La Cour de justice des Communautés européennes a rendu un arrêt le 28 février 2008 concernant l’évaluation des incidences de projets sur l’environnement. Un litige est né de travaux de modification d’une infrastructure aéroportuaire réalisés sans étude préalable des conséquences écologiques sur la zone concernée. Les autorités avaient autorisé le chantier en s’appuyant sur une règle fixant un seuil minimal de mouvements aériens pour justifier une évaluation. Des citoyens ont contesté cette décision devant le juge administratif national en invoquant la violation des textes législatifs de l’Union européenne. La juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer pour interroger la Cour sur la conformité de ce critère chiffré restrictif. Les requérants estimaient que le droit communautaire imposait un examen global des impacts potentiels indépendamment du volume annuel de trafic aérien supplémentaire. Le problème juridique réside dans la faculté pour un État membre de limiter le contrôle environnemental à des projets atteignant un seuil quantitatif. La Cour précise que les articles de la directive « s’opposent à une réglementation nationale » qui ne retient que l’augmentation du nombre de vols. Cette décision consacre l’invalidité des seuils nationaux quantitatifs restrictifs (I) tout en affirmant l’invocabilité directe des obligations environnementales européennes (II).
I. L’invalidité des seuils nationaux quantitatifs restrictifs
A. Le non-respect des critères d’évaluation des incidences
Les juges soulignent que les dispositions européennes « s’opposent à une réglementation nationale » ignorant les critères qualitatifs de la directive au profit de chiffres. La marge de manœuvre des États membres dans la fixation des seuils demeure limitée par l’obligation de protéger l’intégrité du milieu naturel. Une approche purement quantitative méconnaît la diversité des atteintes potentielles résultant de la modification concrète d’une infrastructure aéroportuaire importante pour la région. La remise en cause de ces critères purement numériques conduit nécessairement à s’interroger sur la pertinence du seul volume de trafic aérien.
B. L’insuffisance du critère unique des mouvements aériens
L’arrêt précise qu’un projet relevant de l’annexe deux doit être soumis à une évaluation si ses incidences sont jugées potentiellement significatives. Un seuil fixe de vingt mille mouvements aériens par an constitue une condition trop restrictive pour garantir l’efficacité de la protection juridique. Cette limite arbitraire permet d’éluder systématiquement le contrôle environnemental pour de nombreux chantiers dont l’impact local pourrait pourtant s’avérer très dommageable. La Cour rappelle ainsi que l’évaluation doit porter sur l’ensemble des caractéristiques physiques et géographiques du projet de développement de l’aéroport. L’invalidation de la norme interne permet de dégager des conséquences juridiques majeures quant à la force obligatoire du droit de l’Union.
II. L’invocabilité directe des obligations environnementales européennes
A. La reconnaissance de l’effet direct des dispositions claires
La décision affirme que les dispositions relatives à l’évaluation des incidences « déploient un effet direct » invocable par les citoyens devant le juge. Cette clarté normative oblige les tribunaux à écarter les barèmes nationaux contraires aux objectifs supérieurs de la politique environnementale de l’Union. Les particuliers peuvent alors exiger que l’administration procède à un examen individuel de la situation malgré le silence des textes législatifs internes. Le principe de primauté garantit que les droits conférés par le traité reçoivent une application effective dans l’ordre juridique de chaque État. La reconnaissance de cette efficacité normative impose de définir précisément l’étendue de la mission dévolue aux instances administratives et judiciaires locales.
B. L’obligation de contrôle incombant aux autorités nationales
Les autorités compétentes ont le devoir de vérifier si les projets concernés sont « susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement » immédiat. Ce contrôle préalable constitue une garantie procédurale indispensable pour prévenir les dommages irréversibles causés par des travaux d’extension de pistes ou d’aérogares. En cas de risque avéré, la réalisation d’une étude d’impact complète devient une étape obligatoire avant toute autorisation administrative de débuter le chantier. Le respect scrupuleux de cette méthodologie assure une conciliation équilibrée entre le développement économique et la préservation nécessaire des écosystèmes fragiles.