La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision le 6 octobre 2025 relative à la régulation des activités d’un établissement de crédit. Un État membre a interdit à une banque de nouer des relations d’affaires avec des clients non résidents dépassant certains seuils financiers mensuels. L’autorité compétente a également imposé la rupture des contrats déjà conclus après l’adoption de cette mesure administrative restrictive. L’établissement de crédit a contesté cette décision devant les juridictions nationales pour violation des libertés fondamentales de circulation garanties par les traités européens. Le litige porte sur la compatibilité de ces mesures de police administrative avec les principes de libre prestation des services et de libre circulation des capitaux. La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur la nature de ces restrictions et sur les justifications admissibles pour protéger l’ordre public. La Cour affirme que de telles mesures constituent des restrictions tout en précisant les conditions strictes de leur validité au regard des objectifs de sécurité.
I. La qualification de l’entrave aux libertés de prestation de services et de circulation des capitaux
A. L’identification des mouvements de capitaux dans l’activité bancaire
La Cour précise d’abord le champ d’application matériel de la libre circulation des capitaux dans le cadre des activités bancaires quotidiennes. Elle énonce que « les prêts et les crédits financiers ainsi que les opérations en comptes courants et de dépôts auprès des établissements financiers constituent des mouvements de capitaux ». Cette définition inclut les flux financiers courants et les dépôts, même lorsqu’ils sont effectués par des personnes physiques sans lien avec l’État. Le droit de l’Union protège ainsi l’intégralité des services financiers contre des entraves nationales injustifiées au sens de l’article 63, paragraphe 1, TFUE.
B. La caractérisation d’une restriction aux libertés de circulation
Le juge européen qualifie ensuite la mesure administrative d’interdiction de relations d’affaires comme une restriction aux libertés fondamentales de prestation de services. Elle constitue « une restriction à la libre prestation des services » ainsi qu’« une restriction aux mouvements de capitaux » au sens des articles 56 et 63 TFUE. L’interdiction de contracter avec des entités étrangères empêche l’établissement de proposer ses services à une clientèle située en dehors du territoire national. Cette mesure dissuade également les investisseurs et les déposants non résidents d’accéder au marché financier de l’État membre concerné par cette réglementation.
Cette qualification d’entrave aux échanges transfrontaliers impose désormais d’analyser le cadre de sa justification au regard des intérêts impérieux invoqués par l’État.
II. L’encadrement rigoureux de la mesure de police administrative au regard du droit de l’Union
A. La légitimité des objectifs de lutte contre le blanchiment et de contrôle prudentiel
La Cour reconnaît que la lutte contre la criminalité financière constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une entrave. Une mesure est licite si elle « est justifiée par l’objectif visant à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ». L’ordre public et le contrôle prudentiel des établissements financiers permettent également de limiter l’exercice des libertés de circulation au sein de l’Union. Les autorités nationales disposent d’une marge de manœuvre pour protéger la stabilité de leur système financier contre des activités illicites ou opaques.
B. L’exigence de proportionnalité et de protection des intérêts des parties
La validité finale de l’interdiction dépend toutefois du respect strict des principes de proportionnalité et de nécessité énoncés par le droit de l’Union. La mesure administrative ne doit pas excéder « ce qui est nécessaire » pour atteindre les objectifs de prévention du blanchiment et de sécurité publique. Le juge doit vérifier que cette décision « ne porte pas une atteinte excessive aux droits et intérêts protégés » de la banque et de ses clients. La protection des intérêts économiques des acteurs privés doit être équilibrée avec les nécessités impérieuses de la régulation prudentielle et de l’ordre public.