Cour de justice de l’Union européenne, le 23 janvier 2014, n°C-371/12

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 23 janvier 2014, une décision concernant l’indemnisation des préjudices issus d’accidents de la circulation. Cet arrêt précise la marge de manœuvre dont disposent les autorités nationales pour fixer les modalités de calcul des dommages et intérêts.

Le 21 septembre 2007, une collision par l’arrière a causé des lésions corporelles légères au conducteur du véhicule percuté par un tiers responsable. La victime a alors sollicité la condamnation de l’assureur au versement d’indemnités pour ses préjudices patrimoniaux ainsi que pour ses préjudices extrapatrimoniaux.

Le Tribunale di Tivoli a relevé que le code des assurances national limite l’indemnisation des lésions légères par rapport au régime de droit civil commun. Le juge italien s’interroge sur la compatibilité de ces critères restrictifs avec les directives européennes relatives à l’assurance de la responsabilité civile automobile.

La question posée est de savoir si le droit de l’Union interdit de prévoir un régime d’indemnisation moins favorable pour les seuls sinistres routiers. La Cour juge que les directives ne s’opposent pas à une telle législation nationale tant que le droit à réparation demeure effectif. L’étude de cette solution conduit à examiner l’autonomie des États membres avant d’analyser l’encadrement européen du droit à l’indemnisation des victimes.

I. La consécration de la compétence nationale pour l’évaluation des préjudices corporels

A. La distinction entre l’obligation de garantie et l’étendue de l’indemnisation

La Cour souligne que « l’obligation de couverture par l’assurance de la responsabilité civile est distincte de l’étendue de l’indemnisation de ces dommages ». Tandis que la première est garantie par la réglementation européenne, la seconde demeure régie par les dispositions du droit national interne. En l’état actuel du droit, les directives ne visent pas à harmoniser les régimes de responsabilité civile au sein de l’espace européen. Les instances nationales restent donc libres de définir les préjudices réparables ainsi que les modalités précises de leur prise en charge financière.

B. La liberté des États dans la définition des modalités de calcul

Les autorités nationales peuvent instaurer des critères contraignants pour déterminer les sommes versées au titre des préjudices immatériels subis par les victimes. La Cour admet que « ces directives ne s’opposent pas à une législation nationale imposant aux juridictions des critères contraignants pour la détermination des préjudices ». Cette faculté permet aux États de créer des régimes spécifiques adaptés aux particularités des accidents routiers malgré une différence de traitement potentiel. L’existence d’un mode de calcul moins favorable que le droit commun ne constitue pas, en soi, une violation des obligations communautaires.

II. Le respect impératif de la substance du droit à réparation des victimes

A. L’exigence de couverture des dommages immatériels par l’assurance obligatoire

La notion de dommages corporels inclut tout préjudice résultant d’une atteinte à l’intégrité de la personne, ce qui comprend les souffrances physiques ou psychologiques. L’assurance obligatoire doit impérativement couvrir les préjudices immatériels dont l’indemnisation est prévue par le droit national applicable à la responsabilité civile de l’assuré. Les États membres doivent ainsi garantir que la couverture de la responsabilité civile déterminée par leur droit interne soit conforme aux exigences européennes. Le préjudice moral fait partie intégrante des dommages qui doivent être réparés selon l’interprétation constante fournie par la juridiction de Luxembourg.

B. L’interdiction des limitations disproportionnées privant les directives d’effet utile

Les dispositions législatives nationales ne doivent pas avoir pour effet d’exclure d’office ou de limiter de manière disproportionnée le droit à l’indemnisation. Le juge doit vérifier que « la garantie prévue par le droit de l’Union que la responsabilité civile soit couverte par une assurance » n’est pas affectée. Dans l’espèce traitée par le Tribunale di Tivoli, l’indemnisation reste accordée et demeure proportionnée à la gravité réelle des lésions subies par l’usager. Le régime particulier permet au magistrat d’adapter le montant alloué en fonction des circonstances subjectives propres à chaque situation de fait.

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Hassan KOHEN
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