La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le vingt-huit avril deux mille vingt-deux, précise les obligations pesant sur les États membres. Cette décision porte sur le respect des valeurs limites de particules fines et l’efficacité des plans d’action destinés à réduire la pollution atmosphérique nocive.
Plusieurs zones urbaines ont connu des dépassements réguliers des seuils journaliers fixés pour la protection de la santé humaine sur une période de quinze ans. L’autorité nationale invoquait une diminution structurelle des concentrations ainsi que l’influence de phénomènes naturels pour justifier ces écarts persistants par rapport aux normes.
L’institution requérante a engagé une procédure de manquement après plusieurs avis motivés restés sans effet suffisant malgré les mesures annoncées par les autorités nationales. Les débats portaient sur la réalité des dépassements systématiques et sur le caractère approprié des plans de protection de l’atmosphère mis en œuvre localement.
La question posée concerne la caractérisation d’un manquement fondé sur le dépassement des seuils de pollution et l’obligation d’abréger au maximum les périodes de non-conformité.
La Cour juge que le seul dépassement des valeurs limites suffit à établir la violation du droit de l’Union, indépendamment des intentions ou des tendances. Elle considère également que la persistance des dépassements démontre l’inaptitude des mesures prises à garantir un retour rapide au respect des normes sanitaires impératives.
I. La caractérisation objective du manquement aux valeurs limites de pollution
A. L’insuffisance du constat d’une tendance à la baisse des concentrations
La Cour rappelle que les États membres doivent veiller à ce que les niveaux de polluants ne dépassent pas les valeurs limites fixées par la directive. Le non-respect de cette obligation résulte d’un examen purement factuel des données collectées par les stations de mesure réparties sur le territoire national concerné. L’argumentation portant sur une baisse structurelle des concentrations ne saurait suffire à écarter le manquement tant que les seuils réglementaires demeurent franchis annuellement. La juridiction souligne ainsi que les dépassements constatés doivent être considérés comme « persistants et systématiques » sans que des preuves supplémentaires soient nécessaires à cet égard.
B. L’exigence d’une démonstration probante de l’influence des sources naturelles
Les autorités nationales ont tenté de justifier certains dépassements en invoquant la contribution de sources naturelles pour certaines zones géographiques particulièrement exposées aux poussières. Le droit européen permet d’exclure ces phénomènes du calcul de la pollution à condition que l’État membre fournisse des preuves précises et scientifiquement documentées. En l’espèce, l’absence de méthodologie adéquate et de stations de mesure appropriées empêche de retenir cette déduction pour les périodes antérieures à l’année deux mille seize. Cette approche rigoureuse de la matérialité de l’infraction conduit alors à examiner la pertinence des réponses apportées par les autorités pour corriger durablement ces situations.
II. L’inefficacité manifeste des mesures de remédiation à la pollution atmosphérique
A. Le non-respect des exigences matérielles des plans de qualité de l’air
L’article vingt-trois impose la création de plans relatifs à la qualité de l’air prévoyant des mesures appropriées pour abréger les périodes de dépassement des seuils. La Cour relève que les documents produits manquent de calendriers précis ou d’estimations chiffrées concernant l’amélioration attendue de la situation sanitaire dans les zones concernées. « L’État membre concerné est tenu d’établir un plan relatif à la qualité de l’air qui réponde à certaines exigences » formelles inscrites dans les annexes techniques. L’absence d’informations précises sur les délais de mise en conformité constitue une méconnaissance flagrante des obligations de transparence et d’efficacité imposées par le législateur européen.
B. L’appréciation du délai de mise en conformité au regard de l’urgence sanitaire
Le juge européen estime que la persistance des dépassements pendant plusieurs années après l’entrée en vigueur de la directive démontre l’insuffisance des mesures adoptées. La marge de manœuvre laissée aux autorités pour déterminer leurs politiques publiques est limitée par l’impératif de protection de la santé humaine et de l’environnement. L’État n’a manifestement pas adopté en temps utile des dispositions permettant d’assurer que la période de dépassement des valeurs limites soit effectivement la plus courte possible. Le maintien de niveaux de pollution supérieurs au double des normes autorisées pendant près d’une décennie confirme le caractère tardif et lacunaire de l’action publique.