La Cour de justice de l’Union européenne, saisie par le tribunal régional de Gliwice, a rendu une décision importante le 7 septembre 2023. Cette affaire concerne l’interprétation de l’article 13 du règlement numéro 650/2012 relatif aux successions internationales dans un contexte de renonciation tardive. Une héritière mineure, résidant en Pologne, se trouve confrontée à la succession d’un proche décédé en Allemagne, pays de sa dernière résidence habituelle. Son représentant légal ayant omis de déclarer la renonciation dans le délai requis, une demande d’approbation du refus des effets de cette omission est introduite. Le tribunal d’arrondissement de Gliwice rejette la requête, provoquant un appel devant la juridiction de renvoi qui interroge la Cour sur sa propre compétence. La question posée est de savoir si la compétence pour recevoir une déclaration de renonciation couvre également l’approbation judiciaire d’un refus d’omission tardive. La Cour répond négativement, estimant que les juridictions de la résidence habituelle du déclarant ne sont pas compétentes pour approuver un tel refus juridique. Cette solution repose sur une lecture rigoureuse des textes afin de préserver l’unité de la procédure successorale européenne.
I. La délimitation stricte du concept de réception des déclarations
A. Une interprétation textuelle et autonome de la compétence alternative Les termes d’une disposition européenne ne comportant aucun renvoi au droit national doivent trouver une interprétation autonome et uniforme au sein de l’Union. La Cour souligne que les juridictions de la résidence habituelle de l’héritier sont compétentes uniquement pour « recevoir » les déclarations d’acceptation ou de renonciation. Cette mission se limite à une fonction de guichet facilitant les démarches administratives des héritiers résidant loin du lieu d’ouverture de la succession. L’article 13 prévoit ainsi un for alternatif de compétence juridictionnelle visant à simplifier les démarches des héritiers n’ayant pas leur résidence dans l’État compétent. Le législateur a limité le rôle de ce for subsidiaire à la simple validation formelle d’un acte de volonté unilatéral.
B. L’exclusion des actes juridictionnels excédant la simple réception L’approbation judiciaire d’un refus de subir les effets d’une omission ne constitue manifestement pas un acte de réception visé par la disposition litigieuse. Une telle décision juridictionnelle d’approbation nécessite des mesures allant au-delà de la simple réception d’une déclaration, comme l’adoption d’une décision complexe. La Cour précise que « cet article 13 ne vise pas la compétence de ces juridictions pour approuver le refus de l’héritier » de sa renonciation. Cette distinction protège la clarté du dispositif en séparant la formalité déclarative de l’appréciation judiciaire portant sur la validité ou les délais de l’acte. Cette analyse technique de la réception des actes justifie une application restreinte des exceptions de compétence territoriale.
II. La protection de l’équilibre des compétences juridictionnelles
A. Le caractère dérogatoire et limité du for de la résidence habituelle L’article 13 instaure un for additionnel dérogeant aux règles générales de compétence qui privilégient normalement les juridictions de l’État de la résidence du défunt. Cette compétence possède une portée limitée afin de ne pas vider de sa substance la règle de principe édictée par l’article 4 du règlement. Le législateur européen a entendu restreindre cette dérogation aux seules formalités de réception pour éviter une fragmentation excessive du contentieux successoral international. Une extension de cette compétence à l’approbation de renonciations tardives créerait alors un risque de conflits de juridictions préjudiciable à la sécurité juridique. La préservation de l’exclusivité du for principal assure la cohérence de l’ensemble du système de règlement des successions.
B. La préservation de la cohérence globale du système successoral européen Le règlement tend à faciliter le bon fonctionnement du marché intérieur en supprimant les entraves à la libre circulation des personnes lors des successions. La concentration des procédures devant les juridictions de la résidence habituelle du défunt assure une administration efficace et prévisible du patrimoine global concerné. Attribuer une compétence de fond à la juridiction de la résidence de l’héritier nuirait gravement à l’objectif de règlement rapide et cohérent du litige. La solution retenue garantit que seul le juge du fond apprécie les conséquences juridiques liées au non-respect des délais de renonciation successorale.