Cour de justice de l’Union européenne, le 27 février 2014, n°C-571/12

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 27 février 2014, un arrêt important concernant l’étendue des pouvoirs de contrôle des autorités douanières nationales. Dans cette espèce, un importateur de denrées alimentaires a fait l’objet d’un contrôle portant sur la classification tarifaire de marchandises mises en libre pratique. L’administration fiscale a prélevé des échantillons sur quelques déclarations pour ensuite appliquer les résultats de ces analyses à des opérations d’importation plus anciennes. Le juge national de cassation, l’Augstākās tiesas Senāts, a saisi la Cour d’une question préjudicielle portant sur l’interprétation du code des douanes communautaire. Il s’agissait de savoir si les résultats d’un examen partiel peuvent être étendus à des déclarations antérieures pour lesquelles la mainlevée fut déjà octroyée. La juridiction européenne distingue strictement les deux mécanismes de contrôle en limitant la fiction de l’examen partiel à la déclaration unique tout en validant l’extension via la révision.

I. L’exclusion de l’extension des résultats d’examen au titre de l’article 70

A. Le périmètre strict de la fiction de l’examen partiel

La Cour souligne que l’article 70 prévoit une fiction de qualité uniforme permettant aux autorités d’étendre les résultats d’un examen partiel à toute la déclaration. Cette disposition énonce que « lorsque l’examen ne porte que sur une partie des marchandises faisant l’objet d’une même déclaration, les résultats sont valables pour l’ensemble ». Le juge européen précise toutefois que cette possibilité d’extension concerne les seules marchandises qui font l’objet d’une « même déclaration » au sens strict du texte. Les autorités ne peuvent donc pas invoquer cet article pour lier entre elles plusieurs opérations d’importation distinctes, même si les produits semblent physiquement identiques. La sécurité juridique des opérateurs économiques impose une interprétation littérale de cette règle afin d’éviter toute généralisation abusive des résultats d’un contrôle ponctuel.

B. L’exigence temporelle liée à la mainlevée des marchandises

L’application de l’article 70 est également circonscrite à la période précédant l’octroi de la mainlevée par les services douaniers compétents lors du dédouanement. La Cour affirme que cette procédure vise à garantir des opérations rapides et efficaces en dispensant les administrations d’un examen systématique de chaque colis importé. Le déclarant peut demander un examen supplémentaire s’il estime que les résultats partiels ne sont pas valables pour le reste des marchandises de la déclaration. Or, une telle contestation devient matériellement impossible dès lors que les produits ont été libérés et ne peuvent plus être présentés physiquement au service. L’équilibre entre les besoins de l’administration et les droits des opérateurs interdit donc l’usage de cette fiction juridique après la clôture de la procédure initiale.

II. La validité de l’extension par le prisme du contrôle a posteriori

A. La souplesse probatoire de la révision des déclarations

L’article 78 du code des douanes permet aux autorités de procéder d’office à la révision d’une déclaration après avoir accordé la mainlevée des marchandises. Les juges considèrent que cette disposition autorise l’administration à rétablir la situation réelle en tenant compte des nouveaux éléments dont elle dispose légalement. Rien n’empêche alors les autorités d’utiliser les résultats d’un examen partiel récent pour rectifier des déclarations antérieures portant sur des marchandises strictement identiques. L’identité des produits peut se fonder sur le contrôle des documents commerciaux ou sur les propres indications fournies par l’importateur lors de ses dépôts. Cette méthode permet d’aligner la situation douanière sur la réalité économique tout en respectant le délai de prescription de trois ans pour la dette.

B. La préservation nécessaire des droits de la défense

La possibilité d’étendre les résultats d’une analyse à des déclarations passées est conditionnée par le respect scrupuleux des droits de la défense du déclarant. Il importe que l’importateur « dispose du droit de contester une telle extension » en apportant tout élément probant de nature à étayer ses allégations contraires. Il peut notamment démontrer l’absence d’identité entre les marchandises contrôlées et celles ayant fait l’objet des importations antérieures pour éviter une taxation injustifiée. Une affirmation générale sur la modification possible de la composition chimique des produits alimentaires ne saurait toutefois suffire à renverser la preuve documentaire. Le juge national doit vérifier si le déclarant a fourni des indications différentes ou s’il a sollicité une révision spontanée avant l’engagement des contrôles.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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