La Cour de justice de l’Union européenne, en sa neuvième chambre, a rendu un arrêt portant sur l’interprétation des directives 83/189 et 98/34. Le litige oppose une société commerciale exploitant des jeux en ligne à une entité publique titulaire de droits exclusifs sur le territoire national.
Un club de football et sa société de gestion ont signé un contrat de parrainage afin de promouvoir les activités de l’opérateur de jeux. L’organisme de droit public a sollicité la nullité de cette convention ainsi que l’interdiction de toute promotion publicitaire pour l’activité de l’opérateur.
La juridiction de premier ressort a accueilli partiellement les demandes de l’entité publique avant que l’affaire ne soit portée devant les juges d’appel. La Cour d’appel de Guimarães a confirmé la décision initiale le 7 avril 2016, provoquant un pourvoi devant la Cour suprême du Portugal.
Saisie du litige, la haute juridiction a décidé de surseoir à statuer le 16 mars 2017 afin d’interroger le juge européen sur ces réglementations. Il s’agit de savoir si une législation réservant l’exploitation des jeux ou l’étendant à l’internet constitue une règle technique soumise à notification.
La juridiction décide que l’organisation générale des concessions échappe à cette qualification contrairement aux règles ciblant spécifiquement les services de la société de l’information. L’analyse portera d’abord sur l’exclusion des régimes généraux de cette qualification avant d’étudier l’inclusion spécifique des services numériques non notifiés.
I. La délimitation négative de la règle technique face aux régimes généraux d’exploitation des jeux
A. L’absence de spécification relative aux caractéristiques physiques ou qualitatives des produits
Le juge européen vérifie si une loi réservant l’exploitation des jeux de hasard à l’État définit les caractéristiques requises pour un produit quelconque. Selon la directive 83/189, une « spécification technique » doit figurer dans un document précisant les niveaux de qualité ou la sécurité d’un produit.
Or, les dispositions prévoyant un régime de concession pour l’exploitation des jeux de hasard n’ont aucun trait aux caractéristiques intrinsèques des marchandises. Ces mesures ne sauraient dès lors être qualifiées de règles techniques dans la mesure où elles ne régissent pas la fabrication ou la commercialisation.
B. Le maintien de la compétence étatique sur l’organisation organique et spatiale des concessions
La réglementation nationale définit les conditions et les zones géographiques d’exercice pour les entreprises constituées sous la forme de sociétés anonymes. La Cour estime que l’établissement de zones de jeux permanentes relève de l’organisation administrative souveraine des États membres sur leur propre territoire.
Ainsi, l’absence de notification à la Commission européenne ne saurait rendre ces dispositions inapplicables aux particuliers agissant dans ce secteur d’activité. L’étude de la nature des prescriptions nationales permet désormais d’analyser le traitement spécifique réservé à l’extension des droits exclusifs sur les réseaux électroniques.
II. L’inclusion des services en ligne dans le champ de la directive et la sanction du défaut de notification
A. La reconnaissance d’une règle relative aux services de la société de l’information
La Cour relève que les dispositions visent spécifiquement des prestations fournies à distance, par voie électronique, à la demande individuelle d’un destinataire. L’attribution d’une exclusivité d’exploitation sur Internet interdit la fourniture de ces services à tout autre opérateur économique au sein du marché intérieur.
Une telle mesure constitue donc des « dispositions législatives […] interdisant de fournir […] un service » relevant de la notion de « règle technique ». Cette interprétation assure la protection de la libre circulation contre les réglementations nationales risquant de fragmenter de nouveau l’espace économique commun.
B. L’inopposabilité des dispositions non notifiées résultant d’un vice de procédure substantiel
L’obligation de communication immédiate à la Commission représente un moyen essentiel pour garantir le contrôle des restrictions injustifiées à la liberté d’établissement. La méconnaissance de cette formalité constitue un vice de procédure substantiel qui prive la réglementation de toute force obligatoire envers les citoyens.
Par conséquent, le juge national doit refuser d’appliquer une règle technique interne n’ayant pas fait l’objet d’une transmission préalable aux instances européennes. Cette sanction garantit l’efficacité du droit de l’Union face aux législations étatiques qui entraveraient le développement des services de la société de l’information.