Cour de justice de l’Union européenne, le 19 septembre 2019, n°C-527/18

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 9 novembre 2023, une décision importante relative à l’accès aux informations sur la réparation des véhicules. Une association professionnelle regroupant des grossistes en pièces détachées a demandé à un constructeur l’accès aux données techniques sous un format de traitement électronique. Le litige porté devant les juridictions allemandes visait à obtenir des informations structurées permettant une exploitation automatisée des bases de données par les opérateurs. Saisi d’un recours, le tribunal régional de Cologne a décidé de surseoir à statuer pour interroger la juridiction européenne sur l’interprétation du règlement communautaire. La question posée consistait à savoir si les constructeurs doivent fournir des données transformables électroniquement et si certains canaux de vente privilégient les réseaux officiels. Le règlement « n’impose pas aux constructeurs automobiles de fournir (…) un accès (…) dans un format susceptible de faire l’objet d’un traitement électronique ». La Cour ajoute que l’accès n’est pas discriminatoire si les indépendants bénéficient du même contenu que les réparateurs officiels par d’autres voies. L’analyse portera sur l’absence d’exigence de format numérique spécifique avant d’étudier la validité des modalités d’accès aux informations techniques de réparation.

I. L’absence d’exigence d’un format de données spécifique pour l’accès aux informations

A. Une interprétation littérale de l’obligation de fourniture des données techniques

La Cour de justice privilégie une lecture stricte des dispositions réglementaires concernant les modalités techniques de mise à disposition des informations de réparation. Le texte prévoit un accès facile mais ne mentionne aucune obligation relative à la structure informatique ou au format de fichier des données transmises. Les juges estiment ainsi que le législateur européen n’a pas entendu contraindre les constructeurs à adapter leurs systèmes pour permettre un traitement électronique automatisé. Le règlement « n’impose pas aux constructeurs automobiles de fournir aux opérateurs indépendants un accès (…) dans un format susceptible de faire l’objet d’un traitement électronique ». L’obligation de communication porte sur la disponibilité de l’information brute plutôt que sur la compatibilité informatique des supports de diffusion utilisés par les fabricants. Cette interprétation garantit que les opérateurs indépendants reçoivent les données nécessaires sans imposer de charges technologiques excessives aux entreprises de construction de véhicules.

B. La préservation de la liberté d’organisation technique des constructeurs automobiles

Cette position jurisprudentielle assure une protection des intérêts économiques des fabricants en limitant les investissements nécessaires à la mise en conformité de leurs plateformes. L’absence de contrainte de format permet aux constructeurs de conserver leurs propres standards de diffusion tant que les informations demeurent accessibles aux tiers. Le droit de l’Union cherche ici un équilibre entre l’ouverture du marché de la réparation et le respect de l’autonomie technique des producteurs de véhicules. La décision confirme que l’accès aux données ne doit pas nécessairement faciliter la création de bases de données concurrentes par les distributeurs de pièces. Les opérateurs indépendants doivent fournir les efforts nécessaires pour traiter les informations reçues selon leurs propres besoins techniques et leurs capacités logicielles respectives. La Cour refuse de transformer une obligation d’information en une obligation de fourniture d’outils de travail numériques directement exploitables par les entreprises concurrentes.

II. La validité des modalités d’accès au regard du principe de non-discrimination

A. La licéité des canaux d’information supplémentaires réservés aux réseaux agréés

Le juge européen examine ensuite si la création d’un service d’information exclusif pour les concessionnaires officiels constitue une pratique discriminatoire prohibée par le règlement. Il considère que l’ouverture d’un canal de vente spécifique via un prestataire tiers ne contrevient pas aux exigences d’égalité entre les différents opérateurs économiques. La mise en place de ces outils additionnels pour les réparateurs officiels est jugée compatible avec le cadre légal s’ils ne masquent aucune exclusion réelle. Un tel dispositif « ne constitue pas un accès discriminatoire » dès lors que les acteurs indépendants peuvent obtenir les informations essentielles par les voies classiques. Cette solution permet aux constructeurs de développer des services premium pour leurs réseaux tout en respectant le socle minimal de communication imposé par l’Union. La distinction entre les supports de diffusion n’est pas synonyme d’inégalité si les informations transmises demeurent identiques pour l’ensemble des acteurs du marché.

B. Le maintien d’une égalité effective dans la diffusion du contenu technique

L’appréciation de la discrimination repose exclusivement sur la comparaison du contenu des informations fournies et non sur la multiplicité des modes de transmission utilisés. La Cour souligne que les opérateurs indépendants doivent disposer d’un accès non discriminatoire quant au fond de la documentation nécessaire à l’entretien des véhicules. La protection de la concurrence est assurée par l’équivalence des données partagées sans qu’une identité parfaite des outils de consultation ne soit pourtant exigée. Les constructeurs remplissent leurs obligations légales en garantissant que les indépendants reçoivent les mêmes instructions de réparation que les membres de leurs réseaux officiels. L’égalité de traitement se mesure à la capacité réelle des réparateurs indépendants de concurrencer les ateliers agréés sur le plan technique et professionnel. Le juge communautaire valide ainsi une organisation du marché où la diversité des canaux de communication ne nuit pas à la transparence des informations.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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