La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 30 avril 2019, définit le régime douanier applicable aux alliages cuivreux. Un importateur a déclaré des tôles de laiton laminées à chaud sous une position tarifaire bénéficiant d’une exonération totale des droits. L’administration douanière a contesté ce classement en soutenant que le laminage imposait une taxation au titre de la catégorie des barres. La juridiction administrative de première instance a rejeté cette analyse car les produits présentaient des pores et des fissures internes notables. Saisie d’un pourvoi, l’Augstākā tiesa de Lettonie a sollicité la Cour de justice pour clarifier la définition technique des barres de cuivre. Le problème de droit porte sur l’incidence d’imperfections de structure sur la qualification de section transversale pleine et constante du produit. La Cour retient que des lingots laminés peuvent constituer des barres malgré la présence de défauts internes tels que des fissures irrégulières. Cette solution repose sur une lecture littérale des notes de chapitre de la nomenclature combinée privilégiant l’aspect extérieur et le façonnage. Le présent commentaire examine d’abord la portée des critères géométriques (I) avant d’analyser la primauté du procédé de fabrication industrielle (II).
I. L’exégèse technique des critères de définition des barres
A. Une interprétation géométrique de la constance sectionnelle
La Cour de justice précise que la notion de section constante doit s’apprécier uniquement au regard de la forme et des dimensions extérieures. Cette exigence « renvoie à la forme et aux dimensions transversales du produit concerné » sans égard pour la pureté de sa structure interne. Les juges considèrent que des lingots rectangulaires dont les mesures sont identiques en tout point de leur longueur remplissent parfaitement cette condition. Une telle approche privilégie la régularité du profil externe sur la perfection de la matière pour déterminer la catégorie douanière de l’alliage.
Le juge européen refuse de lier la qualification de barre à l’absence totale d’imperfections physiques telles que des pores ou des vides. Cette position assure que des marchandises présentant des défauts de fonderie ne soient pas exclues de leur catégorie naturelle par une exigence excessive. La constance est donc une valeur dimensionnelle qui permet d’identifier le produit selon son apparence géométrique globale lors du contrôle douanier.
B. L’éviction des seuls produits creux par le critère de plénitude
L’interprétation de l’adjectif « pleine » dans la définition des barres sert essentiellement à distinguer ces produits des tuyaux ou des tubes. La Cour souligne que cette caractéristique doit être comprise comme excluant seulement les produits creux de la position tarifaire relative aux barres. Des pores ou des fissures irréguliers ne confèrent pas au lingot la nature d’un produit creux au sens de la nomenclature. Ainsi, un produit massif reste juridiquement plein tant qu’il ne comporte pas un conduit intérieur unique et fermé de section régulière.
Le raisonnement des juges s’appuie sur la note 1 du chapitre 74 pour opposer radicalement les barres aux tubes et aux tuyaux. Les imperfections internes constatées sur le plan de coupe ne modifient pas la destination fondamentale du métal vers une structure tubulaire. Cette distinction clarifie les frontières entre les différentes positions tarifaires en se fondant sur l’anatomie fonctionnelle des objets métalliques importés.
II. La hiérarchisation des modes de production dans le classement tarifaire
A. L’effet déterminant du laminage à chaud sur la qualification
Le procédé d’obtention de la marchandise constitue un critère de classement prépondérant pour les métaux communs au sein de la nomenclature combinée. La Cour rappelle que les produits obtenus par laminage sont explicitement exclus de la position visant le cuivre sous forme brute. Elle observe que les barres sont habituellement obtenues par cette technique industrielle qui leur confère leurs propriétés objectives de résistance et de forme. Le laminage à chaud transforme la matière première en un produit semi-fini dont la valeur ajoutée justifie un traitement douanier spécifique.
La présence de fissures irrégulières ne saurait primer sur l’ouvraison volontaire subie par le métal lors de son passage entre les cylindres. Les notes explicatives du système harmonisé confirment que le degré d’ouvraison détermine le passage d’une position tarifaire à une autre. Par conséquent, l’action mécanique exercée sur le lingot l’emporte sur les accidents de structure pour fixer définitivement l’identité douanière de la cargaison.
B. La préservation de la sécurité juridique par des propriétés objectives
Le critère décisif pour la classification tarifaire doit être recherché dans les caractéristiques et propriétés objectives définies par le libellé des positions. La Cour garantit ainsi la facilité des contrôles douaniers en évitant des analyses de structure trop complexes ou aléatoires sur chaque arrivage. Une section transversale présentant des défauts visuels reste une section de barre si elle respecte les proportions d’épaisseur par rapport à la largeur. Cette solution protège les opérateurs économiques contre une imprévisibilité liée à la qualité intrinsèque variable des alliages produits industriellement.
L’interprétation retenue favorise l’uniformité de l’application du tarif douanier commun sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne pour tous les métaux. Les autorités nationales doivent se borner à vérifier la conformité du produit aux définitions textuelles sans exiger une perfection matérielle non prévue. La stabilité des échanges internationaux dépend de cette lecture pragmatique qui lie la fiscalité aux caractéristiques mesurables et aux procédés de fabrication.