La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt du 26 mai 2016, précise les conditions de récupération des aides agroenvironnementales indûment perçues. Le litige concerne une exploitation ayant augmenté sa surface déclarée, déclenchant ainsi un nouvel engagement de cinq ans dont la dernière échéance annuelle fut omise. L’administration nationale a exigé le remboursement total des sommes versées depuis le début de cette période quinquennale en raison de ce manquement formel. Après un recours devant les juridictions administratives, la Cour suprême de Lettonie a interrogé la juridiction européenne sur la proportionnalité de cette sanction intégrale. La question posée porte sur la validité d’une réglementation nationale imposant la restitution complète des aides malgré le respect partiel des engagements environnementaux souscrits.
I. L’exigence de conformité continue aux obligations déclaratives annuelles
A. La demande annuelle comme condition d’éligibilité impérative
L’article 66 du règlement n° 817/2004 dispose que les paiements consécutifs à la première année reposent impérativement sur une demande annuelle de paiement du soutien. Cette formalité constitue une « condition d’éligibilité au bénéfice des aides agroenvironnementales » essentielle pour assurer la vérification efficace du respect des engagements souscrits. La Cour souligne que ce dépôt annuel permet à l’organisme payeur de contrôler la continuité des pratiques respectueuses de l’environnement sur les parcelles concernées. L’absence de déclaration, même pour la dernière année, rompt le lien nécessaire entre l’aide financière et l’objectif de protection durable de l’espace naturel. Le respect des conditions d’octroi demeure de la seule responsabilité du demandeur qui ne peut invoquer un défaut d’information de l’autorité compétente.
B. L’indivisibilité temporelle et spatiale du nouvel engagement quinquennal
Le remplacement de l’engagement initial par un nouvel engagement quinquennal intervient dès lors que le bénéficiaire accroît significativement la superficie de son exploitation agricole. Selon l’article 37 du règlement précité, ce nouvel engagement « porte sur la totalité de la surface concernée » et impose des contraintes au moins équivalentes. L’agriculteur ne peut valablement prétendre avoir achevé sa période initiale de cinq ans alors qu’un nouveau cycle contractuel a juridiquement substitué le précédent. Le non-respect d’une condition d’octroi, ne serait-ce qu’une seule fois au cours de cette durée, prive rétroactivement l’ensemble des versements de leur fondement. L’obligation de respecter les méthodes de production agricole respectueuses de l’environnement doit couvrir l’intégralité de la période convenue pour justifier le soutien.
II. La licéité du remboursement intégral des aides perçues
A. La proportionnalité du remboursement face à l’objectif environnemental
La Cour juge que l’obligation de remboursement intégral n’est pas disproportionnée au regard de l’objectif de protection de l’environnement poursuivi par les règlements européens. Les paiements annuels ne présentent pas un caractère définitif tant que l’ensemble des obligations n’a pas été scrupuleusement honoré jusqu’au terme du projet. Le maintien de l’aide devient « injustifié et dépourvu de base légale » si le bénéficiaire méconnaît les règles de contrôle indispensables au système agroenvironnemental. Par ailleurs, l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux ne protège pas la détention d’une aide financière dont les conditions d’octroi sont violées. La restitution d’un paiement indu constitue la simple conséquence contractuelle et légale d’un manquement aux obligations librement souscrites par l’exploitant.
B. L’exclusion de l’équité nationale devant la primauté du droit européen
Le principe de primauté du droit de l’Union interdit aux juridictions nationales d’écarter une norme européenne au motif qu’elle heurterait le principe de proportionnalité interne. L’équité ne saurait davantage justifier une dérogation à l’application des conséquences juridiques obligatoires prévues en cas de paiement indu des fonds publics européens. Une autorité nationale ne peut renoncer à la récupération des sommes au seul motif que la règle entraînerait une rigueur excessive pour l’intéressé. La Cour rappelle qu’il n’existe pas de principe général permettant de ne pas appliquer une norme en vigueur pour des raisons de justice individuelle. La solution retenue confirme la prévalence de la rigueur budgétaire et de l’efficacité des contrôles sur les considérations particulières liées à la négligence.