La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision le 6 octobre 2025 concernant le reconditionnement des médicaments et le droit des marques. Le litige oppose un titulaire de marques à un importateur parallèle au sujet de l’emballage extérieur de produits pharmaceutiques importés de l’étranger. L’importateur a remplacé le dispositif antieffraction d’origine, laissant des traces visibles d’ouverture sur les boîtes de médicaments destinées au marché d’un État membre. Le juge national a saisi la Cour afin de déterminer si ces altérations justifient l’opposition du titulaire de la marque à la commercialisation des produits. La Cour doit concilier la protection de la propriété intellectuelle avec l’impératif de libre circulation des marchandises au sein du marché intérieur européen. Elle décide que le titulaire ne peut s’opposer au reconditionnement si le remplacement du dispositif laisse des traces provoquant une résistance significative des consommateurs. La juridiction précise également les conditions de validité de l’apposition d’un code à barres par une étiquette autocollante sur l’emballage extérieur. L’analyse portera d’abord sur les conditions de l’entrave à l’accès au marché avant d’aborder les exigences techniques liées à l’étiquetage des produits.
I. L’entrave à l’accès au marché par le reconditionnement
A. Le critère de la résistance significative des consommateurs
Le droit de marque s’efface lorsque son exercice constitue une « entrave à l’accès effectif » au marché de l’État membre d’importation des produits. La Cour souligne que le remplacement du dispositif antieffraction laisse parfois des traces visibles sur l’emballage extérieur d’origine du médicament concerné. Ces marques d’ouverture peuvent engendrer une méfiance durable chez le patient quant à l’intégrité du produit de santé qu’il achète. L’opposition du titulaire est exclue si une « proportion significative de consommateurs » refuse d’acquérir des médicaments présentant de tels signes de manipulation préalable. Le juge doit vérifier au cas par cas si cette réaction du public empêche réellement l’importateur d’écouler ses stocks de manière satisfaisante. Cette solution privilégie la réalité économique du marché sur la protection formelle conférée par l’enregistrement d’un signe distinctif européen.
B. La nécessité d’un nouvel emballage extérieur
Le reconditionnement dans un nouvel emballage devient nécessaire dès lors que le simple réétiquetage ne permet pas d’accéder au marché cible. La Cour considère que l’existence de traces d’ouverture sur le contenant original peut justifier le remplacement complet de la boîte en carton. Le titulaire de la marque ne peut exiger le maintien de l’emballage d’origine si celui-ci subit une dépréciation esthétique ou sécuritaire notable. La décision précise que cette situation doit être établie par l’importateur afin de démontrer le caractère indispensable de l’opération de reconditionnement effectuée. Le droit de l’Union européenne limite ainsi les facultés d’opposition du propriétaire des droits de propriété industrielle pour favoriser les échanges transfrontaliers. L’accès effectif au marché demeure la clé de voûte du système permettant la cohabitation entre marques et importations parallèles de médicaments.
II. La conformité technique des dispositifs de sécurité
A. La licéité de l’usage d’étiquettes autocollantes
La seconde question porte sur la méthode d’apposition de l’identifiant unique requis par la réglementation européenne sur les dispositifs de sécurité. La Cour interprète le règlement délégué deux mille seize cent soixante et un en validant l’usage d’une « étiquette autocollante » supportant le code. Cette modalité technique ne contrevient pas aux objectifs de protection de la santé publique poursuivis par le législateur de l’Union européenne. L’importateur parallèle dispose d’une certaine liberté dans le choix du support matériel utilisé pour identifier les boîtes de médicaments reconditionnées. La décision confirme que le droit européen n’impose pas une impression directe sur le carton pour garantir l’authenticité de la marchandise.
B. La garantie d’intégrité et de lisibilité durable
La validité de l’étiquetage dépend du respect de conditions strictes relatives à la permanence et à la qualité visuelle du dispositif choisi. L’étiquette ne doit pas pouvoir « être retirée sans être endommagée » afin de prévenir toute manipulation frauduleuse ou réutilisation illicite par des tiers. La Cour exige également que le code à barres reste « parfaitement lisible » pendant toute la durée de vie du produit pharmaceutique. Cette exigence assure la traçabilité complète du médicament depuis sa fabrication jusqu’à sa délivrance finale au patient par une officine. Le respect de ces critères techniques permet d’assurer un niveau élevé de sécurité sanitaire tout en autorisant les pratiques de commerce parallèle. La juridiction européenne maintient ainsi un équilibre entre la sécurité des patients et la fluidité des échanges commerciaux intra-communautaires.