La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 23 mars 2023, précise l’étendue du contrôle exercé par l’autorité d’exécution d’un mandat d’arrêt européen. Le litige concerne des personnes condamnées initialement avec sursis, dont l’exécution de la peine fut ordonnée suite à de nouvelles condamnations prononcées par défaut. La juridiction de renvoi interroge la Cour sur l’application de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584 aux procédures ayant entraîné cette révocation.
Dans les affaires jointes, les intéressés furent condamnés en leur présence à des peines d’emprisonnement assorties d’un sursis probatoire par des juridictions hongroise et polonaise. Des infractions commises durant la période de mise à l’épreuve entraînèrent des condamnations ultérieures par défaut ainsi que la révocation des sursis prononcés initialement. Les autorités d’émission sollicitèrent la remise des condamnés, localisés en Irlande, pour l’exécution des peines fermes résultant de la défaillance des mesures de sûreté. La Court of Appeal d’Irlande sursoit à statuer afin de déterminer si ces procédures par défaut font partie du procès menant à la décision.
Le problème de droit réside dans la qualification des décisions de condamnation ultérieure et de révocation du sursis au regard de l’obligation de présence au procès. La Cour de justice dit pour droit que la condamnation pénale prononcée par défaut, déterminante pour l’émission du mandat, constitue une décision au sens de la législation. En revanche, l’ordonnance de révocation du sursis ne relève pas de cette catégorie protectrice de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584. L’inclusion de la seconde condamnation dans le périmètre du contrôle juridictionnel s’accompagne d’un régime strict limitant les facultés de refus d’exécution du juge.
I. L’inclusion de la condamnation déterminante dans le champ du contrôle juridictionnel
A. L’assimilation de la seconde condamnation à la notion de décision
La Cour définit le « procès qui a mené à la décision » comme la procédure ayant conduit à la « décision judiciaire ayant définitivement condamné la personne » dont la remise est sollicitée. Cette notion englobe toute procédure par défaut aboutissant à une condamnation pénale sans laquelle le mandat d’arrêt européen n’aurait pas pu être émis. La seconde condamnation constitue un élément nécessaire à l’émission du titre dès lors qu’elle provoque la révocation obligatoire ou facultative du sursis initial. Une décision judiciaire adoptée par défaut doit être considérée comme une décision au sens de l’article 4 bis lorsque son adoption s’avère déterminante.
B. La protection renforcée des droits fondamentaux de la défense
Le droit du prévenu d’assister à son procès revêt une importance capitale pour le respect du droit à un procès équitable garanti par la Charte. L’autorité judiciaire d’exécution doit pouvoir apprécier si la remise de l’intéressé n’implique pas une violation grave des droits garantis aux articles 47 et 48. La protection de la législation européenne perdrait son effectivité si le contrôle se limitait strictement à la décision fixant initialement le quantum de la peine. L’interprétation retenue assure un niveau de protection conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de condamnations par défaut.
II. L’exclusion de la décision de révocation et les limites du refus d’exécution
A. La nature procédurale de la décision révoquant le sursis
Une mesure relative à l’exécution d’une peine privative de liberté prononcée antérieurement ne constitue pas une décision au sens de l’article 4 bis. La révocation d’un sursis suite à une nouvelle infraction « laisse inchangée cette peine en ce qui concerne tant sa nature que son quantum ». Le juge de la révocation n’est pas appelé à réexaminer le fond de l’affaire ayant donné lieu à la condamnation pénale définitive du sujet recherché. Les procédures relatives aux seules modalités d’exécution des peines ne relèvent pas du volet pénal de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
B. L’encadrement des prérogatives de l’autorité d’exécution
L’autorité d’exécution peut refuser la remise si le mandat ne mentionne aucune des garanties de l’article 4 bis concernant la seconde condamnation prononcée par défaut. Néanmoins, elle ne saurait subordonner la remise à l’assurance d’un nouveau procès pour la décision de révocation du sursis ou pour la condamnation ultérieure. Une telle condition ne figure pas parmi celles « limitativement prévues à l’article 5 » de la décision-cadre régissant la remise entre les États membres de l’Union. La coopération judiciaire repose sur un degré de confiance élevé qui s’oppose à la création de motifs de refus non prévus par le législateur européen.