Cour de justice de l’Union européenne, le 17 octobre 2019, n°C-239/18

Le présent arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne le 17 octobre 2019 précise l’accès aux données des organismes officiels. Une société de gestion de droits d’obtention végétale réclamait la communication de données relatives aux surfaces cultivées détenues par une autorité publique régionale. Cette demande visait à obtenir des précisions sur les espèces végétales afin de déterminer le statut des agriculteurs au regard de la réglementation. Après le rejet de ses prétentions en première instance par le tribunal régional d’Erfurt le 17 août 2017, la juridiction d’appel décida de surseoir. Le tribunal régional supérieur d’Iéna, par une décision du 28 mars 2018, interrogea la Cour sur l’interprétation du règlement européen. La demanderesse soutient que l’accès aux données de l’espèce permet d’identifier les cultivateurs redevables d’une rémunération équitable pour l’usage de semences. La question juridique porte sur la faculté pour l’obtenteur de solliciter des informations générales sans désigner précisément une variété protégée par un titre. Le juge européen décide que l’organisme officiel peut refuser la communication si la demande ne porte pas sur une variété identifiée par le requérant.

I. La délimitation textuelle du droit d’interrogation des organismes publics

La Cour de justice fonde son raisonnement sur une analyse rigoureuse des dispositions fixant les modalités de la dérogation pour la production agricole. Le texte prévoit la possibilité d’obtenir des données sur l’utilisation réelle de « matériel d’espèces ou de variétés spécifiques » auprès d’un organisme officiel. Cependant, cette faculté est immédiatement limitée par l’obligation de préciser la ou les variétés pour lesquelles le titulaire du droit sollicite une information. L’interprétation littérale retenue par les juges écarte ainsi la possibilité pour l’obtenteur de demander des données globales relatives à de simples catégories botaniques. Ainsi, cette précision textuelle assure que la démarche de l’obtenteur demeure en lien direct avec l’exercice effectif des droits conférés par la protection.

A. Le rejet d’une demande d’information portant exclusivement sur l’espèce

Cette précision textuelle relative à la désignation de la variété se double d’une exigence probatoire stricte quant à la titularité des droits invoqués. La décision souligne que le requérant doit nécessairement fournir les preuves de sa propriété pour que sa demande de renseignement soit jugée recevable. Or, le règlement de base dispose que seules les variétés peuvent faire l’objet d’une protection, excluant ainsi les espèces du champ de la propriété. L’arrêt énonce qu’une demande « doit nécessairement préciser la variété spécifique pour laquelle l’information est demandée » afin de respecter les conditions réglementaires. Cette exigence permet de vérifier que le titulaire agit dans le cadre de la préservation de ses propres droits industriels contre les exploitations abusives.

B. L’obligation corollaire de justifier de la propriété d’un titre variétal

II. La justification téléologique de l’exigence d’une variété spécifique

Si la lettre du texte impose une identification précise, l’esprit de la réglementation confirme cette nécessité par la recherche d’un équilibre proportionné. Le droit à l’information a pour but de fournir au titulaire les moyens de s’assurer du respect des conditions de la dérogation agricole. Une demande portant sur des agriculteurs n’ayant jamais utilisé de variétés protégées irait au-delà de ce qui est nécessaire pour sauvegarder l’obtenteur. Partant, la Cour affirme que l’accès aux données ne doit pas excéder la mesure nécessaire à la préservation des droits de propriété industrielle spécifiques. Par ailleurs, cette limitation prévient tout risque de recherche indiscriminée d’informations qui ne serait pas justifiée par un indice d’utilisation d’une variété.

A. Un droit à l’information strictement circonscrit à la défense des titres

Cette limitation au profit du titulaire trouve un écho particulier dans les règles de preuve applicables aux catégories d’agriculteurs bénéficiant d’une exonération. La société demanderesse arguait que ces données permettaient d’identifier les petits agriculteurs dispensés du versement de la rémunération équitable prévue par le texte. Toutefois, le juge rappelle qu’il incombe à l’agriculteur d’apporter la preuve de son statut de petit producteur pour bénéficier de l’exonération des redevances. Dès lors, l’obtention d’informations sur la taille des surfaces cultivées ne constitue pas une mesure indispensable à la sauvegarde des droits du titulaire. La solution garantit que la collecte de données par les autorités reste proportionnée aux objectifs de contrôle de la production sans surcharge administrative.

B. Le déplacement de la charge probante relative au statut du cultivateur

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture