Cour de justice de l’Union européenne, le 22 juin 2016, n°C-419/15

La Cour de justice de l’Union européenne, le 22 juin 2016, précise les droits du titulaire d’une licence de dessin ou modèle communautaire. Un litige opposait un licencié à un tiers soupçonné de contrefaçon devant l’Oberlandesgericht de Düsseldorf. Le défendeur contestait la recevabilité de l’action car le contrat de licence ne figurait pas au registre officiel. La juridiction de renvoi interrogeait alors la Cour sur l’interprétation du règlement numéro 6/2002 concernant l’inscription obligatoire des actes. Il s’agissait de déterminer si l’absence de publicité interdisait au licencié d’exercer les droits attachés à son contrat. La Cour affirme que le texte « doit être interprété en ce sens que le licencié peut agir en contrefaçon […] bien que cette dernière n’ait pas été inscrite ». Cette solution permet également au licencié de « réclamer la réparation du préjudice qui lui est propre ». L’étude de cette décision impose d’envisager la recevabilité de l’action avant d’analyser l’étendue de la réparation.

I. La recevabilité de l’action en contrefaçon indépendante de l’inscription

A. Une interprétation littérale favorable au licencié

La Cour fonde son raisonnement sur une lecture stricte de l’article 33 paragraphe 2 du règlement précité. Les formalités d’inscription concernent uniquement l’opposabilité des actes de disposition vis-à-vis des tiers acquéreurs de droits. L’absence de publicité ne saurait donc paralyser l’exercice d’une action judiciaire dirigée contre un contrefacteur. Cette interprétation garantit au bénéficiaire d’un contrat de licence une protection effective dès la signature de la convention. Le juge précise que l’article « doit être interprété en ce sens que le licencié peut agir en contrefaçon […] bien que cette dernière n’ait pas été inscrite au registre ».

B. La protection du droit de propriété industrielle contre les tiers

Le contrefacteur ne peut être assimilé à un tiers ayant acquis des droits sur le dessin ou modèle au sens de la législation. La protection du titulaire légitime et de ses ayants droit prime sur les formalités administratives de gestion du registre. L’inscription n’est pas une condition de naissance du droit d’agir mais une simple mesure d’information. Cette distinction fondamentale entre l’opposabilité contractuelle et l’action délictuelle renforce la position du licencié. La solution retenue favorise une lutte rapide contre les atteintes aux droits de propriété industrielle. L’admission de l’action permet ensuite d’aborder la question des dommages subis par l’exploitant.

II. La consécration d’un droit propre à réparation du préjudice

A. L’admission d’une demande indemnitaire autonome

Le règlement permet au licencié d’intervenir dans une instance ou d’agir directement sous certaines conditions précises. La Cour précise que cette faculté inclut la possibilité de solliciter des dommages et intérêts personnels. Le licencié subit souvent une perte commerciale directe résultant de la présence de produits contrefaisants. Le juge énonce que le texte « doit être interprété en ce sens que le licencié peut […] réclamer la réparation du préjudice qui lui est propre ». Cette reconnaissance assure une compensation intégrale des pertes économiques subies par l’exploitant réel.

B. L’uniformisation de la protection judiciaire au sein du marché unique

Cette décision clarifie la portée des articles 32 et 33 en harmonisant les conditions d’exercice des actions en justice. Elle évite que des divergences nationales sur les effets de l’inscription ne nuisent à l’unité du titre communautaire. La valeur de cet arrêt réside dans sa volonté de simplifier les démarches contentieuses pour les acteurs économiques. La portée de la solution s’étend à l’ensemble des licences, augmentant ainsi les risques pour les contrefacteurs. Le renforcement de la sécurité juridique encourage l’exploitation commerciale des créations par le biais de contrats.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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