Cour de justice de l’Union européenne, le 24 février 2022, n°C-536/20

Un consommateur a fait l’acquisition en ligne d’un billet pour une manifestation culturelle programmée pour le 20 janvier 2018. L’événement a été annulé et l’acheteur a sollicité le remboursement intégral du prix auprès de la plateforme de vente. La société distributrice a refusé cette demande en invoquant son simple statut d’intermédiaire pour le compte de l’organisateur de la manifestation. Le Tribunal de district de Vilnius a condamné solidairement le distributeur et l’organisateur par un jugement rendu le 8 octobre 2018. La Cour régionale de Vilnius a confirmé cette solution avant que la Cour suprême de Lituanie ne soit saisie d’un pourvoi. Cette juridiction a décidé de surseoir à statuer pour interroger la Cour de justice de l’Union européenne par voie préjudicielle. Le litige porte sur la définition du professionnel et sur la validité de l’information fournie par des conditions générales dématérialisées. La Cour de justice affirme que l’intermédiaire agissant pour un tiers répond à la qualification de professionnel au sens de la directive. Elle valide l’information précontractuelle par clic tout en rappelant l’exigence d’un support durable pour la confirmation ultérieure du contrat.

I. L’assimilation de l’intermédiaire à la catégorie juridique de professionnel

A. L’extension de la qualification aux mandataires de vente

La Cour interprète largement l’article 2 de la directive relative aux droits des consommateurs pour assurer une protection juridique efficace. Elle juge que constitue un professionnel « la personne physique ou morale agissant en tant qu’intermédiaire, au nom ou pour le compte » d’un tiers. Cette approche fonctionnelle empêche les prestataires de se soustraire à leurs obligations en invoquant un simple mandat de distribution commerciale. L’intermédiaire participe activement à la formation du contrat et influence directement la décision d’achat du consommateur final par son interface. La protection européenne s’applique dès lors qu’une entité agit dans le cadre d’une activité commerciale ou libérale habituelle et organisée.

B. La reconnaissance d’une dualité de débiteurs d’obligations

La solution retenue permet au consommateur de bénéficier de plusieurs débiteurs responsables du respect des obligations d’information prévues par la loi. La Cour précise que « l’intermédiaire et le commerçant principal peuvent tous deux être qualifiés de professionnels » sans preuve d’une double prestation. Cette pluralité renforce la sécurité de l’acheteur qui peut se retourner contre son interlocuteur direct lors de la transaction numérique. La directive ne règle pas la répartition finale de la charge d’indemnisation entre les différents intervenants économiques à la vente. Le droit national demeure compétent pour définir les règles relatives à la validité des contrats et à la représentation légale des parties.

L’élargissement du champ des responsables facilite l’exercice des droits mais suppose également une information rigoureuse du contractant le plus faible.

II. La validité conditionnelle des supports d’information dématérialisés

A. L’admission de l’information précontractuelle par voie électronique

L’article 6 impose au professionnel de fournir des informations claires et compréhensibles avant que l’acheteur ne soit lié par un contrat. La juridiction européenne admet que ces données figurent exclusivement dans les conditions générales de la prestation de services de la plateforme. Le procédé consistant à cocher une case pour accepter les clauses contractuelles satisfait aux exigences de la communication précontractuelle obligatoire. Cette modalité doit permettre au client de prendre connaissance des informations de manière effective avant de procéder au règlement du prix. Le juge national vérifie si la présentation des textes sur le site internet garantit une lisibilité optimale pour l’utilisateur moyen.

B. L’exigence impérative d’un support durable pour la confirmation

La confirmation du contrat exige la remise d’un document sur un support durable après la finalisation de la commande en ligne. Les informations figurant sur un site internet ne constituent pas un support durable car elles ne sont pas adressées personnellement. L’instrument utilisé doit permettre au consommateur de « stocker des informations qui lui sont adressées personnellement » pour s’y reporter ultérieurement. La Cour souligne que la méconnaissance de cette obligation de forme ne prive pas les informations de leur valeur contractuelle intégrale. Le défaut de remise d’une confirmation conforme peut toutefois entraîner des sanctions spécifiques prévues par les législations nationales de protection.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture