La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 19 octobre 2017, une décision fondamentale sur la protection des animaux lors d’exportations internationales. Cette affaire interrogeait l’articulation entre le versement des restitutions agricoles et la tenue rigoureuse du carnet de route par les transporteurs de bétail. À la fin de l’année 2010, une société procède à l’expédition de trente-six bovins depuis un État membre vers une destination située en pays tiers. Le transport routier initial s’achève dans un port où les animaux sont transférés sur un navire pour la suite du trajet international maritime. L’autorité administrative compétente ordonne, le 4 février 2014, le remboursement des aides perçues car le suivi administratif était incomplet après la sortie de l’Union. Le College van Beroep voor het bedrijfsleven a rendu, le 4 juillet 2016, une décision de renvoi préjudiciel enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet. Le juge doit déterminer si l’obligation de maintenir le carnet de route persiste jusqu’à la destination finale malgré la remise de l’original au port. La Cour juge que le remboursement des aides est exigible si le transporteur ne tient pas à jour une copie du document jusqu’au déchargement. L’interprétation souveraine des règlements impose une surveillance continue des opérations de transport (I), dont le défaut justifie la restitution intégrale des financements publics (II).
**I. L’exigence impérative de suivi du carnet de route jusqu’à la destination finale**
**A. L’interprétation téléologique des obligations de planification et de contrôle**
L’article 1er du règlement n° 817/2010 subordonne le paiement des aides au respect des normes de bien-être pendant toute la durée du transport effectif. La Cour souligne que l’objectif de garantir que les animaux ne subissent pas de souffrances inutiles impose une surveillance continue des conditions de voyage. Le carnet de route constitue l’instrument indispensable pour vérifier ex post si les exigences de protection ont été respectées durant le trajet complet. En précisant que le plan de marche doit être « réaliste et permet de penser que les dispositions de ce règlement seront respectées », le juge confirme cette nécessité.
**B. La continuité du contrôle du bien-être animal au-delà des frontières de l’Union**
Le contrôle s’exerce non seulement au point de sortie du territoire douanier, mais aussi jusqu’au lieu du premier déchargement dans le pays tiers destination. Il est « indispensable d’exiger que ce carnet de route soit renseigné tout au long du voyage » pour préserver l’utilité du contrôle vétérinaire final. L’absence de données précises sur l’itinéraire maritime entre le port de sortie et la destination finale prive les autorités de tout moyen de vérification. Le juge considère que l’obligation de remise de l’original au point de sortie n’interrompt pas le devoir de suivi incombant à l’opérateur économique.
**II. La sanction du manquement formel par le recouvrement des aides publiques**
**A. La charge de la preuve incombant à l’exportateur par l’usage de copies**
L’exportateur doit assumer la responsabilité de démontrer le respect des dispositions réglementaires en complétant une copie du document obligatoire de transport animalier. La réglementation prévoit explicitement « l’usage de copies du carnet de route » pour pallier la remise de l’original au vétérinaire officiel du port. Cette copie doit remplir la même fonction que l’original en permettant au vétérinaire de destination de valider la conformité des données de marche. Le manquement à cette obligation de diligence administrative empêche la constatation de la régularité du transport et fragilise la position de l’opérateur.
**B. La rigueur des conditions d’octroi des restitutions à l’exportation**
Le remboursement des sommes perçues peut être exigé dès lors qu’il est établi que le carnet de route n’a pas été tenu à jour. La Cour juge que la restitution est « réputée indûment payée » si les obligations relatives à la protection des animaux n’ont pas été observées. Cette solution assure une application cohérente de la politique agricole commune tout en renforçant l’effectivité des standards de protection de la santé animale. La rigueur de cette jurisprudence rappelle que le bénéfice des aides financières reste strictement conditionné au respect scrupuleux des formalités de contrôle imposées.