Cour de justice de l’Union européenne, le 20 septembre 2018, n°C-546/16

La Cour de justice de l’Union européenne, par une décision rendue le 6 octobre 2025, précise les conditions d’évaluation des offres des marchés publics. Un litige oppose un opérateur économique à un pouvoir adjudicateur au sujet de la régularité d’une procédure de passation de services lancée par ce dernier.

L’entité adjudicatrice a imposé l’obtention d’un seuil minimal de points lors de l’évaluation technique initiale des offres remises par les candidats. Le soumissionnaire dont l’offre ne satisfait pas cette exigence minimale se voit évincé de la phase ultérieure de l’attribution sans examen financier.

Saisie d’un recours, la juridiction nationale décide de surseoir à statuer afin d’interroger la Cour de justice sur l’interprétation de la directive 2014/24/UE. Le demandeur soutient que l’exclusion automatique des offres avant l’examen du prix méconnaît les principes de concurrence et d’offre la plus avantageuse.

Le juge européen doit déterminer si le droit de l’Union autorise une législation nationale permettant l’exclusion d’offres n’atteignant pas un seuil technique prédéterminé. La Cour de justice répond positivement en considérant que la directive « ne s’oppose pas à une législation nationale » autorisant de telles exigences minimales. Cette solution conduit à analyser d’abord la légalité des seuils d’exclusion technique avant d’étudier l’indépendance de cette phase par rapport au nombre de candidats restants.

I. La consécration de la faculté d’imposer des seuils d’élimination technique

A. La conformité des exigences minimales au cadre de la directive 2014/24

La Cour affirme que la directive 2014/24 autorise les pouvoirs adjudicateurs à fixer des conditions techniques préalables dans le cahier des charges. Ces autorités peuvent exiger que « les offres soumises qui n’atteignent pas un seuil de points minimum prédéterminé au terme de cette évaluation soient exclues ». Cette interprétation respecte les principes de transparence dès lors que les critères d’évaluation sont clairement définis avant le dépôt des candidatures. Le juge européen souligne ainsi que la réglementation n’impose pas une comparaison globale systématique de toutes les offres déposées lors de l’étape finale.

B. La protection de la qualité des prestations par l’éviction des offres insuffisantes

L’instauration d’un seuil minimal garantit que seules les propositions présentant une qualité suffisante feront l’objet d’une analyse budgétaire approfondie par l’acheteur. Cette approche prévient l’attribution d’un contrat à une offre économiquement avantageuse mais techniquement médiocre ou inapte à satisfaire les besoins identifiés. Le droit européen privilégie une vision qualitative de la commande publique en permettant l’élimination des offres n’atteignant pas un niveau de performance acceptable. L’évaluation ultérieure se fonde alors « tant sur des critères techniques que sur le prix » pour les seuls candidats ayant franchi la barrière.

II. L’autonomie de la phase d’évaluation technique face au processus d’attribution

A. La séparation hermétique entre l’évaluation technique et l’examen du prix

L’article 66 de la directive 2014/24 permet une structuration de la procédure en phases successives afin de rationaliser le choix final de l’administration. La décision précise que les offres insuffisantes sont « exclues de l’évaluation ultérieure » avant même la pondération globale entre la technique et le prix. Cette décomposition assure que le critère financier ne puisse compenser une lacune technique jugée rédhibitoire par le pouvoir adjudicateur lors de la conception. La procédure ouverte n’interdit donc pas une sélection intermédiaire rigoureuse centrée exclusivement sur les mérites intrinsèques de la solution technique proposée.

B. L’indifférence manifeste du nombre de soumissionnaires subsistant dans la procédure

La validité de l’exclusion demeure entière « indépendamment du nombre de soumissionnaires restants » à l’issue de cette sélection opérée par le pouvoir adjudicateur. La Cour rejette l’idée qu’un faible nombre de candidats obligerait l’autorité à maintenir des offres techniquement insatisfaisantes pour préserver une concurrence apparente. La protection de la concurrence ne saurait contraindre l’acheteur public à évaluer le prix d’une prestation ne répondant pas à ses exigences de performance. Cette solution confirme la primauté de la conformité technique sur le maintien d’une pluralité de candidats lors de la phase finale d’attribution du marché.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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