Cour de justice de l’Union européenne, le 22 juin 2016, n°C-207/15

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision déterminante relative au régime juridique du renouvellement des marques de l’Union européenne. Le litige portait sur le refus de renouvellement d’un signe figuratif en raison d’un retard dans le versement des taxes de protection requises. Le titulaire avait contesté ce rejet devant une instance administrative, laquelle a confirmé la perte des droits par une décision du 6 septembre 2012. Un recours ultérieur a été formé devant le Tribunal de l’Union européenne qui a validé la position administrative dans un arrêt du 4 mars 2015. La Cour devait déterminer si l’administration avait l’obligation de notifier au propriétaire l’expiration de son titre avant que le délai de grâce ne commence. Le juge européen annule l’arrêt attaqué au motif que le règlement impose une information claire au profit du titulaire de la marque en cause. L’analyse portera d’abord sur la reconnaissance d’un devoir d’information à la charge de l’organisme avant d’étudier les conséquences de l’annulation de la décision.

I. La consécration d’un devoir d’information à la charge de l’organisme de régulation

A. Le fondement textuel de la notification préalable de l’expiration

L’article pertinent du règlement sur la marque de l’Union européenne prévoit que l’administration informe le titulaire de l’expiration de l’enregistrement en temps utile. Cette disposition textuelle constitue une garantie essentielle pour le propriétaire qui peut ainsi anticiper les formalités nécessaires au maintien de sa protection juridique. La Cour souligne que cette notification ne constitue pas une simple faculté mais une obligation positive dont le non-respect entache la procédure de nullité. La décision précise que « la décision de la première chambre de recours » de l’autorité compétente doit faire l’objet d’une annulation pure et simple. Cette interprétation garantit une gestion rigoureuse des délais en évitant que la négligence administrative ne porte préjudice aux intérêts économiques des acteurs privés.

B. La sauvegarde de la sécurité juridique des titulaires de droits protégés

Le respect de cette formalité participe directement à l’exigence de sécurité juridique et à la protection de la confiance légitime des opérateurs du marché. En omettant d’informer le titulaire, l’administration rompt l’équilibre nécessaire entre la rigueur des délais de paiement et le droit au maintien du titre. Le juge considère que l’absence de rappel individuel empêche le propriétaire d’exercer ses droits de manière effective durant la période précédant l’expiration définitive. Cette position renforce la responsabilité de l’autorité qui doit veiller à la bonne information des usagers du système de la propriété intellectuelle. Le rappel de l’expiration devient ainsi une étape indispensable pour valider légalement le constat de la déchéance d’un signe distinctif protégé par le droit. Cette reconnaissance d’une obligation d’information préalable par le juge européen conduit naturellement à s’interroger sur les sanctions juridiques découlant de sa méconnaissance.

II. La sanction de la méconnaissance des garanties de procédure par le juge

A. L’erreur de droit commise par le Tribunal de l’Union européenne

Le Tribunal de l’Union européenne avait initialement considéré que l’absence de notification n’affectait pas la légalité de la décision de rejet du renouvellement sollicité. Cette interprétation erronée des textes a conduit la Cour de justice à censurer le raisonnement tenu en première instance par la juridiction subordonnée. Le juge d’appel estime que le Tribunal a méconnu la portée de l’obligation de notification en ne sanctionnant pas l’omission fautive de l’administration concernée. L’arrêt du 4 mars 2015 est donc annulé car il reposait sur une lecture restrictive des garanties offertes aux titulaires de marques enregistrées. Cette censure rétablit une hiérarchie claire des normes en imposant le respect des formes protectrices prévues par le législateur de l’Union européenne.

B. Le rétablissement de la situation juridique du demandeur au pourvoi

L’annulation prononcée entraîne la disparition rétroactive de la décision de la chambre de recours et impose un nouvel examen de la situation du titulaire. L’administration se voit condamnée aux dépens, ce qui souligne le caractère fautif de son comportement procédural durant l’intégralité de la phase contentieuse. La Cour ordonne que l’organisme supporte « ses propres dépens, ceux exposés par » le demandeur, relatifs tant à la première instance qu’au pourvoi. Cette issue permet au propriétaire de solliciter à nouveau le renouvellement de son signe en tenant compte de l’irrégularité commise initialement par l’administration. La jurisprudence affirme ainsi la primauté des droits de la défense et des règles de forme sur les impératifs de pure célérité de l’action administrative.

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Hassan KOHEN
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