Cour de justice de l’Union européenne, le 24 novembre 2016, n°C-662/15

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 24 novembre 2016, précise les obligations pesant sur les importateurs parallèles.

Le litige porte sur l’étiquetage de pansements chirurgicaux de classe I bénéficiant déjà d’un marquage de conformité apposé par le fabricant initial.

Une société importe ces dispositifs médicaux en Allemagne et y appose une étiquette contenant ses coordonnées ainsi qu’un nouveau numéro pharmacologique central.

Le créateur des produits estime que cette modification de l’emballage impose à l’importateur de procéder à une évaluation de conformité complémentaire.

La Cour d’appel de Düsseldorf, saisie le 7 décembre 2015, surseoit à statuer pour interroger la Cour sur l’interprétation de la directive 93/42.

La question posée tend à savoir si l’ajout de données d’identification par un importateur exige une nouvelle procédure d’évaluation de conformité.

Le juge européen considère que l’importateur parallèle ne peut être assimilé au fabricant lorsqu’il ne commercialise pas le produit en nom propre.

Il conclut qu’une nouvelle évaluation destinée à attester la conformité des informations ajoutées n’est pas imposée par les dispositions européennes en vigueur.

Le raisonnement de la Cour s’articule autour de l’exclusion de la qualification de fabricant avant d’analyser la primauté de la libre circulation.

I. L’exclusion de la qualification de fabricant pour l’importateur parallèle

A. L’interprétation stricte du critère de la mise sur le marché

L’article premier de la directive définit le fabricant comme la personne responsable de la conception et de l’étiquetage du dispositif médical.

La Cour souligne que cette définition vise les entités mettant un produit sur le marché « en leur propre nom » uniquement.

L’importateur achète des dispositifs déjà commercialisés par leur producteur pour les revendre sous le nom de ce dernier sans altérer le conditionnement.

L’apposition d’une étiquette désignant le responsable de la mise sur le marché local ne suffit pas à caractériser une action en nom propre.

Cette exclusion de la responsabilité propre au fabricant entraîne mécaniquement l’absence d’obligations relatives à l’évaluation complémentaire de conformité.

B. L’absence d’obligation d’évaluation de conformité complémentaire

L’obligation de procéder à l’évaluation de conformité prévue à l’article 11 s’adresse exclusivement aux seuls fabricants reconnus par la réglementation.

L’importateur parallèle ne saurait être tenu de soumettre les produits à une nouvelle procédure dès lors qu’il ne modifie pas l’identité du fabricant.

Le juge affirme que cet opérateur « ne saurait être considéré comme relevant de l’article 1er, paragraphe 2, sous f), de la directive ».

La solution garantit que les entreprises ne subissent pas de charges administratives redondantes pour de simples mentions accessoires sur l’emballage extérieur.

Si l’importateur échappe aux contraintes du fabricant, la solution repose essentiellement sur la confiance légitime accordée au marquage européen original.

II. La présomption de conformité au service de la libre circulation

A. La force probante du marquage CE original

Le marquage CE indique que les dispositifs ont été soumis à une évaluation et qu’ils satisfont aux exigences essentielles de sécurité.

Les produits certifiés bénéficient d’une présomption de conformité permettant leur circulation sans obstacle technique injustifié au sein du marché intérieur.

Un État membre ne peut exiger qu’un tel produit soit à nouveau soumis à une procédure complexe pour de simples ajouts d’identification.

La directive n’envisage d’ailleurs aucun mécanisme de contrôle de conformité venant s’ajouter ou compléter ceux déjà prévus par l’harmonisation communautaire.

Toutefois, la liberté de circulation ne s’oppose pas au maintien d’une surveillance rigoureuse de la sécurité des patients et des utilisateurs.

B. L’efficience des mécanismes de vigilance et de sauvegarde

La protection de la santé publique est assurée par des procédures de sauvegarde permettant de retirer du marché les dispositifs dangereux.

L’article 10 prévoit un recensement centralisé des incidents liés à toute « inadéquation de l’étiquetage » susceptible d’entraîner une dégradation de la santé.

Ces dispositifs de veille sanitaire permettent de protéger les personnes tout en limitant les entraves excessives à la liberté du commerce.

Le juge européen privilégie ainsi une approche proportionnée évitant de transformer chaque importateur en fabricant lors de modifications accessoires de l’étiquetage.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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