La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt du 12 décembre 2024, définit le régime de protection des marques de position. Une demande d’enregistrement visait un signe consistant en la disposition d’un insert cylindrique coloré situé au sein d’un mécanisme sanitaire. L’office compétent a refusé l’enregistrement au motif que le signe ne permettait pas de distinguer l’origine commerciale des produits visés. Le Tribunal de l’Union européenne, le 7 décembre 2022, a rejeté le recours en estimant que la marque se confondait avec l’apparence des produits. Un pourvoi a été introduit pour contester la méthode d’évaluation du caractère distinctif appliquée par les juges de première instance. La question de droit porte sur l’autonomie du signe de position par rapport à la structure matérielle du produit qu’il revêt. La Cour de justice annule l’arrêt pour erreur de droit car le Tribunal n’a pas correctement justifié l’absence d’indépendance du signe. L’étude de la décision s’attachera à l’assimilation du signe à la forme du produit avant d’analyser la rectification opérée par le juge européen.
I. Une appréciation rigoureuse du caractère distinctif des marques de position
A. L’assimilation du signe à l’apparence structurelle du produit
Le Tribunal a considéré que la marque de position devait suivre les mêmes exigences de distinctivité que les marques de forme habituelles. Cette règle impose que le signe « diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur » pour être enregistré. Le juge a estimé que l’insert cylindrique constituait une simple variante technique ne pouvant pas être perçue comme une indication de provenance. L’intégration physique de l’élément au cœur du dispositif sanitaire a conduit à nier toute autonomie visuelle pour le public européen concerné.
B. L’exigence d’une divergence significative par rapport aux normes
La perception du public pertinent joue un rôle déterminant pour établir si un signe remplit sa fonction essentielle de garantie d’origine. Il est admis que les acheteurs ne présument pas la provenance d’un bien en se fondant sur des éléments purement structurels ou fonctionnels. Le Tribunal a conclu que le consommateur ne verrait dans cet agencement qu’une composante utilitaire dépourvue de toute valeur de message commercial. Cette interprétation restrictive des juges de première instance appelle nécessairement une intervention correctrice de la juridiction suprême de l’Union européenne.
II. La correction d’une erreur de qualification juridique par le juge
A. La reconnaissance de l’autonomie visuelle de la marque de position
La Cour de justice censure le raisonnement suivi en relevant que la marque de position ne se confond pas nécessairement avec l’apparence. Le Tribunal a commis une erreur en affirmant que le signe n’était pas indépendant sans vérifier si le public l’identifiait distinctement. Il convient de rechercher si la « représentation d’un insert sanitaire cylindrique » est perçue comme un ajout arbitraire sur le support technique. L’omission de cette distinction fondamentale fausse l’évaluation du caractère distinctif en l’assimilant à une simple analyse de la forme globale.
B. Les conséquences du renvoi pour l’examen du caractère distinctif
L’annulation de l’arrêt entraîne le renvoi du litige devant le Tribunal pour qu’une nouvelle appréciation souveraine des faits soit effectuée. Cette solution rappelle que les marques non traditionnelles bénéficient d’un droit à une analyse spécifique tenant compte de leur nature propre. L’exigence de motivation est renforcée pour les offices qui doivent désormais mieux justifier le refus de signes intégrés aux produits manufacturés. Le droit des marques évolue ainsi vers une reconnaissance plus large de la créativité commerciale au sein des marchés techniques européens.