l’Union. Le juge confirme ainsi la primauté des impératifs écologiques européens sur les structures procédurales internes, clouant le débat sur la responsabilité étatique engagée.