La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt du 30 septembre 2020, précise l’étendue des droits sociaux d’un parent étranger. Un ressortissant d’un pays tiers et sa fille, souffrant d’une maladie grave, ont sollicité des titres de séjour pour des motifs médicaux.
L’autorité administrative a rejeté ces demandes le 8 février 2016 et a assorti sa décision d’une injonction de quitter le territoire national. L’organisme social a alors supprimé l’aide financière accordée au père dès que sa fille a atteint l’âge de la majorité civile.
La cour du travail de Liège, saisie par une décision du 17 mai 2019, interroge la juridiction de Luxembourg sur le maintien des besoins essentiels. Le litige porte sur l’interprétation des garanties prévues par la directive 2008/115 lorsque l’expulsion menace la santé d’un enfant majeur.
La juridiction européenne affirme que le parent doit bénéficier d’un soutien matériel pour assurer l’effectivité de la protection contre le refoulement. Cette analyse repose sur une extension de la protection suspensive (I) et sur la consécration d’un droit aux besoins de base (II).
I. L’extension de la protection suspensive au parent indispensable
A. L’effet suspensif fondé sur le principe de non-refoulement
Le recours exercé contre une décision de retour doit revêtir un caractère suspensif automatique pour prévenir toute violation des droits fondamentaux de l’homme. La Cour rappelle que l’exécution d’un renvoi est illégale si elle expose un malade à une « détérioration grave et irréversible de son état de santé ». Cette exigence impérative découle de l’article 47 de la Charte et du respect du principe de non-refoulement garanti par le droit européen. Bien que le parent ne subisse pas directement ce risque, son départ forcé priverait l’enfant de la présence indispensable à sa propre survie.
B. La persistance de la dépendance au-delà de la majorité
La dépendance physique du descendant justifie l’octroi d’un droit au séjour temporaire pour le parent assurant les soins et le soutien affectif quotidien. L’arrêt souligne que l’éloignement du père « risquerait d’empêcher, dans les faits, ladite personne de se maintenir temporairement » sur le territoire de l’État. La circonstance que l’enfant soit majeur ne modifie pas cette appréciation juridique tant que le lien de nécessité demeure médicalement et factuellement prouvé. Cette protection s’étend ainsi au cercle familial proche pour garantir l’effet utile des droits conférés au malade par le législateur de l’Union.
II. L’obligation de garantie des besoins essentiels du ressortissant
A. L’effectivité du maintien temporaire sur le territoire national
L’article 14 de la directive 2008/115 prévoit des garanties impératives durant la période pendant laquelle l’éloignement est légalement suspendu ou reporté par l’autorité. Les États membres doivent assurer le maintien de l’unité familiale ainsi que le traitement indispensable des maladies pour les personnes se trouvant vulnérables. Le juge précise que le parent doit être « en mesure de rester auprès de son enfant majeur et de lui apporter le soutien ». Le refus de toute assistance matérielle placerait l’intéressé dans une situation de précarité incompatible avec sa mission d’accompagnant.
B. La subsidiarité de l’aide publique liée à l’indigence
La prise en charge des besoins de base par la solidarité publique demeure conditionnée par l’absence de ressources financières personnelles ou familiales suffisantes. La Cour précise que cette obligation ne s’impose que si le ressortissant « est dépourvu des moyens lui permettant de pourvoir lui-même à ses besoins ». Les autorités nationales déterminent librement la forme de l’aide sociale, laquelle peut être versée au profit exclusif du descendant malade en situation. L’assistance doit simplement permettre au parent de demeurer sur le territoire pour exercer ses responsabilités morales et physiques auprès de l’enfant souffrant.