Cour de justice de l’Union européenne, le 3 mai 2012, n°C-337/10

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt du 3 mai 2012, précise les modalités d’indemnisation des congés non pris lors du départ à la retraite. Un fonctionnaire ayant exercé des activités de pompier sollicite le versement d’une indemnité pour des jours de congés annuels non épuisés en raison d’une maladie. Ce litige amène le tribunal administratif de Francfort-sur-le-Main à interroger la juridiction européenne sur l’interprétation de la directive relative à l’aménagement du temps de travail. La question posée est de savoir si le droit à une indemnité financière s’applique aux agents publics et quelles limites le droit national peut y apporter. La Cour valide le droit à une compensation financière pour le congé minimal tout en autorisant les États à refuser cette indemnité pour les congés supplémentaires. La protection du droit au repos minimal sera étudiée en premier lieu, avant d’analyser les marges de manœuvre laissées aux législations nationales.

I. L’affirmation du droit à une indemnité financière pour le congé annuel minimal

A. L’assimilation du fonctionnaire-pompier au travailleur bénéficiaire

Le juge européen rappelle que la notion de travailleur au sens du droit de l’Union englobe toute personne exerçant des activités réelles et effectives. L’article 7 de la directive 2003/88 « doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à un fonctionnaire exerçant des activités de pompier dans des conditions normales ». Cette solution écarte toute exclusion fondée sur le statut de droit public de l’agent ou sur la nature spécifique de ses missions opérationnelles de secours. En conséquence, les pompiers bénéficient du droit fondamental au congé annuel payé, indépendamment des particularités inhérentes à leur engagement professionnel au service de la collectivité.

L’indemnisation des périodes de repos non prises doit être garantie lorsque la relation de travail prend fin, notamment pour cause de départ à la retraite.

B. Le droit à compensation pécuniaire lors du départ à la retraite

L’arrêt souligne qu’au moment de la cessation de la relation de travail, le travailleur ne peut plus bénéficier de son repos effectif en nature. La Cour énonce que le fonctionnaire a droit, lors de son départ à la retraite, à une « indemnité financière pour congé annuel payé non pris ». Cette obligation s’applique même lorsque l’absence de prise de congé résulte d’une incapacité de travail prolongée causée par une pathologie médicalement constatée par l’administration. Aucune condition liée à la cause de l’inaptitude ne saurait donc restreindre l’octroi de cette compensation financière nécessaire à la protection de la santé.

Si le droit au congé minimal est protégé de manière absolue, les États membres conservent une autonomie s’agissant des droits supplémentaires facultatifs.

II. Les limites encadrant le cumul et l’étendue de l’indemnisation

A. La liberté nationale quant aux congés supplémentaires facultatifs

Le droit de l’Union fixe un socle minimal de quatre semaines de congés payés que les législations des États membres ne peuvent légalement réduire. Toutefois, le droit national peut accorder des « droits à congé payé supplémentaires s’ajoutant au droit à congé annuel payé minimal » de quatre semaines. La Cour considère que l’article 7 de la directive ne s’oppose pas à des dispositions restrictives pour les congés excédant le seuil européen de protection. Cette distinction protège l’effectivité de la norme européenne tout en laissant une souplesse nécessaire aux politiques sociales nationales dans leur diversité réglementaire.

La marge de manœuvre étatique rencontre cependant une limite impérative s’agissant de la durée des périodes de report autorisées pour les congés acquis.

B. L’invalidité des délais de report restreignant l’effectivité du droit

La juridiction européenne examine la conformité des mécanismes de caducité du droit au congé lorsque celui-ci n’est pas exercé dans les délais prévus. Elle juge contraire au droit de l’Union une disposition nationale limitant par une « période de report de neuf mois » le cumul des indemnités dues. Un tel délai est considéré comme trop bref car il ne permet pas de garantir au travailleur le bénéfice effectif de ses droits pécuniaires. L’extinction automatique du droit à l’indemnité financière à l’expiration d’une période aussi courte porte atteinte à la finalité protectrice de la directive européenne.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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