Cour de justice de l’Union européenne, le 30 mai 2013, n°C-168/13

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le trente mai deux mille treize, précise les modalités de contestation des décisions de remise. Une autorité judiciaire étrangère émet un mandat d’arrêt pour enlèvement d’enfant contre une personne interpellée sur le territoire national en septembre deux mille douze. Les autorités de l’État d’émission sollicitent ensuite le consentement des magistrats compétents pour poursuivre l’intéressé pour des faits commis avant son transfert effectif. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux autorise, par un arrêt du quinze janvier deux mille treize, l’extension des poursuites pénales. Un pourvoi est formé et le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire, interroge la Cour de justice sur la validité d’un recours suspensif. La juridiction doit déterminer si le droit de l’Union interdit de prévoir une voie de recours suspendant l’exécution du consentement donné par l’autorité judiciaire. La Cour répond que les États membres peuvent instaurer un tel recours, à condition que la décision finale intervienne dans les délais fixés par la décision-cadre.

I. La conciliation de la protection juridictionnelle avec les objectifs de la décision-cadre

A. La reconnaissance de l’autonomie procédurale des États membres La décision-cadre ne réglemente pas expressément la possibilité de former un recours suspensif contre les décisions accordant le consentement à l’extension d’un mandat d’arrêt européen. Ce silence textuel ne signifie pas pour autant que le législateur européen interdit aux États d’instituer des voies de recours internes pour les justiciables. Le principe de protection juridictionnelle effective ouvre un droit d’accès à un tribunal, sans imposer l’instauration de plusieurs degrés de juridiction pour l’individu privé de liberté. La Cour souligne que « toute la procédure de remise entre États membres prévue par la décision-cadre est, conformément à celle-ci, exercée sous contrôle judiciaire ». L’absence de réglementation explicite laisse une marge d’appréciation aux autorités nationales quant aux modalités concrètes de mise en œuvre des objectifs de sécurité publique. Les règles constitutionnelles relatives au respect du droit à un procès équitable peuvent ainsi s’appliquer, pourvu qu’elles ne fassent pas échec à l’application du texte.

B. La persistance de la confiance réciproque entre les autorités judiciaires Le mécanisme du mandat d’arrêt européen repose sur un degré de confiance élevé entre les États membres afin de simplifier la coopération judiciaire internationale. Le principe de reconnaissance mutuelle impose aux juridictions d’exécuter les mandats de remise, sauf dans les cas de non-exécution limitativement énumérés par le droit positif. Les États sont tenus de respecter les droits fondamentaux, condition garantissant la confiance nécessaire au bon fonctionnement de l’espace de liberté et de sécurité. Il appartient à l’ordre juridique de l’État d’émission de fournir les voies de recours permettant de contester la légalité de la procédure pénale engagée au fond. La décision-cadre « respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus par l’article 6 du traité sur l’Union européenne et reflétés dans la Charte ». Cette protection équivalente justifie que le système de remise soit plus rapide que les anciennes procédures d’extradition multilatérales marquées par une grande complexité administrative.

II. L’exigence de célérité comme limite à l’exercice des voies de recours

A. Le respect impératif des délais de traitement des demandes L’accélération de la coopération judiciaire constitue un aspect central de la décision-cadre, se traduisant par des délais stricts pour l’adoption des décisions de remise définitives. L’article dix-sept impose que le mandat d’arrêt soit traité d’urgence afin d’éviter les retards inhérents aux relations de coopération classiques entre les nations membres. Si un recours national est prévu, celui-ci ne saurait « intervenir en méconnaissance des délais » mentionnés pour l’adoption d’une décision revêtant un caractère judiciaire définitif. La Cour précise que la décision finale doit intervenir dans les soixante jours suivant l’arrestation, avec une prolongation possible de trente jours dans certains cas. Les dispositions relatives au consentement pour une infraction supplémentaire exigent que la réponse soit apportée au plus tard trente jours après la réception de la demande. Le respect de ce cadre temporel assure que l’instauration d’un double degré de juridiction ne compromette pas l’efficacité globale du dispositif de remise européen simplifié.

B. La préservation de l’efficacité de l’espace de liberté et de sécurité L’instauration d’un recours suspensif doit demeurer compatible avec la logique de suppression de l’extradition entre les États membres au profit d’un système judiciaire effectif. La Cour juge qu’un tel recours peut être exercé « pour autant que la décision définitive est adoptée dans les délais visés à l’article dix-sept ». Cette solution préserve l’équilibre entre le droit individuel à un recours effectif et l’intérêt général attaché à la répression transfrontalière des infractions pénales les plus graves. L’autorité judiciaire d’exécution dispose normalement des renseignements suffisants pour se prononcer en connaissance de cause sur l’extension du mandat initialement délivré par l’État requérant. Une application cohérente de la décision-cadre interdit que les délais pour adopter une décision de consentement soient supérieurs à ceux prévus pour la remise de l’intéressé. La jurisprudence garantit ainsi la célérité nécessaire à la justice pénale européenne tout en maintenant un standard élevé de protection des libertés individuelles fondamentales des citoyens.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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