Par un arrêt rendu le 23 janvier 2014, la Cour de justice de l’Union européenne précise les modalités du contrôle juridictionnel sur les marques. Une demande d’enregistrement d’un signe verbal comme marque communautaire a été déposée auprès de l’office compétent pour des produits pharmaceutiques. Le titulaire d’une marque verbale antérieure a formé une opposition en invoquant un risque de confusion entre les deux dénominations. La division d’opposition a rejeté cette demande, décision confirmée par la chambre de recours au motif que les signes présentaient des différences notables. Le Tribunal de l’Union européenne, saisi d’un recours, a annulé cette décision par un arrêt du 9 octobre 2012. Le juge de première instance estimait alors que la similitude des signes entraînait nécessairement un risque de confusion pour le public. La Cour de justice est désormais saisie d’un pourvoi visant l’annulation de cet arrêt pour erreur de droit et défaut de motivation. Elle doit déterminer si le juge du fond a correctement évalué la similitude visuelle et phonétique des signes en présence. La Cour annule l’arrêt attaqué et renvoie l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue à nouveau sur le litige.
**I. Une appréciation critiquable de la similitude entre les signes verbaux**
**A. La méconnaissance des critères de comparaison visuelle et phonétique**
La Cour de justice souligne que l’appréciation du risque de confusion doit reposer sur l’impression d’ensemble produite par les marques. Le Tribunal avait conclu à une similitude visuelle et phonétique entre les termes en se fondant sur leur racine commune. Cette approche simplificatrice néglige pourtant l’examen des éléments finaux des vocables qui permettent au consommateur de distinguer les produits. La Cour rappelle ici que les différences de longueur et de terminaison jouent un rôle crucial dans la perception globale des signes. Le juge du fond semble avoir accordé une importance disproportionnée aux premières lettres sans analyser l’impact des suffixes respectifs. Cette erreur d’appréciation fausse l’analyse globale requise par la réglementation européenne sur la marque communautaire pour protéger le consommateur.
**B. La sanction du défaut de motivation dans l’examen de la chambre de recours**
L’arrêt commenté met en lumière l’obligation pour le juge de vérifier la cohérence du raisonnement suivi par les instances administratives. Le Tribunal avait reproché à la chambre de recours de n’avoir pas suffisamment étayé son constat d’absence de similitude. Toutefois, la Cour de justice considère que le juge de première instance a lui-même manqué de précision dans sa propre démonstration. Il ne suffit pas d’affirmer une identité partielle pour conclure à un risque de confusion sans examiner les circonstances particulières. Le contrôle de légalité exercé par le juge de l’Union doit s’appuyer sur une analyse factuelle complète et rigoureusement motivée. Par cette décision, la Cour exige une rigueur méthodologique accrue de la part du Tribunal lors de l’examen des recours.
**II. Une portée procédurale rétablissant la hiérarchie du contrôle juridictionnel**
**A. L’annulation de l’arrêt pour dénaturation des faits et erreur de droit**
La Cour de justice censure le raisonnement du Tribunal en invoquant une lecture erronée des éléments de fait soumis à son appréciation. L’annulation repose sur le constat que le juge du fond a déformé la réalité des signes pour justifier leur prétendue ressemblance. Cette intervention du juge de cassation est nécessaire pour garantir une application uniforme du droit des marques au sein de l’Union. En identifiant une erreur de droit, la Cour rappelle que le risque de confusion ne peut jamais être présumé par principe. Chaque espèce nécessite une étude concrète des produits et des signes afin de préserver les intérêts des opérateurs économiques. La sévérité du contrôle exercé illustre la volonté de maintenir une protection équilibrée entre les titulaires de droits concurrents.
**B. Le renvoi de l’affaire pour un nouvel examen de la similitude des produits**
Le dispositif de l’arrêt ordonne le renvoi de la cause devant le Tribunal afin que celui-ci procède à une nouvelle évaluation. Cette étape est indispensable puisque la Cour de justice ne peut pas se substituer au juge du fond pour l’examen des preuves. Le Tribunal devra désormais réexaminer la similitude des produits pharmaceutiques en tenant compte des observations formulées par le juge supérieur. Ce renvoi souligne la persistance des incertitudes juridiques entourant la comparaison de signes verbaux courts dans le secteur de la santé. La solution finale dépendra de la capacité du juge du fond à motiver davantage sa conclusion sur l’existence du risque. Cette décision renforce ainsi la sécurité juridique en imposant un cadre strict à l’appréciation souveraine des faits par les juges.