Cour de justice de l’Union européenne, le 26 mars 2015, n°C-596/13

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 18 juin 2015, l’arrêt C-596/13 P relatif à la détermination de la loi applicable dans le temps. Le litige portait initialement sur une demande d’exemption temporaire aux règles d’accès des tiers pour une installation de stockage de gaz naturel. L’autorité nationale compétente avait accordé cette dérogation avant que l’institution ne conteste la décision au regard du droit de l’Union.

Un recours en annulation fut formé par la société bénéficiaire devant le Tribunal de l’Union européenne siégeant à Luxembourg contre l’acte imposant le retrait de l’exemption. Le Tribunal de l’Union européenne, par une décision T-465/11 du 7 août 2013, a fait droit à cette demande en annulant l’acte litigieux. Les juges de première instance ont estimé que l’abrogation de la directive initiale au profit d’un nouveau texte privait l’institution de sa compétence.

L’institution a alors formé un pourvoi devant la Cour de justice pour obtenir l’annulation de cet arrêt et le maintien de son pouvoir de contrôle. La question de droit posée concernait la survie des compétences décisionnelles d’une autorité lors d’un changement de cadre législatif durant une procédure administrative. La Cour de justice a infirmé la position du Tribunal en soulignant l’application immédiate des règles de procédure aux situations juridiques non encore définitivement constituées.

L’examen de cette position implique d’analyser la distinction entre les types de normes avant de préciser les conséquences sur les compétences de l’autorité.

I. L’application immédiate des dispositions procédurales

A. La distinction fondamentale entre le fond et la forme La Cour rappelle que « les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur ». Cette affirmation s’oppose au régime des « règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant pas des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur ». Le juge de l’Union consacre ainsi une séparation stricte entre les garanties substantielles et les modalités techniques d’exercice des pouvoirs publics. La sécurité juridique impose de protéger les droits matériels tout en permettant une mise en œuvre fluide des nouvelles procédures de régulation.

B. L’effet des nouvelles règles sur les situations en cours Une règle de droit nouvelle s’applique « à partir de l’entrée en vigueur de l’acte qui l’instaure aux effets futurs des situations nées sous l’empire de la loi ancienne ». En l’espèce, la procédure d’approbation d’une exemption n’était pas achevée lors de l’entrée en vigueur de la seconde directive modifiant les pouvoirs d’intervention. La Cour affirme que « les dispositions fixant la procédure et les pouvoirs de l’institution constituent des règles de procédure » soumises à une application immédiate. Dès lors, le changement de fondement législatif n’affecte pas la validité des actes pris selon les modalités en vigueur au jour de la décision.

L’affirmation du caractère immédiat des règles de forme permet ainsi de sécuriser la continuité de l’action de surveillance au sein du marché intérieur.

II. La pérennité des pouvoirs de contrôle de l’institution

A. La validité de la saisine sous l’empire de lois successives L’annulation du premier arrêt repose sur le constat que le Tribunal a méconnu les principes régissant la succession des lois dans le temps. Le juge affirme que l’abrogation d’une directive ne saurait entraîner la caducité automatique des procédures de contrôle engagées mais non encore terminées. La compétence de l’institution pour demander la modification d’une mesure nationale demeure effective tant que l’acte initial n’est pas devenu définitif. Le raisonnement suivi par la Cour assure ainsi que les objectifs de libéralisation du secteur du gaz ne soient pas entravés par des vides juridiques.

B. L’équilibre entre sécurité juridique et efficacité du droit La protection de la confiance légitime ne garantit pas aux opérateurs le maintien d’un cadre procédural immuable durant toute la durée d’une instance. Les intérêts économiques privés doivent s’incliner devant la nécessité pour l’Union d’appliquer uniformément les nouvelles exigences de transparence et de concurrence. La Cour valide ainsi la possibilité pour l’institution de modifier sa base juridique pour répondre aux évolutions constantes du droit positif européen. Le renvoi de l’affaire devant les premiers juges permettra d’évaluer la conformité matérielle de l’exemption gazière avec les objectifs du marché.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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