La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 26 avril 2018, a précisé les obligations environnementales liées à la directive sur les oiseaux.
Le litige porte sur le refus d’un État membre de classer un massif montagneux entier en zone de protection spéciale malgré sa richesse écologique reconnue scientifiquement.
L’institution requérante a introduit un recours en manquement après avoir constaté que la délimitation opérée par les autorités nationales demeurait manifestement insuffisante par rapport aux inventaires.
Le juge européen doit décider si l’omission d’une fraction d’un site ornithologique majeur constitue une violation caractérisée des engagements pris par l’État membre en cause.
La Cour affirme qu’en « ayant omis d’inclure l’intégralité de la zone importante pour la conservation des oiseaux », l’État a méconnu les dispositions impératives du droit de l’Union.
L’examen de cette décision commande d’analyser l’exigence de classement intégral des territoires appropriés avant d’étudier l’encadrement du pouvoir discrétionnaire des autorités nationales en la matière.
I. L’exigence de classement intégral des territoires ornithologiques appropriés
A. La primauté des critères scientifiques dans la délimitation des zones
L’identification des territoires les plus appropriés pour la sauvegarde des espèces menacées repose sur des données techniques objectives fournies par les inventaires ornithologiques de référence.
Le juge rappelle que les zones importantes pour la conservation des oiseaux constituent une base scientifique essentielle pour définir l’étendue géographique des zones de protection spéciale.
L’État membre ne saurait s’écarter de ces inventaires sans produire des preuves scientifiques contradictoires démontrant que certains secteurs ne justifient pas une protection réglementaire spécifique.
La décision souligne que le défaut de classement de l’intégralité d’un site reconnu scientifiquement compromet l’objectif de préservation durable fixé par le législateur de l’Union.
B. La caractérisation du manquement par l’insuffisance du périmètre protégé
Le manquement est établi dès lors que le territoire classé ne couvre pas la superficie nécessaire à la survie et à la reproduction effective des populations d’oiseaux.
La juridiction européenne estime que « l’État membre n’a pas classé les territoires les plus appropriés en nombre et en superficie » pour assurer une conservation biologique suffisante.
Cette insuffisance géographique constitue une violation directe des obligations conventionnelles, indépendamment des intentions ou des difficultés administratives rencontrées par l’autorité nationale lors du classement.
La délimitation doit donc correspondre exactement aux besoins biologiques des espèces protégées, sous peine de rendre les mesures de conservation totalement inopérantes sur le terrain concerné.
II. L’encadrement strict du pouvoir discrétionnaire étatique en matière de conservation
A. L’opposabilité des inventaires scientifiques aux choix administratifs
Le pouvoir discrétionnaire de l’État dans le choix des zones à protéger est limité par l’obligation de respecter les critères techniques définis par la directive oiseaux.
Les autorités administratives ne peuvent invoquer des motifs économiques ou sociaux pour justifier la réduction du périmètre d’une zone identifiée comme étant écologiquement primordiale pour l’Europe.
Le juge s’assure ainsi que les décisions nationales de classement ne sont pas arbitraires mais fondées sur une évaluation rigoureuse et transparente de la biodiversité locale.
Cette solution renforce l’autorité juridique des travaux scientifiques, qui s’imposent désormais comme la norme de référence pour apprécier le comportement des différents États membres de l’Union.
B. La protection des espèces comme impératif de mise en œuvre du droit de l’Union
L’arrêt confirme que la préservation des espèces mentionnées à l’annexe de la directive constitue une obligation de résultat dont l’État ne peut s’affranchir sans motif sérieux.
La condamnation aux dépens illustre la volonté de la Cour de sanctionner les retards ou les omissions persistantes dans la mise en œuvre des réseaux écologiques transnationaux.
Cette jurisprudence assure une cohérence globale à la politique environnementale commune en empêchant la fragmentation des habitats naturels nécessaires à la survie de la faune sauvage.
Le maintien de l’intégrité des sites protégés devient alors le garant de l’efficacité durable des mécanismes de conservation au sein de l’espace juridique européen tout entier.