Cour de justice de l’Union européenne, le 21 décembre 2021, n°C-586/20

    Le 21 décembre 2021, la Cour de justice de l’Union européenne rejette un pourvoi portant sur la responsabilité non contractuelle de l’Union européenne. Une société spécialisée dans l’importation de produits biologiques conteste le refus d’un organisme de contrôle de lui délivrer des certificats d’inspection nécessaires. Ce litige naît de l’impossibilité de commercialiser des marchandises en raison de l’absence de validation par ce prestataire privé agissant dans un État tiers. La requérante engage une action en indemnité devant le Tribunal de l’Union européenne pour obtenir la réparation du dommage financier subi par son entreprise. Par un arrêt du 9 septembre 2020, les premiers juges rejettent cette demande en écartant toute faute imputable directement à l’institution défenderesse. La société demande l’annulation de cette décision en soutenant que l’administration doit répondre des manquements de l’organisme de contrôle qu’elle a agréé. Le juge doit déterminer si le comportement fautif d’une entité privée de certification peut être juridiquement attribué à l’institution lors d’un recours indemnitaire. La Cour décide que le comportement de cet organisme ne saurait être imputé à l’administration en l’absence de base légale prévoyant une telle attribution. L’analyse de cette décision impose d’examiner l’imputabilité de l’acte litigieux avant d’aborder les conditions strictes de la responsabilité pour une prétendue carence de surveillance.

I. Le rejet de l’imputabilité des actes d’un organisme privé à l’Union

A. Une mission de contrôle exercée de manière autonome par l’organisme tiers     La Cour précise que les organismes chargés de la certification biologique dans les pays tiers agissent selon un cadre réglementaire spécifique et technique. Elle souligne que « le comportement d’un organisme de contrôle ne saurait être imputé » à l’institution car celle-ci n’exerce aucune instruction directe. Le contrôle biologique ne constitue pas une fonction publique transférée mais une activité déléguée à des prestataires choisis pour leur expertise de terrain. Cette autonomie fonctionnelle interdit de considérer le prestataire comme un simple agent administratif agissant pour le compte exclusif de l’Union.

B. Le défaut de fondement juridique pour une attribution de responsabilité     Les juges estiment qu’aucune disposition du droit de l’Union ne permet d’imputer le comportement d’un organisme tiers à l’institution de façon automatique. L’arrêt affirme que l’attribution d’une telle conduite « impliquerait que le contrôle biologique soit transféré » à l’administration elle-même en tant que fonction publique. Cette interprétation rigoureuse protège l’institution contre les risques financiers liés aux défaillances potentielles de partenaires privés intervenant sur des marchés extérieurs difficiles. Au-delà de la question de l’imputation, la juridiction confirme les critères stricts régissant l’engagement de la responsabilité pour une prétendue carence de surveillance.

II. Un encadrement strict de la responsabilité non contractuelle de l’institution

A. L’exigence d’une méconnaissance manifeste et grave du droit de l’Union     La mise en cause de l’Union requiert la preuve d’une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de protéger les particuliers. Le juge vérifie si l’institution a méconnu de manière manifeste les limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation lors de sa mission de surveillance. En l’espèce, la Cour considère que le défaut de supervision allégué ne présente pas la gravité nécessaire pour justifier l’octroi d’une indemnité compensatrice. Les droits fondamentaux invoqués par la société ne suffisent pas à établir une faute lourde en l’absence de preuve d’un manquement administratif flagrant.

B. Les limites de l’obligation de surveillance incombant à l’autorité européenne     L’administration assure une surveillance générale du système de certification mais ne peut être tenue pour responsable des erreurs individuelles commises par les organismes. Le rôle de l’institution se limite à l’agrément et au suivi des structures sans intervention directe dans le processus quotidien de délivrance des certificats. Cette solution limite la portée des recours indemnitaires en rappelant que la supervision globale du marché n’équivaut pas à une garantie contre tout aléa. La protection des intérêts financiers de l’Union prévaut ainsi sur la volonté des opérateurs privés de mutualiser les risques inhérents à leurs relations commerciales.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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