La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le seize mars deux mille vingt-trois, l’arrêt portant le numéro de pourvoi C-696/21 P.
Une société commerciale avait conclu des conventions de subvention avec l’institution européenne afin de mener des activités de recherche dans le cadre de programmes budgétaires pluriannuels.
À la suite d’un audit, l’administration a informé la requérante que certaines dépenses n’étaient pas éligibles et qu’un recouvrement des fonds versés serait prochainement engagé.
La requérante a saisi le Tribunal de l’Union européenne d’un recours visant l’annulation de ces prises de position et le versement des sommes qu’elle estimait dues.
L’ordonnance du neuf septembre deux mille vingt et un a rejeté cette demande comme étant manifestement irrecevable en raison de son manque de précision juridique.
La société a formé un pourvoi devant la Cour de justice en alléguant une interprétation erronée des exigences de précision applicables aux requêtes par le Tribunal.
Le problème juridique porte sur la possibilité pour un demandeur de se référer globalement à des documents annexés pour pallier l’absence d’arguments dans sa requête.
La Cour de justice rejette le pourvoi au motif qu’une argumentation juridique minimale doit figurer dans le corps même de l’acte introductif d’instance pour être recevable.
L’analyse de cette solution impose d’examiner d’abord la portée de l’obligation de clarté procédurale avant d’envisager les conséquences sur l’accès au juge de l’annulation.
**I. La consécration d’une exigence de précision autonome de la requête**
**A. L’insuffisance du renvoi général aux éléments de preuve annexés**
Le juge européen rappelle avec fermeté que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours se fonde doivent ressortir du texte même.
Il affirme que « si la requête peut être complétée par des renvois à des passages déterminés, un renvoi global ne saurait pallier l’absence d’éléments essentiels ».
La juridiction considère que le Tribunal n’a pas commis d’erreur en refusant de rechercher lui-même dans les annexes les moyens que la société aurait dû exposer clairement.
Cette position vise à garantir que la partie défenderesse puisse préparer sa défense et que le juge puisse exercer son contrôle sans risque d’incertitude sur l’objet.
**B. La protection du principe de sécurité juridique dans le procès européen**
L’exigence de clarté énoncée par le règlement de procédure assure une administration de la justice efficace tout en respectant les droits de la défense de l’institution.
La Cour souligne que la requête doit être suffisamment précise pour permettre aux juges d’identifier les griefs sans avoir à se livrer à une exégèse complexe.
Elle valide l’approche consistant à déclarer irrecevable une demande dont le contenu juridique demeure trop imprécis ou simplement déduit de documents extérieurs à l’acte de procédure.
Cette rigueur formelle dans la présentation des moyens s’accompagne d’une délimitation stricte des actes susceptibles de faire l’objet d’un tel recours contentieux.
**II. La limitation du contrôle de légalité face à la nature contractuelle du litige**
**A. L’incompétence du juge de l’annulation en présence d’un cadre conventionnel**
La Cour confirme également que le recours en annulation ne peut être utilisé pour contester des actes s’inscrivant dans un cadre purement contractuel dont ils sont indissociables.
L’institution européenne agissait ici comme une partie à un contrat et non comme une autorité administrative exerçant des prérogatives de puissance publique lors de l’audit.
La décision énonce que « les actes adoptés par les institutions dans un cadre contractuel ne figurent pas au nombre des actes dont l’annulation peut être demandée ».
Le demandeur aurait dû introduire une action sur le fondement de la clause compromissoire prévue par les conventions afin de faire valoir ses droits au paiement.
**B. La cohérence du système des voies de recours au sein de l’Union**
La solution retenue évite le détournement de la procédure d’annulation par des cocontractants cherchant à obtenir l’exécution d’obligations pécuniaires nées d’une relation de droit privé.
Le juge européen préserve ainsi la distinction fondamentale entre le contentieux de la légalité des actes administratifs et celui de l’exécution des contrats conclus par l’administration.
En rejetant le pourvoi, la Cour réaffirme que la protection juridictionnelle des particuliers est assurée par des voies de droit spécifiques dont les conditions sont strictement définies.
Cette jurisprudence renforce la prévisibilité des relations contractuelles entre les entités privées et les organismes de l’Union européenne dans la gestion des financements de recherche.