Cour de justice de l’Union européenne, le 26 juillet 2017, n°C-348/16

La Cour de justice de l’Union européenne, dans son arrêt du 26 juillet 2017, précise les contours du droit à une protection juridictionnelle effective. Un ressortissant d’un pays tiers sollicite le bénéfice de la protection internationale auprès des autorités compétentes d’un État membre. Sa demande repose exclusivement sur des considérations économiques personnelles. L’autorité administrative procède à l’audition de l’intéressé puis rejette sa requête par une décision du 5 avril 2016. Ce dernier forme alors un recours devant le Tribunale di Milano le 3 mai 2016. La juridiction saisie s’interroge sur la possibilité de statuer sans nouvelle audition dès lors que la demande apparaît manifestement infondée. Le juge italien sursoit à statuer pour interroger la Cour sur l’interprétation de la directive 2013/32 relative aux procédures communes d’octroi de la protection. La Cour répond qu’une telle dispense d’audition est possible sous réserve du respect des garanties essentielles du demandeur. L’examen des modalités de cette dispense permet de comprendre la portée du droit au recours effectif avant d’en apprécier la valeur au regard des impératifs de célérité.

**I. L’affirmation d’une procédure juridictionnelle encadrée**

*A. L’absence d’obligation systématique d’audition orale*

La Cour relève d’abord qu’aucune disposition de la directive n’impose expressément la tenue d’une audience devant la juridiction de recours. L’article 46 garantit un recours effectif comprenant « un examen complet et ex nunc tant des faits que des points d’ordre juridique ». Pour autant, cette exigence de contrôle n’implique pas nécessairement une phase orale systématique à chaque degré de la procédure. La Cour souligne que le droit d’être entendu « ne revêt pas un caractère absolu » et peut comporter certaines restrictions proportionnées. L’absence d’audition constitue certes une limite aux droits de la défense mais elle demeure admissible dans des circonstances spécifiques.

*B. Le maintien des garanties fondamentales de la défense*

La validité de cette dispense repose impérativement sur l’existence d’un entretien personnel préalable lors de la phase administrative initiale. Ce premier échange doit faire l’objet d’un rapport ou d’une transcription versée au dossier de la juridiction compétente. Ces éléments permettent au juge de vérifier le bien-fondé des motifs ayant conduit au rejet de la demande de protection. L’article 47 de la Charte des droits fondamentaux impose que la procédure respecte l’égalité des armes et l’accès au tribunal. Le cadre ainsi défini assure un équilibre entre le contrôle juridictionnel et la fluidité des procédures administratives.

**II. La conciliation entre célérité et protection juridictionnelle effective**

*A. La validation d’un modèle d’efficacité administrative*

La solution retenue valide l’objectif d’une décision rendue « aussi rapide que possible » sans nuire à la qualité de l’examen. Les États membres peuvent légitimement accélérer le traitement des demandes lorsqu’elles s’avèrent manifestement infondées ou abusives. La Cour admet que la tenue d’une audience est superflue si les données du dossier permettent de trancher adéquatement le litige. Cette approche favorise une gestion rationnelle du contentieux de l’asile tout en préservant la substance même du droit au recours. L’efficacité du système repose alors sur la pertinence des informations recueillies lors de l’instruction administrative.

*B. Les limites au pouvoir d’appréciation du juge national*

Le juge national conserve néanmoins l’obligation d’ordonner une audition s’il estime les informations recueillies en première instance insuffisantes. Il ne saurait renoncer à cette formalité pour de simples raisons de célérité si le doute persiste sur les faits. La Cour précise qu’elle ne s’oppose pas à la pratique nationale si le juge « peut ordonner une telle audition si elle l’estime nécessaire ». La protection juridictionnelle demeure donc conditionnée par la capacité du magistrat à exercer son office en toute indépendance. Cette vigilance garantit que la recherche de rapidité ne sacrifie jamais l’exigence fondamentale de justice.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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