Cour de justice de l’Union européenne, le 26 avril 2012, n°C-92/12

La Cour de justice de l’Union européenne, le 26 mars 2012, précise l’application du règlement relatif à la compétence et l’exécution des décisions en matière de responsabilité parentale. Cette décision traite du placement d’un mineur dans un établissement fermé situé dans un autre État membre pour des motifs thérapeutiques. Un enfant de nationalité irlandaise, résidant habituellement dans son pays d’origine, présente une vulnérabilité extrême caractérisée par des comportements d’autodestruction violents. L’autorité publique en charge de sa protection constate l’échec des structures locales et envisage son transfert vers une unité de soins sécurisée à Londres. La High Court de Dublin ordonne ce placement à titre provisoire tout en s’interrogeant sur la validité de l’approbation étrangère obtenue. Elle sursoit à statuer pour interroger la Cour sur la soumission d’une telle privation de liberté au cadre juridique européen. Le problème juridique porte sur le point de savoir si le placement thérapeutique forcé relève de la responsabilité parentale et quelles formalités conditionnent son exécution. La Cour affirme que cette mesure relève du règlement et impose une approbation préalable par une autorité publique ainsi qu’une déclaration de force exécutoire.

I. L’inclusion du placement privatif de liberté dans le champ d’application du règlement

La Cour retient une interprétation téléologique des textes pour inclure les mesures de protection les plus contraignantes dans le domaine de la responsabilité parentale.

A. Une interprétation extensive de la notion de responsabilité parentale

Le règlement s’applique aux matières civiles concernant l’attribution ou l’exercice de la responsabilité parentale selon les termes de l’article premier. La Cour souligne que « la notion de responsabilité parentale fait l’objet d’une définition large » englobant le droit de décider du lieu de résidence. Le texte vise explicitement à l’article premier paragraphe 2 sous d) « le placement de l’enfant dans une famille d’accueil ou dans un établissement ». L’absence de mention spécifique de la privation de liberté ne saurait exclure ces décisions du bénéfice des garanties offertes par le droit européen. Cette lecture garantit l’égalité de tous les mineurs indépendamment de la gravité de leur situation clinique ou comportementale. La mesure de placement vise ici le bien-être et la protection de la personne plutôt que l’administration d’une sanction.

B. L’exclusion limitée aux seules mesures de nature pénale

L’article premier paragraphe 3 définit limitativement les matières exclues du champ d’application, notamment les mesures prises à la suite d’infractions pénales. La Cour précise qu’une « décision qui prévoit le placement d’un enfant dans un établissement de soins fermé relève du champ d’application matériel » du texte. Le critère de distinction repose sur la finalité de la mesure, laquelle doit être protectrice et non punitive pour le mineur concerné. La privation de liberté n’est qu’une modalité technique de l’exercice du droit de garde au sens de la législation européenne. Le juge souligne que toute autre interprétation priverait les enfants les plus vulnérables de la protection uniforme instaurée par l’Union européenne. La nature publique ou privée de l’organisme demandeur n’influence pas cette qualification juridique fondamentale en matière de coopération judiciaire. L’efficacité du transfert repose sur le respect de garanties strictes destinées à protéger les droits fondamentaux du mineur dans l’État de destination.

II. L’encadrement procédural rigoureux du placement transfrontalier

L’efficacité du transfert repose sur le respect de garanties strictes destinées à protéger les droits fondamentaux du mineur dans l’État de destination.

A. L’exigence impérative d’une approbation par une autorité publique

L’article 56 subordonne la décision de placement à l’approbation préalable de l’autorité compétente de l’État membre requis pour les cas d’intervention publique. La Cour affirme que « l’approbation visée à l’article 56 paragraphe 2 doit être donnée par une autorité compétente relevant du droit public ». Un établissement de soins tirant profit de l’accueil du mineur ne peut valablement se prononcer de manière indépendante sur l’intérêt supérieur. Cette exigence de contrôle étatique constitue une mesure de protection essentielle contre les risques d’arbitraire ou de conflits d’intérêts financiers. La sécurité juridique impose aux États de désigner clairement les interlocuteurs capables de valider ces mesures dans des délais très brefs. Une régularisation reste toutefois possible si le juge a cru de bonne foi disposer d’un accord valable lors de sa décision initiale. Bien que les décisions soient reconnues de plein droit, leur mise en œuvre sous la contrainte nécessite une déclaration constatant la force exécutoire.

B. La nécessité d’une déclaration de force exécutoire pour l’exécution forcée

L’article 28 dispose que les décisions exécutoires dans un État membre sont mises en exécution dans un autre après y avoir été déclarées exécutoires. La Cour rappelle que « le placement forcé concerne le droit fondamental à la liberté » garanti par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Cette procédure d’exequatur simplifiée assure un équilibre entre l’urgence de la situation sanitaire et le respect des libertés individuelles du mineur. Le juge de l’exécution doit statuer avec une célérité particulière pour ne pas priver le dispositif de son effet utile immédiat. Les recours éventuels contre cette déclaration ne sauraient suspendre l’exécution d’une mesure dont l’urgence thérapeutique est médicalement établie.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture